Interview exclusive: Les vérités de J.L Bussa à Kabila, à Katumbi, à Kodjo et surtout au peuple congolais.

Samedi 16 avril 2016 - 16:24
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Député national le mieux élu dans l’ex Province de l’Equateur, Jean-Lucien Bussa, président du CDER, appelle le peuple à se mobiliser pour défendre sa constitution au moyen de la constitution. Récemment encore modérateur de la Dynamique de l’Opposition, Bussa donne rendez-vous aux Kinois le 24 avril 2016 sur le boulevard Triomphal. Pour lui, « le combat de l’alternance pacifique est semblable à la lutte de l’indépendance ». L’ancien président du groupe parlementaire du MLC dit non au Dialogue car dit-il il a pour finalité de résourdre les problèmes de Kabila et non ceux du peuple congolais. Pour maximiser les chances de l'alternance, Bussa pense que l’unité de l’opposition est indispensable. Jusqu'ici dit-il l'Opposition a su parler d'une même voix sur les questions transversales les plus importantes pour la nation. La question de la candituture  commune est subsidiaire, elle viendra en son temps d'après lui. Dans cette interview avec 7SUR7.CD le plus grand site d'infos en RDC, il donne les raisons de la récusation du facilitateur. Rien de personnel affirme-t- il. Une question de principe assure l'élu de Budjala. Il salue la résolution 2277. Il pense qu'il est possible d'organiser les élections présidentielles cette année. Tout est, soutient-il ,une question de volonté politique. C'est elle qui viendra à bout des contraintes techniques mises en avant par la Ceni. Brillant économiste, Bussa évoque la situation économique et sociale de ses compatriotes notamment les refoulés de Brazzaville qu'il a visités récemment. La situation de la BIAC, la dépréciation du franc congolais et la pénurie d'eau et d'électricité ainsi que les érosions qui menacent plusieurs quartiers de Kinshasa ont fait dire à Bussa qu'il y a un déficit de gouvernance. Ci-dessous l'interview.

Q1/ La RDC est en pleine crise politique, à quoi est dû cela et à qui incombe la faute ?

La crise politique actuelle a été créée de toutes pièces par la Majorité présidentielle. Pour moi, c’est une crise qui n’en est pas une car elle est artificielle. On a une crise que l'on pouvait éviter. Crise née de la volonté pour le régime de ne pas vouloir respecter la Constitution. Et de ce fait de vouloir conserver le pouvoir  de manière extraconstitutionnelle. Or la Constitution a résolu le problème de légitimité de pouvoir en prévoyant des élections à des échéances régulières. Le cycle électoral est en panne à cause du régime. La crise est due à la volonté d’un petit groupe de vouloir conserver le pouvoir en violation de la Constitution.  La crise actuelle profitant au président Kabila, c’est à lui qu’incombe la responsabilité.

Q2. Les élections sont-elles faisables cette année ?

C’est une question de volonté politique. Dans ce pays on a déjà enrôlé pendant 3 à 4 mois. On peut pas remplacer la volonté politique par les contraintes techniques. Si il y a volonté politique, les contraintes techniques seront vite élaguées. Si on fait de la présidentielle et des législatives la priorité des priorités, il sera possible d’organiser les élections dans le délai constitutionnel. Car les coûts vont baisser notamment. Sans oublier que le calendrier sera clair, aéré et réaliste.

Q3. Si les élections ne sont pas organisées cette année, quid de la légitimité et de la légalité du président Kabila au-delà du 19 décembre 2016 ?

La Ceni a encore la possibilité de convoquer le scrutin présidentiel le 20 septembre 2016. Qu'elle respecte son propre calendrier. Si elle ne le fait pas, nous allons deduire qu’un groupe d’individus veut conserver le pouvoir en violation de la Constitution.  Conformément à l’article 64, nous leur ferons échec.

Q4. Pour éviter d’en arriver là, la communauté internationale vous invite au dialogue à travers la résolution 2277 du Conseil des Nations-Unies ?

Nous saluons cette Résolution qui a circonscrit le dialogue à l’élection présidentielle. C’est ça la priorité selon le conseil des nations-Unies. Nous partageaons cette vision.  Car la Constitution n’a pas prévu le glissement. S'il n'y a pas élections dans le délai le gouvernement doit saisir la Cour constitutionnelle pour constater la vacance du pouvoir au sommet de l'État. Et c’est le président du  sénat qui va exercer les fonctions présidenteilles pendant 120 jours le temps d’organiser les élections.

