Soumis au vote du parlement, le projet de loi modifiant et complétant la Loi n° 6/006 du 9 mars 2006 portant élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales telle que modifiée par la Loi n°11/003 du 25 juin 2011, a, en toute logique été d’abord examiné par la chambre basse qui l’a adopté le samedi 17 janvier 2015, après l’avoir intelligemment amendé. On se souviendra que l’article 8 alinéa 3, tel que présenté par le gouvernement, était entaché d’une erreur de légistique. Il stipulait que « Elle (la liste électorale) doit être actualisée en tenant compte de l’évolution des données démographiques et de l’identification de la population ». Ce qui a été corrigé par les députés nationaux qui ont enlevé du texte le verbe devoir, qui n’est du reste jamais utilisé dans un texte de lois et qui l’ont remplacé par l’indicatif présent du verbe être.
La version de l’article 8 alinéa 3, adoptée par l’Assemblée nationale, se présentait ainsi : « Elle (la liste électorale) est actualisée en tenant compte de l’évolution des données démographiques et de l’identification de la population ». Après une lecture et une relecture attentives de cet alinéa, on ne voit rien de ce qui a été entendu dans les médias internationaux, à savoir que le recensement était érigé en préalable sine qua non pour la tenue de l’élection présidentielle ; ce qui entraînerait un « glissement » du calendrier électoral. C’est pourtant ce qu’une partie de l’opposition va affirmer, de manière éhontée, pour instrumentaliser une partie de la population et l’envoyer, le 19 janvier dernier, dans la rue, avec des conséquences humaines, matérielles et psychologiques dont le peuple congolais n’avait sincèrement pas besoin. Est-il responsable, lorsqu’on se dit leader d’opinion, de construire son argumentaire politique sur des mensonges et des procès d’intentions ? Or, de l’avis des observateurs avertis, l’article 8 alinéa 3, tel que amendé, à ce niveau, obéissait incontestablement aux recommandations des Concertations nationales et du conclave de l’Opposition politique congolaise du 02 au 11 juillet 2013. En effet, il présentait, comme l’a dit le Speaker de la chambre basse, « l’avantage d’améliorer le processus électoral et de tenir compte des imperfections enregistrées à l’issue du scrutin de 2011 ».
La confusion du Sénat
Jeudi 22 janvier 2015, le Sénat, examinant en seconde lecture, le même projet de loi, a, dans une démarche politicienne plutôt que dans la peau du législateur, censé voter des lois à caractère général et impersonnel, curieusement apporté de la confusion. Voici, pour rappel la version juridiquement incompréhensible, que la chambre haute a pondu : « L’actualisation de la liste électorale définitive, en fonction des données démographiques disponibles, se fait dans le respect des délais constitutionnels et légaux prévus pour l’organisation des élections présidentielle, législatives, provinciales, urbaines, municipales et locales » .
