Les fonds collectés par la Régie des voies aériennes (RVA) dans le cadre de la taxe aéroportuaire d’embarquement (IDEF), autrement appelé « Go pass », échappent totalement au contrôle du gouvernement ! Seule la RVA détient, en exclusivité, la gestion pour des raisons qui restent totalement inconnues. Une situation tout autant inexplicable qu’ambigüe. L‘opacité qui couvre la gestion du « go pass » de même que les abus qui l’émaillent appellent à la suppression pure et simple de cette taxe.
Que le Premier ministre, Matata Ponyo Mapon, ait évoqué le sujet lors de sa récente déclaration à la presse, il y a de quoi se poser des questions sur les millions USD que brasse la RVA en termes de « Go pass », soit 50 USD pour les vols internationaux et 10 USD pour les lignes internes.
Selon les estimations proches de la réalité, la RVA aurait déjà collecté une centaine de mil lions U SD depuis l’institution de cette taxe en 2009. Mais’ dont l’utilisation et la destination restent un vrai mythe.
Répondant en 2014 à une interpellation de l’Asadho, l’actuel administrateur délégué général de la RVA, expliquait qu’avec une moyenne de 400 000 passagers qui voyagent chaque année à partir des aéroports de la RDC, cette taxe a pu générer à l’époque environ 80 millions USD. Selon des sources fiables, le «Go pass » rapporterait à la RVA au moins deux (2) millions USD par mois.
Par simple arithmétique, à compter de 2009, année de sa création, on est bien au-delà de 100 millions USD des recettes engrangées par la RVA.
Qu’a-t-on fait de cette manne financière ? Rien qui vaille ; à part quelques actions de saupoudrage entreprises dans différentes installations aéroportuaires de la RDC. Le grand investissement en vue, financé sur les fonds IDEF, a été le pavillon présidentiel, réalisé pour un montant pharaonique de 32 millions USD.
La construction de la nouvelle aérogare modulaire de N’Djili et la nouvelle tour dé contrôle auraient aussi été financés en partie par les fonds de l’IDEF. Pour le reste, on n’en sait pas grand chose. Si bien que, même Matata Ponyo, chef du gouvernement, n’a aucune idée précise sur ce que la RVA a déjà collecté depuis que cette taxe été imposée aux passagers.
DES MILLIONS USD EN FUMÉE
La question qui brûle toutes les lèvres est la suivante: à qui la RVA rend-il compte-des fonds générés par la taxe aéroportuaire IDEF ? Si le gouvernement n’en sait rien, il doit y avoir certainement une autorité ou une institution à qui la RVA rend compte? De qui s’agit-il ? Ré- pondre à cette question, c’est déjà comprendre- en partie - la nébuleuse qui entoure les fonds IDEF.
Néanmoins, il y aune certitude sur un point. L’affirmation est d’autant plus crédible qu’elle émane du chef du gouvernement lui-même, en l’occurrence Matata Ponyo Mapon. En effet, pour le Premier ministre qui s’exprimait dernièrement devant la presse, la taxe IDEF, autrement appelé Go pass, est « une parafiscalité destinée à la RVA et gérée exclusivement par elle ». Que retenir de cette déclaration? Dans le fond, cela voudrait dire que la RVA est un entreprise à part dans le portefeuille de l’Etat. Aussi peut-elle se permettre, sans s’en référer nécessairement au gouvernement à qui elle est censée rendre compte, de créer une taxe et la gérer comme bon lui semble.
Ce serait révoltant sous d’autres cieux. Mais, en République démocratique du Congo, c’est dans l’arbitraire la plus absolue que la RVA gère les millions USD récoltés au titre de «Go pass ». Quant on sait que ce taxe est supportée directement par les passagers en vol national ou international qui empruntent les aéroports de la RDC, on n’est pas loin d’une escroquerie à grande échelle, quasi-institutionnalisée.
Le débat actuel, loin de s’attarder sur l’utilisation faite des recettes collectées jusqu’à ce jour, tourne plutôt autour de la gestion réelle de ces fonds ! Les confier « exclusivement » comme c’est le cas, à en croire le Premier ministre, à la seule Régie des voies aériennes, c’est ouvrir grandement la voie à la prédation. C’est donc sans surprise qu’un nuage épais entoure toujours la gestion de ces fonds. Ainsi, à l’époque de Jean Assice, alors administrateur délégué général de la RVA - celui-là même qui avait institué cette taxe - les fonds générés par le « Go pass » étaient logés dans un compte ouvert dans une banque en Afrique du Sud. Le mal serait-il parti de là? Seul l’avenir le dira.
Devant le Parlement, Jean Assice avait prétendu à l’époque qu’en logeant ces fonds en Afrique du Sud, il permettait à la RVA d’accroitre sa crédibilité pour accéder à certaines ressources extérieures en vue de financer son vaste plan d’investissement. Plan évalué à l’époque à plus d’un milliard USD. Depuis, plus rien n’a été dit sur l’IDEF.
Jean Assice parti, le système semble avoir été maintenu, sinon raffiné. Si bien qu’aujourd’hui, il est difficile de dire exactement ce que la RVA a déjà collecté comme fonds de l’IDEF. Le gouvernement en est tout aussi incapable. Matata l’a clairement démontré. Sans doute, le ministre des Transports, tutelle de la RVA, se trouve dans la même situation d’incapacité. Sans compter le ministère du Portefeuille.
Voilà, la RVA est, tel un arbitre sur un terrain de football, seul maître à bord. Ce constat, à savoir, disposer de pleins pouvoirs sur l’IDEF ne pourrait relever que de l’aberration.
Si le gouvernement n’a aucune idée des fonds déjà mobilisés en termes de l’IDEF, alors qu’il en a tous les droits, à qui la RVA rend-elle donc compte?
Au moment où le chef de l’Etat tente de remettre de l’ordre pour la préservation des fonds publics -l’action de son conseiller spécial en bonne gouvernance et lutte contre la corruption en fait foi - il y a lieu de remuer les tiroirs, pour découvrir ce qui se cache derrière la nébuleuse qui s’est développé autour des fonds collectés au titre de la taxe aéroportuaire à l’embarquement, IDEF ou «Go pass ».
C’est faire justice aux usagers des aéroports, obligés de payer à chaque vol national 10 USD et 50 pour le vol international, sans compter la taxe statistique de 5 USD imposée par l’Hôtel de ville de Kinshasa pour le seul aéroport international de N’Djili.
LE POTENTIEL