Delly Sesanga : ‘‘la deuxième session extraordinaire du sénat est une violation grossière de la constitution’’

Vendredi 7 août 2015 - 12:24

(KINSHASA)- L’opposant Delly Sesanga a dénoncé la convocation du sénat en session extraordinaire pour la deuxième fois en moins d’un mois. Le président de l’Envol ne va pas par le dos de la cuillère pour qualifier cet acte de violation grossière de la constitution. Pour lui, la constitution ne permet pas à ce qu’entre deux sessions
ordinaires, il y ait deux sessions extraordinaires. ‘‘Les règles de convocation des sessions extraordinaires sont énoncées dans la Constitution, mais organisées par le Règlement intérieur conformément à la Constitution’’, a-t-il précisé. Et l’élu de Luiza de préciser qu’on peut convoquer une session extraordinaire sur toute matière.

Cependant, l’opposant rappelle que la constitution, de manière implicite, énonce que seule la session extraordinaire consécutive à l’élection de la nouvelle chambre peut se prolonger au-delà de trente jours. ‘‘C’est la première règle d’exclusion’’, dit-il. Et la deuxième, c’est que les règlements intérieurs de nos chambres veulent que lorsqu’une session extraordinaire n’a pas épuisé la matière pour laquelle elle a été convoquée, cette matière est reportée, non pas à une éventuelle session extraordinaire, mais à la prochaine session ordinaire », a-t-il argumenté. Delly Sesanga note qu’une session extraordinaire ne peut succéder à une autre session extraordinaire.

Pour démontrer encore le caractère irrégulier de cette décision, le juriste chevronné affirme que le principe qui découle du règlement intérieur et de la Constitution est évocateur : ‘‘Les députés nationaux sont tenus de passer un minimum de temps pendant les vacances parlementaires, dans leurs juridictions. Et ce temps-là ne peut être pris que pendant la période de l’intersession’’. Selon lui, s’il y a plusieurs sessions extraordinaires, on violerait non
seulement la constitution, mais aussi les règles pré-rappelées en matière de convocation de sessions extraordinaires, en privant aux députés le temps d’aller au contact de la base dans leurs juridictions. Sesanga estime qu’on ne peut pas vouloir quelque chose et son contraire. Déjà, que tout le monde, dit-il, critique le fait que la constitution est trop longue. ‘‘Mais justement, c’est parce qu’on a voulu éviter des interprétations spécieuses. La Constitution
est une affaire des nobles, des aristocrates. Elle est écrite pour les gens sensés qui l’appliquent de bonne foi. Si maintenant, au détour d’une disposition, on veut chercher l’élément écrit qui concerne tous les cas de figure, on n’a plus besoin d’une Constitution, mais d’un PV qui règle la vie publique’’, a déploré l’élu de Luiza. Le leader de
l’Envol rappelle que législateur n’est pas resté silencieux. Il a pourvu à ce cas, soutient le brillant juriste. Il tranche en indiquant que la matière qui n’est pas épuisée au cours d’une session extraordinaire, devra être examinée en priorité lors de la session ordinaire. En termes de droit, cela s’appelle une exclusion, ajoute Delly Sesanga qui trouve de mauvaise foi, les personnes qui prétendent que le texte n’est pas explicite. ‘‘Le bon sens en politique doit pouvoir l’emporter et guider notre application de textes’’, assure-t-il. Il argumente en disant que si le législateur avait voulu qu’il y ait deux sessions extraordinaires, cette disposition aurait été rédigée de telle sorte que les matières qui ne sont pas épuisées au cours d’une session extraordinaire, soient renvoyées pour examen au cours d’une session extraordinaire subséquente. ‘‘Mais en fermant le cadre d’examen de ces matières à la seule session ordinaire, le législateur a exclu la possibilité d’avoir une session extraordinaire subséquente. Nous sommes dans le cas d’une violation, pas flagrante, mais grossière de la Constitution. Il y a même un esprit de trahison,
compte tenu des objectifs qui sont affichés. Trahison dans la foi républicaine’’, a-t-il dénoncé. L’ancien président de la commission PAJ de l’assemblée nationale pense que les parlementaires ne feront pas fausse route en s’égarant du droit chemin. D’ailleurs, il considère tout déviationnisme comme un danger pouvant créer une situation d’instabilité. ‘‘Il ne faut pas oublier que cette constitution est issue de l’accord global et inclusif qui a mis fin à de longues années de guerre civile dans ce pays. Trahir cette constitution, c’est attenter à la foi républicaine. Ce qui implique la création des conditions d’instabilité beaucoup plus grave dans notre pays », a-t-il expliqué. Par ailleurs, il a critiqué vertement la procédure d’examen du projet de loi sur la répartition des sièges à
l’assemblée nationale. En bon juriste, il a relevé l’inconstitutionnalité de la procédure. ‘‘C’est une loi qui doit être censurée par la Cour constitutionnelle pour violation de la Constitution’’, a-t-il insisté. Il trouve anti-démocratique que sur base d’une motion incidentielle, le débat ait été évité lors de l’examen de ce texte. Au sujet des annexes, l’auteur de la motion a considéré que la question était de la compétence technique de la Ceni.
‘‘Ceci est une violation de la Constitution’’, gronde Sesanga. D’après lui, la constitution prévoit un seul cas de figure où un texte peut être adopté sans débat. ‘‘Et la contrepartie, c’est que le gouvernement doit sur ce texte-là, poser la question de confiance à l’Assemblée nationale. Sans recourir à ce mécanisme, le parlement ne
peut pas adopter un texte sur base d’une simple motion présentée par un quidam qui exempte les annexes de la discussion, alors que ces annexes font partie d’une loi et seront opposables’’, a-t-il conclu.