
Face aux élèves du Lycée Sainte Germaine de N’Djili, Freddy Mulumba a repris son bâton de conférencier. Il a expliqué à la jeunesse ce qu’elle doit retenir de la lutte des héros nationaux. A l’aube des mutations internationales, la jeunesse doit apprendre l’histoire grandiose de la résistance de ses leaders pour se forger une conscience historique et résister à tout projet d’assujettissement de la nation congolaise.
« Un peuple qui ne connait pas son histoire est voué à l’échec». C’est par cette citation que le préfet des études du Lycée Sainte Germaine de N’djili, Michel Colin Mombanga, a introduit la conférence-débat animée le samedi 23 janvier 2016 par Freddy Mulumba Kabuayi, vice-président du Groupe de presse Le Potentiel, sous le thème « la jeunesse face à la lutte de Patrice Emery Lumumba et M’zee Laurent Désire Kabila ».
L’assistance présente dans la salle de spectacle de cette école a été composée des élèves de la 6ème année et de leurs professeurs. Optant pour une démarche pédagogique, le conférencier a invité trois élèves à lire trois discours historiques.
Le premier discours a été celui de Patrice Emery Lumumba, prononcé le jour de l’indépendance nationale, le 30 juin 1960, devant le roi des Belges. Le deuxième discours lu est celui qui fait office de testament de M’zee Kabila, son message à la nation, prononcé le 1er janvier 2001, soit 15 jours avant son assassinat, alors que la RDC est occupée par les armées rwandaise, ougandaise et burundaise. Le troisième était la déclaration de la CENCO (conférence épiscopale nationale du Congo) du 6 avril 2012, intitulée « Non à la balkanisation de la RD Congo », portant sur la situation de guerre enclenchée par le M23 dans la partie Est de la RDC après les élections de novembre 2011.
Après la lecture et la distribution de ces trois déclarations à tous les élèves, l’orateur a circonscrit son exposé autour de trois points. D’abord, il a relevé les similitudes des assassinats de Lumumba et M’zee Kabila. Dans un deuxième moment, il s’est attardé sur les motivations de ces assassinats. Enfin, il a tiré les leçons de cette histoire macabre de liquidation des leaders Congolais.
« Si j’ai voulu m’entretenir avec vous autour de ce sujet, c’est pour que vous preniez conscience de ce qui se passe dans notre pays Nous sommes le seul pays en Afrique qui a connu beaucoup d’assassinats politiques des leaders. Très souvent, on tue nos leaders qui portent un projet de telle sorte que tout l’avenir du pays s’effondre », a déclaré Freddy Mulumba, donnant le leitmotiv de cette conférence.
Il estime «qu’il est temps de parler au peuple et à la jeunesse pour qu’ils comprennent les tenants et les aboutissants des assassinats de nos héros et qu’ils tirent les leçons de l’histoire afin qu’elle ne se répète plus ».
Des coïncidences suspectes
Pour le vice-président du Groupe de presse Le Potentiel, les deux héros ont été assassinés parce qu’ils défendaient les intérêts supérieurs du Congo.
« Lumumba avait pré venu le peuple de la menace de la balkanisation du Congo. M’zee, quinze jours avant son assassinat, a adresse un message au peuple congolais le prévenant du complot contre la RDC. Il a demandé aux Con9o- lais de faire front commun pour résister à cette menace », a-t-il rappelé.
A propos des coïncidences suspectes entre ces deux assassinats politiques, Freddy Mulumba a noté qu’ils se sont passés au mois de janvier, période dite de transition aux USA, entre le départ de l’ancien président et l’entrée en fonction du nouveau.
« Lumumba a été tué le 17 janvier 1961, trois jours avant l’entrée en fonction du démocrate John Kennedy. Certains milieux américains avaient peur qu’avec Kennedy à la Maison, blanche:, Lumumba soit salivé. Pour M’zee, ce fut le même contexte. Bill Clinton devait céder le pouvoir à George Bush le 20 janvier 2001. Ici aussi, quatre jours avant, M’zee a été liquidé avec la complicité des Congolais », a expliqué le conférencier.
La deuxième coïncidence suspecte est que ces deux assassinats ont été perpétrés sous la présence des casques bleus de l’ONU. «Je relève ces faits pour que vous compreniez gue les casques bleus ont toujours joue un rôle macabre dans l’assassinat de nos héros. Il faut être vigilant pour que ça ne puisse plus se répéter », a prévenu Freddy Mulumba.
