Burundi:Nkurunzinza de retour, les Burundais toujours opposés à son troisième mandat

Lundi 18 mai 2015 - 13:11

La communauté internationale qui a condamné le coup d’Etat, soutient la population et tient au respect strict des accords d’Arusha

Les évènements sont allés très vite au Burundi à partir de mercredi 13 mai 2015 au point de prendre une tournure que personne n’attendait. La veille, Pierre Nkurunzinza, président du Burundi, s’était envolé pour Dar-Es-Salam, en Tanzanie, où était attendu le sommet des chefs d’Etat de l’Afrique de l’Est pour débattre de la question burundaise.

Etant donné que le pays était plongé dans la spirale des violences occasionnées sans cesse par des affrontements entre les forces de l’ordre, singulièrement la police, et les manifestants, le général Godefroid Niyombare a jugé mieux de prendre le raccourci en faisant un coup d’Etat.

Surtout que la majorité des Burundais sont contre un troisième mandat du président en exercice, alors que ce dernier fonce dans cette logique, contrairement à l’esprit de la Constitution.

Le général Godefroid a annoncé, le même jour, la destitution du président Nkurunzinza (Hutu comme lui-même), accompagnée d’une principale mesure portant sur la fermeture des frontières burundaises. Mise à part celle-ci, aucune autre mesure n’a été annoncée.

Toutes les autorités tant civiles que militaires étaient libres de tout mouvement. Aucun symbole de la nation n’a été touché. Lorsque les » putschistes » ont tenté de prendre la radiotélévision nationale burundaise (Rtnb), les forces loyalistes en place ont opposé une résistance farouche. Des pourparlers engagés en vue d’une solution concertée n’ont pas abouti.

Quand bien même que les rues de Bujumbura étaient envahies par une foule en pleine euphorie saluant le départ de l’homme qui tenait, coûte que coûte, à briguer un troisième mandat, le général Niyombare a eu du mal à rassembler des alliés militaires. Surtout que la réussite de ce coup de force devrait passer par l’implication des forces armées.

La confusion entretenue par des communiqués contradictoires émanant du camp des loyalistes et de celui des putschistes avait engendré un suspens total.

En fin des comptes, ce sont des putschistes qui ont battu en retraite, malgré le soutien populaire. Deux principaux responsables de ce coup de force sont aux arrêts, tandis que l’auteur a pris le large. Nkurunzinza est retourné à Bujumbura torse bombé, sauvé de justesse par l’armée loyaliste.

L’épée de Damoclès

Pierre Nkurunzinza vient, sans nul doute, de remporter la bataille. Il lui reste à présent de gagner la guerre. Une guerre qui lui livre son peuple catégoriquement opposé à toute révision de la Constitution en vue d’un troisième mandat.

L’argument selon lequel le premier mandat de Nkurunzinza est issu des accords d’Arusha, et de ce fait, ne peut être pris en compte, est rejeté par le peuple burundais. Ce dernier ne regarde pas la couleur des mandats présidentiels. » Quand c’est deux, c’est deux. C’est tout ! » dit-il.

La société civile et l’opposition ne se considèrent pas pour autant désarmées. Aux dernières déclarations, elles entendent poursuivre la lutte pour faire respecter la Constitution. Elles se préparent, de la sorte, à renouer avec la rue, tandis que le peuple burundais se montre lui aussi intransigeant.

Alors qu’elle avait condamné le coup d’Etat du 13 mai, la communauté internationale ne transige pas. Elle tient mordicus au respect triste des accords d’Arusha. Ce qui signifie qu’il n’est pas question d’une quelconque révision de la constitution en vue d’un troisième mandat.

En ce qui les concerne, l’ancienne métropole qui est la Belgique, le Pays-Bas et la Suisse ont supprimé l’aide qu’ils entendaient apporter à ce pays en vue des élections crédibles, démocratiques, libres et transparentes.

Le secrétaire général de l’Onu, Ban Ki-moon, ainsi que la grande puissance mondiale, les Etats-Unis, ont entretenu le flou.

D’une part, ils ont condamné le coup d’Etat, d’autre part, ils demandent au président Nkurunzinza de ne pas briguer un troisième mandat. Or, le coup d’Etat aurait été une partie de solution aux problèmes que connait le Burundi.

Godefroid Niyombare l’a si bien dit. Son intention n’était pas de prendre le pouvoir, mais de répondre positivement à l’appel de la population. Malheureusement, pour lui, il a péché dans la précipitation et la mauvaise organisation de l’opération.

Aussitôt rentré au pays, le président » repêché » s’est empressé de déclarer que la paix est rétablie dans son pays. Pour un président combattu par son peuple, pareilles affirmations paraissent gratuites. Il lui faut encore affûter des armes car, comme la perestroïka en 1990, le principe du respect de la constitution dans les pays subsahariens parait irréversible.

Par GO