Elections en RD Congo : l’Opposition politique toujours déstructurée

Vendredi 6 février 2015 - 08:06

Délestés du marketing de présence dans le Congo profond, les Opposants attendent-ils la dernière minute ?

Des élections coûte que coûte en 2016 ! Des élections à tout prix dans les délais constitutionnels prévus. C’est en ces termes que se résume ou presque, la saga observée depuis peu dans la classe politique congolaise. Cependant, ces scrutins réclamés à cor et cri, avec une bonne dose d’acharnement, laissent entrevoir de graves erreurs de marketing politique qui, le moment venu, feront payer cash aux leaders de l’Opposition.

Que les élections soient organisées en 2016 en RD Congo, elles sont loin d’être un événement. Moins encore un scoop. Bien au contraire. On aura plutôt respecté la Constitution. C’est donc ça, la seule raison qui légitime la fraction de l’opinion publique rd congolaise qui revendique la tenue des différents scrutins prévus. Ceux-ci vont des locales jusqu’à la présidentielle, en passant par les municipales, les urbaines, les provinciales et les législatives.
Cependant, des experts attentifs dégagent une constance. Comme lors des échéances électorales antérieures, l’Opposition politique préfère des "querelles" intestines aux stratégies porteuses d’espoir de rempiler à tous les niveaux des scrutins. 2016 ! Si la population pense qu’elle a encore bien des jours pour arriver à l’échéance fatidique, tout homme politique averti aura remarqué qu’il n’a plus de temps à perdre. Dans un pays aux réalités de terrain souvent complexes et mal maîtrisées, ce n’est pas toujours évident d’amorcer à la dernière minute, des actions de marketing politique fiables, avec espoir de gagner un quelconque scrutin. Hélas. L’agir des différents acteurs politiques congolais semble nous renseigner le contraire. Ceux qui combattent le régime en place, au nom de l’" alternance politique ", donnent malheureusement l’impression d’avoir déjà gagné les élections à tous les niveaux. Erreur.

2016, C’EST DEJA MAINTENANT !
Combien d’hommes politiques peuvent prétendre sillonner toute l’étendue du territoire national en temps record ? Plus simplement, la question serait " combien d’acteurs politiques, qu’il soit de l’Opposition politique ou de la Majorité au pouvoir, a la certitude d’avoir un répondant positif dans les coins et recoins du pays profond ? » Si le Président Joseph Kabila peut l’ambitionner ainsi, c’est à cause de son statut de Chef de l’Etat depuis le 25 janvier 2001. Partant, il charrie une expérience que nul ne saurait lui dénier en matière de gestion d’hommes. Ce qui n’est pas si évident dans un environnement politique congolais qui a tout l’air de ressembler à un marigot de caïmans, toutes espèces confondues.
Comparé donc avec les autres opérateurs politiques, Joseph Kabila a ainsi un avantage comparatif. S’il faut emprunter au lexique du sport, on dirait que le Raïs rd congolais a une longueur d’avance assez confortable sur les autres. Cela s’entend, il peut, selon que son agenda le permet, sillonner l’ensemble du territoire national, lui qui a un bilan politique à présenter en termes de gestion du pays durant ses deux précédents mandats. Précision importante, nous ne sommes pas en train de prédire l’avenir politique du Président de la république. Loin, et même très loin de nous cette intention. Nous préférons donc laisser cet exercice aux spécialistes ayant le don de lire à livre ouvert la pensée des autres.
Seulement voilà. 2016 se prépare dès maintenant. Simple calcul arithmétique, à peine 18 mois séparent les Congolais de ces échéances que des friands de l’électrochoc présentent comme apocalyptique. Il n’y a pas de recette magique pour gagner une élection si ce n’est le choix de bonnes stratégies de marketing politique aussi bien en amont qu’en aval. Quel sage conseillerait à un acteur politique de s’aventurer dans un terrain dont il ne maîtrise pas les réalités ? Quel homme politique, fut-il célèbre, pourrait ambitionner développer une communication politique efficace à destination d’une cible qu’il n’a jamais connue auparavant ? L’expérience des pays de vieille démocratie est révélatrice. Que ce soit dans des pays d’Europe ou d’Amérique, il est noté que les acteurs politiques n’attendent jamais la période de campagne électorale pour descendre à la base. Bien au contraire. Ces leaders politiques, candidats potentiels à quelque niveau de scrutin, intensifient des stratégies de marketing de présence. Question de créer des liens de familiarité et de sympathie avec leurs prochains électorats. Ainsi, grâce au sondage, ils peuvent soit revoir leurs ambitions, soit les maintenir.

LA RANCON D’UN VOTE BIOLOGIQUE
Tout le malheur de l’homme politique congolais est de réduire le pays à sa capitale Kinshasa. Ainsi donc, nombreux sont des politiciens qui faussent leurs calculs parce que basés sur des conjectures que leur offrent la rue de Kinshasa. Manifestement, ils oublient que Kinshasa n’est pas la République démocratique du Congo. L’électorat kinois à lui seul, est bien loin de produire un Président de la République. Moralité, les applaudissements circonstanciels, de même que des hues dans certains coins de la ville, sont loin d’être des indicateurs fiables sur lesquels un homme politique congolais peut prétendre bâtir ses ambitions. Le pays est vaste. Et même très vaste. Il est aussi pluriel. Le parcourir ne ressemble pas à un simple concours de cyclisme. En l’occurrence le célèbre " Tour de France ". Hélas ! Très peu parait le nombre d’acteurs politiques qui prennent en compte cet aspect du problème.
A priori, certains analystes désintéressés conviennent que l’immobilisme de l’acteur politique congolais avant les élections, est la conséquence directe du vote biologique auquel il est habitué. La plupart attendent souvent l’heure " H " pour effectuer des descentes de très courtes durées dans leurs bases sociologiques. Jouant ainsi sur la corde tribalo-ethnique, ils s’en sortent parfois bien. Mais toujours est-il que les législatures se succèdent mais ne se ressemblent pas. Petit à petit, les Congolais de l’arrière-pays, considérés à tort comme des "naïfs ", commencent à prendre conscience. L’expérience des échéances électorales antérieures montre que le " vote-recompense " de 2006 s’est révélé un véritable " vote-sanction " en 2011. Et, en 2016, la même sanction risquera d’être beaucoup plus sévère qu’elle ne l’a été en 2006. Et, au moment où le compte à rebours est presqu’entamé, l’Opposition ne semble bénéficier de la moindre faveur de calendrier. Elle doit donc se structurer. Pourvu qu’elle ait véritablement l’idéal de conquérir le pouvoir et le conserver le plus longtemps possible. Autrement, on ne serait pas loin d’un simple folklore politique, à la limite d’une agitation sans issue. Laurel KANKOLE