De même, il y a coïncidence dans les stratégies utilisées. A l’en croire, Lumumba comme M’zee ont d’abord été diabolisés par les Occidentaux. Ensuite, ils ont été isolés pour être enfin tués. « Lumumba a été accusé de communiste alors que c’était un patriote. Quant à M’zee, il a été taxé de dictateur puis isolé et assassiné», a soutenu l’orateur.
La dernière similarité est que tous les deux; leaders ont été tués dans une confusion totale. « Pour Lumumba, c’est plus de 50 ans après que nous savons qu’il a été assassiné avec l’aide des services secrets belges en complicité avec la CIA. Pourtant, avant, on a fait porter le chapeau à Moïse Tshombe et Mulongo.
Pour M’zee, l’histoire fera son travail. «On connaitra la vérité peut-être dans 30 ans », a-t-il dit. Et d’ajouter «d’une manière générale, s’il y a assassinat au Congo, ça vient des impérialistes. Ils pensent que personne ne doit gérer ce pays pour les intérêts des Congolais mais plutôt pour les leurs. C’est ainsi que nos leaders sont assassinés ».
L’HISTOIRE NE DOIT PLUS SE REPETER
Le conférencier a dénoncé l campagne d’humiliation qui suit généralement ces assassinats, destinée à vilipender le leader afin que le peuple ne puisse pas le prendre pour modèle. « C’est pour que vous la jeunesse ne puissiez pas avoir des repères qu’on ridiculise nos leaders. Parce qu’ils sa vent que quand vous n‘avez pas des repères, vous ne pouvez pas avoir une conscience historique. Nos ennemis veulent justement détruire vos repères », a dit Freddy Mulumba.
Ainsi, son avis est tout tranché sur le regard que le peuple devrait avoir sur ses héros. « Que ça soit Lumumba ou M’zee, pour le bien qu’ils ont fait pour ce pays, nous devons oublier tout ce qu’ils avaient comme défaut et ne retenir que leur lutte pour la liberté et l’indépendance de la RDC», a-t-il souligné.
Bien plus, l’orateur pense que « M’zee et Lumumba n’ont plus de défauts parce qu’ils ont versé de leur sang pour ce pays ». Et de marteler : «Ce sont des saints. Ils doivent être pour vous une référence ».
LA JEUNESSE CRAINT UN NOUVEL ASSASSINAT POLITIQUE
« On vient de vous distribuer le discours de Lumumba et le testament de M’zee Kabila. Chaque matin, lisez ces discours. Vous aurez une conscience des hommes et des femmes debout. N’importe qui ne viendra pas se jouer du Congo parce qu’il va trouver que vous avez une conscience historique », a-t-il recommandé.
Plusieurs questions ont été posées par les élèves. Que faire pour éviter l’assujettissement des Congolais par les étrangers ? Pourquoi les Occidentaux en voulaient autant à patrice Emery Lumumba?
S’inspirant de la brulante actualité; une élève a posé la question suivante au conférencier: L’année 2016 est celle de la fin du mandat du chef de l’Etat puisque l’article 70 de la constitution stipule que le mandat du président de la République est de 5 ans renouvelable une seule fois. Ne craignez-vous pas que le président actuel court le risque de se faire assassiner aussi s’il cherche à s’éterniser au pouvoir?
La réponse de Freddy Mulumba est on ne peut plus claire. « C’est vrai, le risque est là. Si on vous raconte l’histoire de Lumumba et M’zee, c’est pour que cela ne se répète plus. Quel que soit le défaut d’un président, il n’est pas normal que les étrangers se permettent de l’assassiner. C’est au peuple congolais de refuser tout assassinat de ses dirigeants. Nous devons apprendre à régler nos problèmes dans la paix, dans les discussions. La violence n’amène rien.
Très souvent, quand on assassine un dirigeant congolais, c’est pour les intérêts étrangers. Donc, le peuple doit être attentif et lucide. Mais, ceci demande une conscience à l’interne. Malheureusement, nous avons une classe politique Inconsciente ».
Saluant la pertinence des propos de l’orateur, le préfet des études du Lycée Sainte Germaine ne s’est pas prié faire cette recommandation : « Chers élèves, c’est ce qu’a été la vie de nos leaders. Si aujourd’hui vous ne savez pas vous prendre en charge, personne ne le fera à votre place. C’est pourquoi vous devez mettre de l’ordre dans ce que vous faites. Voyez ce qui est correct pour vous et pour le pays. Nous devons continuer la lutte de cette façon-là ».
Par AMEDEE MWARABU KIBOKO