Q5 : Pourquoi n’allez- vous pas au Comité preparatoire ?

On connait les joueurs, le jeu, et les résulstats auquels ils veulent aboutir ? Les Concertations nationales sont éloquentes à ce sujet. Le MLC en a fait l' amère expérience. Le régime n'est pas de bonne foi.

Q6 . Pourquoi avoir récusé le facilitateur Edem Kodjo?

La récusation de Edem Kodjo n’a rien de personnel. C’est une question de principe. Sa nomination le 6 avril par l’Union Africaine, ne fait pas référence à la Constitution ni à la résolution 2277 qui circonscrit le cadre de ce dialogue.  Sa nomination est dès lors suspecte. Nkosazana Zuma n’a même pas fait allusion aux instruments juridiques de l’UA sur le respect des droits humains et sur l' alternance. Sa nomination intervient pourtant le 6 avril, la présidente de la Commission de l'Union Africaine avait le temps de référer sa nomination à la Résolution 2277 intervenue le 30 mars. Elle ne l'a pas fait. Il y a anguille sous roche forcément.

Q7.  Quel est le message que vous allez dire à la population lors du meeting du 24 avril ?

Le message que nous allons délivrer à la population est simple : elle doit être prête pour défendre sa constitution en se servant de la même constitution.  Nous dirons à notre peuple de dire non à toute possibilité pour le président Kabila d’exercer les prérogatives présidentielles au-delà du 19 décembre 2016. L’autre message à délivrer au peuple c’est de leur dire que le dialogue de monsieur Kabila n’a pas pour finalité de résoudre les problèmes  des congolais mais plutôt son propre problème. Le 4ème message c’est de leur annoncer que le combat de l’alternance démocratique est semblable à la lutte héroïque pour l’indépendance. Il faut léguer à la postérité une alternance pacifique car l’absence de légitimité est la source principale de guerres en RDC depuis l'indépendance. C’est l'essentiel de notre adresse à ce grand meeting qui aura lieu sur le boulevard triomphal le 24 avril. Date qui n’a pas été choisie au hasard car c’est la date de la formalisation du pluralisme politique. Il faut donc consolider les acquis démocratiques car menacés aujourd’hui par un groupe d'individus.

Q8.’L'Opposition à Kabila c’est votre principal moteur à la Dynamique de l'Opposition, mais cela ne consitue pas un programme de gouvernement ?

Nous avons  des programmes, nous avons des visions. Pour le CDR par exemple notre vision a été déclinée dans un livre intitulé « un peuple grand pour une grande nation ». L'opposition est unie contre une violation programmée de la Constitution mais ne manque pas de propositions alternatives pour le pays. Loin s'en faut. La Dynamique rassemble plus de 40 partis politiques, 6 plateformes et plusieurs personnalités. Qui pouvait croire qu’on travaillerait ensemble pendant longtemps. Depuis janvier 2015 jusqu’à aujourd'hui nous nous sommes montrés cohérents et unis sur les sujets transversaux. Non à la modification de la Constitution, non à un 3è mandat de Kabila, oui à l’organisation des éléctions dans le delai constitutionnel. Nous avons tenu bon. L’unité de l’opposition est une réalité. Lorsque le G7 a réjont l’opposition nous avons dégagé une position commune pour récuser Kodjo

Q9. Quid de la candidature commune ?

A ce stade, il faut avoir des certitudes que monsieur Kabila ne va pas jouer avec la Constitution. Il faut des certitudes sur la tenue des élections présidentielles cette année. C’est pas encore gagné, dans ce cas vous êtes candidat à quoi ? Il faut obtenir la garantie de l'organisation de la présidentielle d’abord pour se déclarer candidat ensuite. Stape by stape comme disent les anglais. Mais je comprends le point de vue des autres amis qui se sont lancés dans l’investiture. C’est leur droit le plus légitime. Mais je trouve que l'opportunité n'y est pas à ce stade.

Q10 . Votre nom a été cité dans une plateforme en gestation de soutien à Katumbi. Qu’en est-il ?

