Des propositions de location de voiturettes pour des heures pendant des jours, aucun chauffeur de taxi de Kinshasa ne refuserait ce type de convention de transport, pour engranger plus des recettes journalières, réaliser une plus-value, effectuer les versements exigés par son employeur, et au-delà de tout cela, satisfaire ses besoins. Et la période de courses express ou de location passe alors pour « la période de vaches grasses ».
Et c’est au cours de cette saison de locations en cascade que les conducteurs se disent souvent victimes de vols de leurs engins. Le modus operandi le plus utilisé, est l’usage des somnifères. Un soir de février dernier, un taximan roulant à bord d’une Toyota IST de couleur gris métallisé, sillonnait les artères de Barumbu, à la recherche des clients. Hélé par un homme frisant la cinquantaine, debout devant une terrasse, Mavungu Mbuku, le conducteur, est allé à sa rencontre. Bref entretien. Le cinquantenaire cherchait un véhicule pour assurer le transport de ses cousins et cousines. Après accord des heures et du montant, Mavungu s’est installé dans la terrasse et s’est fait servir une boisson gazeuse. Une gorgée, deux, trois. Crochet aux installations sanitaires. A son retour, rien n’avait changé. Une quatrième gorgée. Et sans rien comprendre de ce qui lui arrivait, il a sombré dans un profond sommeil.
Au réveil, Mavungu se trouvait sur le lit d’une polyclinique. Non seulement il ne comprenait pas pourquoi des infirmiers s’affairaient autour de lui, et il se demandait comment il a interrompu son métier, sans effectuer le versement journalier de recettes.
Pendant la reconstitution du film de sa journée de travail, son patron entrait dans la salle d’observation et lui criblait des questions sur le sort de sa voiturette. A cet instant, il s’est alors rappelé que quelqu’un lui avait proposé la location de son engin pendant des heures au bout desquelles 50 dollars devaient être payés. Le récit de sa mésaventure, identique à celui des autres chauffeurs de taxi, tournait autour des cas de vols. Mavungu a fini par comprendre qu’il avait été drogué à l’aide des somnifères.
De nombreux chauffeurs drogués à partir des boissons leur offertes
Lemba Terminus, on vient de proposer au taximan Ndongala Sim’s, une série des courses à Binza devant se clôturer par déposer le client et quelques membres de sa famille à l’aéroport international de Ndjili. Coût de ces courses : 100 dollars, le carburant étant à la charge du conducteur.
Ndongala Sim’s ne rêvait pas mieux. Car, cela lui rapporterait en une soirée deux jours de recettes. Il mord vite à l’hameçon et accepte d’effectuer ces courses tel qu’elles seront dictées par le client. Il est 19 H. Afin de ne pas susciter d’inquiétude auprès de son patron, Ndongala Sim’s va le prévenir d’une rentrée tardive. Car, a-t-il dit, il devait honorer un contrat de transport.
Première course sollicitée ? Un grand restaurant à Kintambo magasins. La Toyota IST de couleur bleu métallisé quitte Lemba avec à bord, le chauffeur et le client identifié sous le surnom de Mvuandu Balar, ainsi que ses deux amis.
Lors du trajet, ils ne parlaient des affaires de gros sous et des voyages à effectuer à Johannesbourg, Dubai, Hong Kong et Changai. Attiré par cette conversation, Ndongala Sim’s va leur proposer d’être leur conducteur attitré chaque fois qu’ils sont à Kinshasa. Et pour ce faire, son numéro d’appel a été communiqué aux trois clients qui lui promettront la location pour pas moins d’un mois.
Centre commercial Kintambo magasins. Ndongala Sim’s et ses fameux clients s’installent dans une terrasse. Une tournée, deux, trois et quatre.
Et puis plus rien. Ndongala Sim’s va se retrouver comme par enchantement, affalé sur une chaise en plastique. Il était minuit. Réveillé par les garçons de bar, il est seul et demande où sont partis ses clients. On lui apprendra qu’ils ont effectué une course et avaient demandé qu’on ne dérange pas le chauffeur.
Un coup d’œil au parking. Pas de trace de sa voiture Toyota IST de couleur bleu métallisé. Dès cet instant, il a réalisé que la voiturette a été emportée par des malfrats.
A n’en point douter, ce modus operandi qui n’est pas le premier du genre, est celui utilisé par des malfaiteurs pour voler actuellement les voiturettes japonaises très prisées à Kinshasa. L’usage de somnifères.
Dans les milieux de la police, si les membres de la pègre sont recherchés, on ne peut qu’attirer l’attention des taximen sur les courses express leur proposées. Tous les clients n’étant pas malhonnêtes, les voleurs déguisés en paisibles citoyens en profitent pour emporter les voitures, après avoir neutralisé les conducteurs par la méthode douce « les somnifères ». J.R.T.