La machine du dialogue est totalement grippée. Edem Kodjo, facilitateur attitré, est en difficulté. Entre l’UDPS d’Etienne Tshisekedi qui a durci la position et l’aile dure de l’Opposition qui a mis une croix au dialogue, le diplomate de l’Union africaine est à la croisée des chemins. Le tirer de l’impasse est le pari que tentent de gagner l’ONU, l’UE, l’OIF et l’UA en initiant d’intenses tractations en vue d’obtenir l’adhésion de toutes les parties congolaises au dialogue. Particulièrement l’aile dure de l’Opposition.
Le Potentiel
En acceptant de se pointer en facilitateur international du dialogue politique proposé par le président Joseph Kabila, le Togolais Edem Kodjo n’avait pas conscience de la complexité de sa tâche. Avec le temps, l’émissaire de l’Union africaine en République démocratique du Congo s’est certainement fait une idée de la crise politique congolaise.
Après avoir fait le tour de différentes capitales africaines et occidentales, Edem Kodjo est revenu à Kinshasa avec une mallette vide. Le dialogue est toujours dans l’impasse. En réalité, le Togolais ne sait plus sur quel pied danser
Pression tous azimuts
Selon certaines indiscrétions, la communauté internationale, portée essentiellement par l’organisation des Nations unies (Onu), l’Union européenne (UE), l’Organisation internationale de la francophonie (OIF) et l’Union africaine (UA) ont intensifié pression sur les dirigeants congolais, particulièrement ceux hostiles au dialogue, pour décanter la crise politique persistante.
Depuis trois jours, les états-majors de différents partis et regroupements politiques de l’Opposition ont reçu la visite, apprend-on, de différents diplomates occidentaux en poste en RDC. Ces contacts directs ont eu une seule fin : amener les plus durs de l’Opposition à adhérer au projet du dialogue.
Si la communauté internationale tient au schéma du dialogue, c’est pour éviter, prédisent les analystes, que la situation en RDC n’empire et explose. Dans ce cas, l’on ne serait pas loin du décor non reluisant qui prévaut au Burundi. Or, l’aura de la RDC et surtout son poids dans la région des Grands Lacs sont des facteurs qui influencent l’implication de la communauté internationale.
Mais, jusqu’à présent, l’Opposition – en tout cas la plus représentative – n’a pas encore accédé à la demande de la communauté internationale, dont les quatre organisations internationales, en l’occurrence l’ONU, l’UE, l’OIF et l’UA se sont fait le porte-voix.
Dans l’Opposition, on estime qu’à l’heure actuelle, le dialogue n’a pas sa raison d’être. Le dernier arrêt de la Cour constitutionnelle sur l’interprétation de l’article 70 de la Constitution a mis à nu, soutient l’Opposition, les motivations cachées de la majorité présidentielle derrière le dialogue politique prôné par le président Kabila.
En effet, l’aile dure de l’Opposition reste convaincue que le dialogue est le moyen subtil qu’a trouvé la Majorité pour redonner un second souffle à son autorité morale, après l’expiration constitutionnelle du mandat de ce dernier. Raison pour laquelle le G7, la Dynamique de l’Opposition, l’Alternance pour la République de même que le Collectif des nationalistes ont jugé bon de mettre la croix sur un projet de dialogue made in Kabila.
Est-ce la pression de la communauté internationale réussira à faire fléchir l’opposition ? C’est l’objet de toutes les tractations de ces trois derniers jours.
Dans tous les cas, dans les milieux de l’Opposition, l’on ne transige pas sur le principe, seule la Constitution devait prévaloir sur tout compromis politique. De ce point de vue, l’Opposition considère que le dialogue ne devait pas servir de prétexte pour mettre un coup d’arrêt au processus électoral. Même s’il devait y avoir un quelconque forum national, l’aile dure de l’Opposition note qu’il y a des questions sur lesquelles aucun compromis n’est autorisé. C’est notamment le respect de la Constitution quant au mandat du chef de l’Etat et l’organisation des élections dans les délais constitutionnels.
Débloquer la machine
Il faut dire que la communauté internationale s’est imposé un challenge, à première vue difficile à relever. C’est celui d’amener les parties hostiles au dialogue à adhérer au projet du chef de l’Etat, Joseph Kabila. Certes, en prenant le devant de cette initiative, la communauté internationale entend jouer un rôle de premier plan dans la conduite du débat.
Est-ce pour autant qu’elle garantit la tenue de ce forum dans les limites de la Constitution ? Ce n’est pas évident. Ce qui explique toutes les craintes de l’Opposition qui redoute de la malignité de la Majorité présidentielle à se servir de ce dialogue pour rebondir, c’est-à-dire contourner le verrou constitutionnel qui exclut son autorité morale de la course à la présidentielle.
Edem Kodjo est en difficulté. C’est un secret de polichinelle. Depuis sa nomination, le diplomate togolais a du mal à débloquer la machine du dialogue. Pour l’instant, il pense négocier son salut en se servant de la forte pression qu’exerce la communauté internationale sur la classe politique, farouchement hostile au dialogue. Est-ce que Edem Kodjo parviendra à accomplir sa mission de facilitation ? wait and see.