Je ne suis pas concerné par cette aventure. J’appartiens dejà à deux structures. Et comme je l’ai dit pour moi l’opportunité d’une telle démarche n’est pas démontrée aujourd’hui car il faut d’abord s’assurer que les élections présidentielles aient lieu à date constitutionnelle. Le reste viendra après. Une étape après l’autre. Une fois la date de la présidentielle connue, les ambitions vont s’exprimer. Et là l’opposition va se poser la question de savoir comment faire pour gagner.

Q11. Les conditions sociales des congolais s’empirent. Votre réaction.

Je constate l’immobilisme du gouvernement. L’Etat est inexistant. Là où on l’attend, il n’y est pas. Là où on ne l’attend pas il y va. Cas du Dialogue et des initiatives anti-constitutionnelles. J’ai visité les déplacés de Brazzaville qui sont abandonnés à leur triste sort. Ils passent la nuit à la belle étoile. C'est inadmissible que les congolais manquent de dignité dans leur propre pays. Il ne sont que 230. Ils vivent de mendicité et l'État n'a aucune compassion. Pourtant une somme de 5.000 $ pour qu’ils se logent décemment est à la portée du gouvernement. L’argent qui a servi à acheter des consciences lors des élections des gouverneurs peut les soulager durablement car ils ne demandent pas  beaucoup. Les érosions menacent des quartiers entiers à Kinshasa sans que le gouvernement ne réagissent. C’est  scandaleux! Des rues entières sont parties. Au Camp Luka , à Sangamaba, au quartier Maman Mobutu, le même paysage apocalyptique dans l’indifférence totale du pouvoir. C’est malheureux! Pas d’eau, pas d’électricité, pas de routes praticables, Kinshasa étouffe au point de suffoquer. L’eau est devenue une denrée rare. Il y a des quartiers qui n’ont pas d’eau depuis plus de 17 ans. Cas des quartiers huppés comme Binza Meteo, Pigeon, UPN, etc. Imaginez la situation dans le reste du pays. La misère a atteint son comble. Il y a un déficit criant de gouvernance.  Résultat social catastrophique. C’est pire à l’intérieur. Est-ce que Kabila est président de la République ou est-il président de la République de la Gombe ?

Q.12. Le franc congolais chahuté par le dollar, il s’échange à  980 Franc pour 1$. Votre lecture ?

Cela montre les limites de la théorie de la stabilité macro-économique.  La dépréciation du Franc congolais est consécutive à 3 facteurs. Une économie non suffisamment diversifiée. L’économie de la RDC est trop dépendante du cuivre et du pétrole. La chute des cours de ses matières premières entraine automatiquement la raréfaction des devises.  Nous sommes vulnérables aux moindres chocs exogènes.  Deuxième facteur, nous sommes une économie extravertie. Les congolais consomment ce qu’ils ne produisent pas et produisent ce qu’ils ne consomment pas. Il suffit de voir ce que nous mangeons, comment nous nous habillons pour s'en convaincre. Troisième facteur, la mauvaise politique budgétaire. Elle est aussi la cause de cette dépréciation. Le gouvernement a dépensé plus de 1 milliard $ hors budget. Les dépenses politiques sont plus importantes que les dépenses de production ou d’investissement. Enfin dans une Loin de mesure la politique monétaire conduite par la Banque centrale du Congo. La crise de la BIAC n’a fait qu’amplifier le mouvement. J’ai interpellé le Gouverneur de la Banque Centrale du Congo. Pourquoi a-t-elle rompu brutalement la ligne de refinancement ? Quid du prêt non remboursé de la BIAC au gouvernement ? La BCC a failli dans sa mission de supervision. Pourquoi n’a-t-elle pas prévenu cette crise à la BIAC? Faisant courir un grand danger au système financier national encore fragile. Question de principe j'ai interpellé le gouverneur.

Q13. Un mot pour l’avenir politique de Kabila hors pouvoir ?

C’est un sénateur à vie. La constitution a déjà tout réglé. Pas besoin d’une loi supplémentaire. Si le président quel qu’il soit veut échapper à la Justice, il n’a qu’à bien gérer la chose publique. Encore une fois une question de principe.

 

Propos recueillis par Israël Mutala

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