Pour sa part, le MLC/L de Thomas Luhaka s’inscrit dans la logique d’une table ronde pour un chronogramme adapté aux nouveaux défis.
Les consultations du Palais de la Nation poursuivent leur bonhomme de chemin. Au neuvième jour de ces consultations, hier mardi le 9 juin, le Président Joseph Kabila s’est entretenu avec trois délégations. La première, celle de la Majorité présidentielle (MP), conduite par son Secrétaire général Aubin Minaku. Le second groupe a été celui du Mouvement de libération du Congo libéral (MLC/L), sous la conduite de Thomas Luhaka. Enfin, les délégués de l’Opposition citoyenne, une nouvelle plate-forme politique pilotée par « l’homme-proverbe », Justin Bitakwira.
« Nous de la Majorité présidentielle (MP), sommes prêts, derrière les Institutions de la République et l’autorité morale de la Majorité, Joseph Kabila, à dialoguer en tout temps dans le respect des principes mis en place par le chef de l’Etat », a déclaré Aubin Minaku, à l’issue d’un long entretien hier mardi le 9 juin, avec le Président Joseph Kabila au Palais de la Nation.
Aubin Minaku a été à la tête d’une forte délégation d’une quarantaine de dignitaires de la MP. Deux questions ont été au centre de cette audience qui a eu lieu en début de soirée. A savoir, le dialogue et le processus électoral. En ce qui concerne le calendrier électoral, la Majorité présidentielle, par la bouche de son Secrétaire général, fait quelque peu sa levée de bouclier. « Nous soutenons le calendrier électoral global rendu public par la Commission électorale nationale indépendante (CENI), mais tout en restant raisonnables en y contribuant afin que ce chronogramme soit respecté par tous : les institutions de la République qui doivent soutenir la Ceni, la Ceni elle-même, les acteurs politiques ainsi que la population », a déclaré Aubin Minaku.
L’OPPOSITION PRISE DANS SON PROPRE PIEGE ?
Le processus électoral en RD Congo est désormais irréversible. Quatre élections doivent être organisées au cours de cette année 2015. A savoir, les locales, les provinciales, les sénatoriales et l’élection des Gouverneurs de provinces, considérées comme les arriérés du cycle électoral de 2011. Après ces scrutins, la RD Congo devra organiser, avant la fin de l’année 2016, la présidentielle à un seul tour, couplée avec les législatives nationales. La question qui se pose est celle de savoir si, au stade actuel de la situation, la RD Congo dispose des moyens financiers nécessaires pour organiser toutes ces élections dans un climat apaisé, gage de l’acceptabilité de leurs résultats.
Abordant cette question, Aubin Minaku s’est montré quelque peu tranchant. « Nous notons que c’est à la suite d’une demande pressante et incessante de l’Opposition politique congolaise et de la Société civile, que la CENI a eu à mettre en place et adopté un calendrier électoral global. Nous soutenons ce Calendrier ». C’est tout dire. On comprend facilement la position de la plate-forme politique au pouvoir. La MP, autrefois prise par une Opposition qui l’a prise par la ceinture pour exiger un calendrier électoral global, tient à ce jour, la même Opposition présidentielle par la barbichette. En tout cas, Aubin Minaku n’a pas explicitement déclaré hier que la MP était favorable à l’idée d’un calendrier électoral révisé. Comme qui dirait, l’Opposition politique qui, en son temps avait réclamé un chronogramme complet du processus électoral, doit savoir prendre ses responsabilités.
Quoi qu’il en soit, la MP refuse de faire cavalier seul, quant aux autres considérations politiques. En témoigne, la suite du propos du Secrétaire général du cartel politique au pouvoir en RD Congo. « Pour le reste, nous appuyons les différentes options levées par nos institutions. En ce qui concerne l’installation de nouvelles provinces, nous pensons que tout sera mis en œuvre afin que les vingt-six provinces nouvellement créées soient effectives. En même temps, nous demeurons ouverts et allons poursuivre nos réflexions parce qu’en ce moment, chaque composante de la RD Congo doit contribuer à la concrétisation de toutes les options essentielles. Ce, de manière efficiente », a renchéri Aubin Minaku pour faire ce qui s’apparente à un bouclier de la foi.
LA VOLONTE POLITIQUE D’ALLER AUX ELECTIONS EST LA !
Coûte que coûte, un dialogue politique pour un processus électoral apaisé et crédible en RD Congo. Hélas, ce vœu des Congolais, exprimé au travers de leurs structures respectives, est bien loin de faire l’unanimité au sein de la classe politique. Si, la Majorité au pouvoir, les Confessions religieuses ainsi que les Associations et regroupements de la Société civile soutiennent l’initiative d’un dialogue républicain, certains partis de l’Opposition (plurielle) flanquent tout par-dessus bord.
Interrogé au sujet de cette attitude de certains partis politiques se réclamant de la Contestation, Aubin Minaku reste serein. « L’essentiel, c’est qu’au niveau du leadership, le Président de la République est foncièrement pour le dialogue avec tout le monde. Sauf ceux qui veulent être comme des marginaux. Nous allons évoluer par le dialogue pour l’intérêt de la République », poursuit Aubin Minaku.
En ce qui concerne une autre question de la presse en rapport avec les moyens nécessaires à l’organisation des élections en vue, Aubin Minaku n’y est pas allé par le dos de la cuillère. « Le premier point à retenir, c’est qu’il y a une volonté politique pour organiser les élections. En 2006, ça été le cas avec les moyens de la Communauté internationale. En 2011, le pays a encore organisé les élections sans appui financier extérieur. Cette fois-ci, l’engagement politique est là. Le reste, c’est le travail des institutions. Notamment, le Gouvernement. A partir du moment où il a accepté le calendrier de la Ceni, cela signifie que tout sera mis en œuvre pour que les élections soient organisées normalement ».
