L’hebdomadaire parisien "Jeune Afrique" qui vient - suite au voyage inattendu de François Soudan à Kinshasa - de sceller sa "réconciliation" avec le régime kabiliste (voir J.A édition 2806 du 19 au 25 octobre 2014) confirme dans une "brève" que "Joseph Kabila" ne présentera pas la candidature du "Kinois" Tharcisse Loseke au poste de secrétaire général de la Francophonie. Si cette info n’est pas un "scoop" en soi, elle ne manquera pas de susciter des interrogations sur la "loyauté" du numéro un Congolais. A un mois de l’élection du successeur d’Abdou Diouf, Kinshasa n’a pas encore présenter un candidat officiel. Des sources indiquent que "Joseph Kabila" a promis son appui à Henri Lopès mais surtout à la Canadienne Michaëlle Jean. Quelle en serait la "contrepartie"?
Dans sa "brève", le magazine parisien présente Tharcisse Loseke en "candidat autoproclamé" au poste de secrétariat général de l’Organisation internationale de la Francophonie. Le journal avait-il franchement besoin de cet adjectif qui s’apparente à de la méchanceté gratuite?
Il est en revanche vrai que depuis le 15 août dernier, le candidat Loseke "frappe à la porte" du gouvernement de son pays, le Congo-Kinshasa, afin que celui ci "présente officiellement" sa candidature. "En vain", note "J.A." Et d’ajouter : "A défaut du parrainage de Joseph Kabila, ce membre du parti d’opposition UDPS a obtenu celui d’Etienne Tshisekedi, le "lider maximo" de cette formation - lequel continue de se présenter comme le véritable vainqueur de la présidentielle de 2010 (sic!)". "Pas de quoi, on l’imagine, à valider sa candidature".
Citant une source non autrement identifiée à la Présidence de la République - décidément! -, le journal écrit : "Loseke s’est manifesté bien tard, (...). Et en tant que président en exercice de l’OIF, Kabila se doit de favoriser le consensus, pas de présenter un candidat de plus." Un argument qui ne résiste guère à l’analyse. Loseke s’est manifesté "bien tard" par rapport à quel délai? Un délai fixé dans quel texte? Quel est l’article de la Charte de la Francophonie qui interdit au président en exercice de l’OIF d’appuyer un candidat originaire de son pays?
La source citée par J.A. aurait dû avoir un brin de bravoure pour dire haut et fort que Loseke est un candidat "politiquement incorrect". Et que "Joseph Kabila" est au service uniquement des Congolais appartenant à la "Majorité présidentielle". Les choses auraient été beaucoup plus claires.
Dans une interview accordée à Congo Indépendant le 15 octobre, soit deux mois après le dépôt de sa candidature au ministère congolais des Affaires étrangères, le candidat Loseke est resté lucide. A la question de savoir si l’on pouvait le considérer comme le candidat officiel de la République démocratique du Congo, il a eu cette réponse : "Formellement, non ! Selon les usages, tout prétendant à cette fonction ne peut être reçu valablement qu’après introduction formelle de sa candidature par le gouvernement de son pays d’origine. Ce qui n’est pas encore le cas en ce qui me concerne. C’est la raison pour laquelle je m’active afin que mon pays présente ma candidature le plus rapidement possible". Et d’ajouter : "Je note que ma candidature n’était ni attendue ni suscitée par le gouvernement de mon pays. En réalité, je ne me suis décidé à me porter candidat secrétaire général de la Francophonie qu’après avoir acquis la certitude que mon pays n’avait pas de postulant".
Dans un communiqué daté du 18 octobre, Le président de l’UDPS, Etienne Tshisekedi wa Mulumba, apportait son soutien à "Tharcisse" qui est un cadre de sa formation politique. Maladresse? Après avoir relevé "le sens de responsabilité autant que les qualités humaines et intellectuelles" du candidat, "Tshitshi" d’exhorter "toutes les forces vives, au-delà des clivages idéologiques et philosophiques légitimes, à appuyer ce digne fils du pays". Pour lui, "il est question de la visibilité du Grand Congo dans les instances internationales". Un avis qui est loin d’être partagé...à la Présidence du Congo démocratique.
Selon des sources bien informées, "Joseph Kabila" aurait promis au Brazzavillois Denis Sassou Nguesso le soutien de Kinshasa à l’ambassadeur Henri Lopès. Les mêmes sources laissent entendre que le "raïs" aurait fait la même promesse à la Canadienne Michaëlle Jean.
Pour la petite histoire, "Joseph" et "Michaëlle" se connaissent plutôt bien. Alors qu’elle se trouvait à cinq mois de la fin de son mandat en qualité de gouverneure générale du Canada, Jean avait été reçue avec pompe à Kin. Elle avait fait une "escale" à Goma. C’était en avril 2010 lors du bras de fer épique entre le gouvernement congolais et la firme canadienne First Quantum. En cause, la résiliation du contrat d’exploitation minière portant sur Kingamyambo Musonoi Tailings.
Notons qu’avant de visiter la RD Congo, Jean avait sillonné le Sénégal, le Cap-Vert et le... Rwanda de Paul Kagame. La dame était déjà en campagne. Dans son allocution en réponse au speech du Congolais, elle déclarait notamment : «(...), nous avons en partage des valeurs et des liens. Des valeurs que nous défendons en tant que membres de l’Organisation internationale de la Francophonie, non seulement le rayonnement de la langue et de la culture françaises, mais la diversité culturelle, la paix, la gouvernance démocratique et la consolidation de l’Etat de droit. (...)». Tiens! Tiens!
Un analyste joint au téléphone lundi soir à Kinshasa donne sa lecture :"Joseph Kabila n’hésiterait pas à appuyer la candidature de Michaëlle Jean en contrepartie d’une neutralité du Canada sur l’épineuse question de la révision constitutionnelle pour lui permettre de briguer un troisième mandat...". Affaire à suivre.
B.A.W