On se souvient des explications incroyables de son président, Léon Kengo wa Dondo, formulées en français et en lingala et qui justifiait allégrement cet amendement par le souci de calmer la population. Mon Dieu ! Si Kengo wa Dondo voulait voir sa cote de popularité monter, par calculs électoralistes dont il a l’obstination, il ne s’y prendrait pas autrement. Mais une analyse attentive de la disposition controversée montre qu’on est loin de la sagesse et proche de la tromperie et de la méconnaissance de la force des textes juridiques. Décryptons ! Dans la première partie de l’alinéa 3 précité, (L’actualisation de la liste électorale définitive, en fonction des données démographiques disponibles) le Sénat a simplement paraphrasé la version de l’Assemblée nationale. Car le sens de la phrase est le même ; Quant à la deuxième partie, une loi n’a pas à dire qu’il faut respecter la constitution. D’une part, cela va de soi, car cette dernière lui est supérieure et d’autre part, s’agissant des élections, la Constitution de la RDC n’impose pas que les délais, il y a bien d’autres aspects utiles que le Sénat a feint d’ignorer. Ainsi, cherchant à dire à la population ce qu’elle voulait entendre, le Sénat a affaibli le texte. C’est pourquoi, le président de la chambre basse proposait, nous a-t-il déclaré, lors de son point de presse du samedi dernier, face à la presse étrangère, une nouvelle formulation, dans un souci de globaliser l’envoi à la Constitution, à savoir : « L’actualisation de la liste électorale définitive, en fonction des données démographiques disponibles, sans préjudice des dispositions constitutionnelles pertinentes ». C’eut été, juridiquement, parfait. Mais étant donné qu’il y avait un flou dans le chef de l’opinion, cette proposition avait peu de chances d’estomper les débats outranciers et des malentendus conceptuels. « En tout état de cause, a précisé Aubin Minaku, l’alinéa en question s’avère finalement superfétatoire, dans la mesure où le respect des dispositions constitutionnelles, y compris celles qui fixent les délais des échéances électorales, est impératif pour toutes les institutions et sous-entendu dans l’édiction de toute norme légale ou réglementaire » .C’est pourquoi l’Assemblé nationale a, en commission, judicieusement défendu et convaincu sur le retrait de l’article 8 alinéa 3.Ce qui fut adopté, hier, en plénière.
Les sénateurs inventent des motifs entachés des erreurs manifestes d’appréciation
Autre point fort dans les échanges de la commission mixte paritaire, ce fut autour de la suppression de l’article 237 ter dans le projet de loi amendé par le Sénat. Cette disposition considère que le renouvellement du Sénat est inscrit dans les élections qui doivent se faire en 2015 et ce dans le souci d’apurer les arriérés électoraux. Aussi, l’article en question dispense lesdites élections, provinciales, urbaines, municipales et locales 2015, d’un certain nombre de formalités, notamment la publication, par le ministère de l’Intérieur, un an avant le scrutin, des listes des partis politiques éligibles auxdites élections. Ce qui est logique puisque l’année 2015 est déjà bien entamée. Mais les sénateurs, qui sont hors mandat depuis 2012, en ce qu’ils ont été élus en 2007 pour cinq ans, ne l’ont pas entendu de cette oreille. Eux, qui perçoivent près de 15.000 dollars US chacun par mois, ne veulent pas quitter leur confortable siège cette année. Ils ont donc, pour élaguer ledit article, inventer des motifs entachés des erreurs manifestes d’appréciation et dépourvus de fondements juridiques. Ils auraient, en commission mixte paritaire, souhaité que leur scrutin intervienne après 2016. Pour quelle raison ? Le profit ? Le confort et avantages multiples, liés au mandat de sénateur ? Le respect de la durée des mandats ne s’imposerait-il pas aux sénateurs ? Nos sénateurs pécheraient-ils par le goût du luxe ? L’apurement des arriérés s’inscrit pourtant dans la logique de l’enracinement de la démocratie dans notre pays. C’est la volonté constante du chef de l’Etat, Joseph Kabila. Et c’est ce qu’ont défendu les députés nationaux qui ont fait revenir l’article querellé dans le projet de loi adopté en plénière, hier, de l’Assemblée nationale. Désormais, les regards sont tournés vers la Céni, avec un espoir secret, dans le chef des députés, que Dieu exauce leur prière. La quelle selon vous ?
Des appels à manifester inopportuns
Au regard de tous ces arguments avancés, les appels à manifestation lancés ce jour par une certaine opposition à court d’arguments n’ont plus leur raison d’être, d’autant plus qu’à en croire Aubin Minaku, président de l’Assemblée nationale, les députés nationaux étaient dans l’obligation d’écouter le souverain primaire de qui découle leur légitimité.
Ainsi, après pratiquement une semaine où la ville a tourné au ralenti, le moment est venu pour les Congolais de se mettre au travail, afin de contribuer au développement de leur pays. Sinon, c’est le pays qui est perdant dans la mesure où il faut une mobilisation accrue des recettes pour permettre la réalisation des projets sociaux.
(L’Avenir)