Elections Et Respect Des Délais Constitutionnels - Edem Kodjo Confirme Les Craintes De L’opposition

Lundi 25 janvier 2016 - 11:05
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Face aux difficultés d’organisation des scrutins dans les délais constitutionnels, une seule issue : le dialogue, semble dire le facilitateur Kodjo. Après trois jours de consultations à Kinshasa, le facilitateur désigné par l’Union africaine est acquis à une cause. Il a choisi son camp et tente maintenant d’imposer son schéma. L’organisation des élections paraissant plus qu’hypothétique, Edem Kodjo est d’avis que la voie du salut passe par le dialogue, convaincu que « tout le temps perdu ne peut pas faciliter l’application des délais constitutionnels ».

Edem Kodjo, facilitateur désigné par la présidence de la Commission de l’Union africaine pour la tenue d’un dialogue politique national en RDC, s’est déjà fait une idée précise de ce qu’il faut pour sortir le pays de la crise électorale qui se précise davantage. Trois jours de consultations à Kinshasa lui ont suffi pour décrire le schéma à mettre en œuvre.

Seulement, dans ses premières déclarations, une évidence se dégage. Il ne sera pas possible, croit-il, d’organiser les élections dans les délais prévus par la Constitution. Aussi repose-t-il l’impérieuse nécessité d’une large adhésion autour du dialogue. Dans une interview accordée à RFI, Edem Kodjo dévoile en des termes à peine voilés ses préférences.

Depuis sa nomination le 14 janvier 2016, les opposants au dialogue ne l’ont jamais porté dans leur cœur. Certains, notamment les plus durs, ont dénoncé son fort penchant envers le pouvoir. Aujourd’hui, Edem Kodjo envoie des signaux qui consolident les craintes de l’Opposition. Le diplomate togolais roulerait-il déjà pour le pouvoir ? Dans la ville haute, ça se murmure !

Son premier voyage à Kinshasa dans son costume de facilitateur au dialogue l’a raffermi. Il sait ce qui l’attend. Il sait également que sa tâche ne sera pas facile. Car, il s’agit de faire avaler la couleuvre, autant à la classe politique congolaise qu’au peuple congolais dans son ensemble. Pour le diplomate togolais, une chose est sûre : à ce jour, les élections relèvent de l’utopie – tout étant à refaire. Son entretien avec le président de la Commission électorale nationale indépendante (Céni) l’a édifié à ce sujet.

L’ex-Premier ministre est resté sur la ligne tracée par Mme Nkosazana Dlamini-Zuma, celle de favoriser le dialogue dans les contours déterminés par le chef de l’Etat. La tenue des scrutins étant renvoyée aux calendes grecques, il indique une seule voie à suivre aux protagonistes de la crise congolaise : le dialogue.

Les fissures dans les rangs des anti-dialogue lui ont offert l’opportunité d’évoquer une large inclusivité après sa rencontre avec le Mouvement de libération du Congo de Jean-Pierre Bemba qui est, apparemment, sorti de la ligne dure adoptée par une bonne frange de l’Opposition. Pour Edem Kodjo, sa rencontre avec le MLC l’a ragaillardi dans sa vision d’amener plus de monde possible au dialogue.

Kodjo a choisi son camp

Le décryptage objectif de la déclaration d’Edem Kodjo à RFI est révélateur. Il traduit les vraies intentions de l’émissaire de l’UA. Selon lui, les autres – en tout cas les plus sceptiques – ont intérêt à rejoindre le train du dialogue. C’est par décence qu’Edem Kodjo ne tance pas les « anti-dialogue » en disant que le chien aboie et la caravane du dialogue va passer - à grande vitesse d’ailleurs.

Les réglages qui restent à opérer n’émeuvent pas le facilitateur désigné par l’UA qui voit déjà en rose la mission à lui confiée par l’Union africaine.

Dans l’Opposition, l’on tente tant bien que mal de comprendre la démarche du diplomate togolais. « Plutôt que de faciliter la tenue d’un dialogue réellement inclusif, Edem Kodjo tient à un dialogue tel que voulu par le président Kabila et ceux qui ont déjà adhéré au schéma », estime un acteur de la Dynamique de l’Opposition.

Pour l’ancien secrétaire de la défunte Organisation de l’unité africaine (OUA) – ancêtre de l’UA - le dialogue politique se tiendra avec ceux qui ont accepté. Ceux qui vont se mettre en marge ne devaient, pense-t-il, que s’en prendre à eux-mêmes. Edem Kodjo cherche donc à imposer son schéma. C’est à prendre ou à laisser. Une attitude qui pourrait entamer la crédibilité de sa mission.

A première vue, l’on craint que le dialogue politique, prôné par le chef de l’Etat, ne soit qu’une copie revisitée des concertations nationales de 2013. Nombre d’observateurs redoutent la réédition des concertations nationales qui ne produiront qu’un nouveau partage des postes de responsabilité, sans tirer le pays de la zone des turbulences.

Abordant le volet de l’impératif du respect des délais constitutionnels, Edem Kodjo ne tient pas à l’élever au rang de préalable. Grave erreur !

Pourtant, pour les « anti-dialogue », le dépassement des délais prévus par la Constitution est « un coup d’Etat ». Une pratique bannie par l’Union africaine et l’Organisation des Nations unies (ONU).

Alors facilitateur de l’UA au Burundi, Edem Kodjo s’était fermement opposé à la manie de torpiller la Constitution à des fins de conservation du pouvoir. Il s’était donc prononcé sur les coups d’Etat du 16 mai 2015 qui a tenté de renverser Pierre Nkurunziza. « Toute la communauté internationale, sans exception, a condamné le coup d’Etat. La doctrine de l’Union africaine, c’est tolérance zéro pour les coups d’Etat et les coups de force. Et c’est cela qui a été adopté par presque toutes les personnalités importantes du monde qui ont pris la parole, à commencer par le président Obama, le secrétaire général des Nations unies, d’autres chefs d’Etat de la sous-région et la présidente de la Commission de l’Union africaine elle-même, ça, c’est clair. »

Tous espèrent qu’Edem Kodjo ne se dédira pas. Malheureusement, ses prises de position réconfortent les inquiétudes de l’Opposition qui a  toujours redouté sa sincérité.

Bref, pour Edem Kodjo, les élections étant renvoyées sine die, en raison de plusieurs contingences, il ne reste plus que le dialogue pour sortir de l’ornière. Un cadre du G7 a déclaré au Potentiel : « En suivant Edem Kodjo, on croirait écouter un membre de la Majorité présidentielle !  ».

L’émissaire de l’UA ferait mieux de changer de cap.

Le Potentiel

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