Parmi les personnalités qui ont accompagné le secrétaire général de la MP, figurent, entre autres : le Premier ministre Augustin Matata Ponyo, le 1er vice-président de l’Assemblée nationale, Charles Mwando Nsimba, le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, Evariste Boshab, le ministre du Plan Olivier Kamitatu, le ministre en charge des Relations avec le Parlement, Tryphon Kin –Kiey, Lambert Mende de la Communication et Médias, Félix Kabange Numbi de la Santé publique, Baudouin Banza Mukalay, ministre de la Culture et Arts.
A eux, s’ajoutent d’autres têtes couronnées du cartel, en l’occurrence le Conseiller spécial du Président Joseph Kabila en matière de sécurité, Pierre Lumbi, le président de l’Assemblée provinciale du Katanga et président national de l’Unafec, Gabriel Kyungu Wa Kumwanza, et les députés nationaux Pius Muabilu Mukalay, Oscar N’saman O’Lutu, Konde Vila Ki Kanda, l’actuel Secrétaire général du PPRD, Henri Mova Sakani et Ramazani Shadari, l’un de ses trois adjoints.
THOMAS LUHAKA : « PAS DE PREALABLES POUR LE DIALOGUE »
L’homme, on le connait, a un côté quelque peu bavard. Thomas Luhaka. C’est lui. A la tête de la délégation de son parti politique « Mouvement de libération du Congo/Libéral » (MLC/L), il a également échangé hier avec le président de la République, dans le cadre des consultations du Palais de la nation. Contrairement à ses habitudes, Thomas Luhaka s’est montré réservé. Sans doute que son statut actuel de vice-Premier ministre et ministre des PTN-TIC pourrait expliquer cette nouvelle posture du président national du MLC/L.
« Nous avons évoqué deux sujets : le calendrier électoral et le dialogue », a déclaré lapidairement Thomas Luhaka à la presse. En ce qui concerne la position du MLC/L par rapport au dialogue en perspective, il déclare : « Nous soutenons le dialogue parce que nous sommes un parti politique qui pense que le dialogue est un lubrifiant politique pour pouvoir régler les problèmes de la société ». Au sujet du calendrier électoral, le Président du MLC/L fait référence à l’histoire. « En son temps, notre parti (ndlr : le MLC DE Jean-Pierre Bemba) avait exigé un calendrier électoral global. Mais aujourd’hui, au regard des défis qui se présentent devant nous, il est important de s’asseoir autour d’une même table pour parler de ce calendrier » dit-il ; avant de conclure que le MLC/L n’a pas besoin de préalables à la tenue de ce dialogue. « En tant que parti politique, notre devise est que partout où on parlera de la RD Congo, nous répondrons toujours présent », conclut Thomas Luhaka.
Outre Thomas Luhaka, la délégation du MLC/L a été composée de Germain Kambinga, ministre de l’Industrie, Omer Egwake Yangembe, ministre de l’Urbanisme et Habitat, Roger Nsingi, président de l’Assemblée provinciale de Kinshasa et de Mme Marie-Louise Ekpoli, députée nationale honoraire.
« FAIRE DE LA RD CONGO UN PAYS DE PARTAGE ET DE SECURITE POUR TOUS »
C’est légèrement après 18 heures, que la délégation de l’Opposition citoyenne, conduite par son chef de file Justin Bitakwira, sortait du bureau du chef de l’Etat. Il n’ a aucune chance d’échapper à la presse qui l’attend de pied ferme Dans le hall du « Palais royal » rd congolais.
D’emblée, Justin Bitakwira, surnommé « homme-proverbe », commence son propos par une précision de taille. « Je ne suis pas venu rencontrer le Chef de l’Etat pour représenter qui que ce soit. Je ne suis pas non plus venu pour trahir qui que ce soit. », souligne-t-il en liminaire. Justin Bitakwira par du constat selon lequel le pays offre deux visages contrariés. D’une part, des Congolais qui rient et dansent. De l’autre, on retrouve des nationaux qui pleurent chaque jour et qui dorment sans aucune certitude de se réveiller le matin », pour faire allusion à la situation sécuritaire encore précaire, dans certains coins de l’Est de la RD Congo.
Quant à cette situation qu’il considère comme une réalité qui n’échappe à personne, Justin Bitakwira insiste sur les vertus d’un dialogue politique sincère entre tous les Congolais. « En tant qu’acteur politique, je ne peux pas ne pas venir dire au chef de l’Etat que nous avons besoin de secours pour qu’une partie de la République partage la sécurité avec le reste du pays. Je ne dois pas aller le dire à un chef de parti parce qu’il n’a pas la solution nécessaire à cette situation ».
En plus de la situation sécuritaire dans l’Est du pays, Justin Bitakwira a évoqué la récurrente question du porte-parole de l’Opposition politique. Selon lui, le chef de l’Etat lui a déclaré que cette matière déborde ses prérogatives. Aussi, le Raïs a-t-il envoyé la balle au camp des deux Chambres du Parlement. Le troisième point, finalement, Justin Bitakwira a plaidé pour le retour à une élection présidentielle à deux tours. Quant à la tenue du dialogue, l’élu d’Uvira soutient cette initiative qu’il compare à une aiguille, symbole de raccommodage, d’unité du pays. Honnis soient donc, ceux qui jugent cette rencontre inopportune. « La grenouille qui s’isole des autres meurt stérile », conclut Justin Bitakwira. Laurel KANKOLE