Corneille Nangaa, Norbert Basengezi et Pierrette Mwenze, respectivement président, vice-président et questeur de la Céni (Commission électorale nationale indépendante), ont prêté serment, hier jeudi, devant la Cour constitutionnelle. Dans son speech, le tout nouveau président de la Céni se targue de grandes ambitions et promet de prendre tout son temps. Une attitude qui intrigue dans la mesure où l’homme évite d’aller à l’essentiel (publication du calendrier électoral réaménagé et toilettage du fichier électoral) et fait preuve de manœuvres dilatoires
Le Potentiel
Les trois nouveaux membres du bureau de la Commission électorale nationale indépendante (Céni), à savoir Corneille Nangaa, Norbert Basengezi et Pierrette Mwenze, respectivement président, vice-président et questeur ont prêté serment, le jeudi 19 novembre au siège de la Cour constitutionnelle. Ils succèdent ainsi à M. l’abbé Apollinaire Malumalu, André Mpungwe et Chantal Ngoy Tshite qui ont présenté dernièrement leurs démissions au chef de l’Etat pour diverses raisons. Avec cette étape, les trois personnalités viennent compléter la liste de treize membres de la Céni désignés par la Majorité, l’Opposition et la Société civile.
A travers le serment, ils se sont engagés à « respecter la Constitution et les lois de la République démocratique du Congo et à remplir loyalement et fidèlement les fonctions de membres de la Céni ». Ils ont juré de n’exercer aucune activité susceptible de nuire à l’indépendance, à la neutralité, à la transparence et à l’impartialité de la Céni.
En acceptant cette lourde et délicate responsabilité, les nouveaux membres du bureau de la Céni sont conscients qu’ils doivent renoncer à toutes les injonctions et ne doivent céder à aucune pression d’où qu’elle vienne.
Après cette cérémonie, les nouveaux membres de la Céni pourraient alors entrer en fonction. Ils ont été investis par l’ordonnance présidentielle publiée le lundi 16 novembre 2015, sur les antennes de la Radiotélévision nationale congolaise (RTNC).
Des priorités vagues
Après la démission de M. l’abbé Apollinaire Malumalu à la tête de la Céni, pour raison de santé, Corneille Nangaa Yobeluo a été choisi par les confessions religieuses, à l’exception de l’église catholique, pour occuper ce fauteuil. De son côté, la Majorité a désigné Norbert Basengezi en remplacement d’André Mpungwe et Pierrette Mwenze pour prendre la place de Chantal Ngoy Tshite comme questeur.
Avec cette triple prestation de serment, l’équipe est maintenant complète et prête pour le travail. Comme c’est la continuité du travail amorcé par son précédent, Corneille Nangaa ne devrait pas bénéficier d’un temps de grâce. Répondant à une question de la presse sur ses priorités, celui-ci a déclaré qu’il n’en avait pas en propre, mais qu’il s’alignait sur celles de la Céni.
Seulement voilà. Corneille Nangaa a affiché une attitude qui intrigue en dévoilant ces priorités : « Les priorités de la Céni, c’est d’évaluer ce qui est fait et ce qui reste à faire ; consulter toutes les parties prenantes au processus électoral et lever les grandes options pour les élections ». Cette déclaration appelle analyse et commentaire.
Le nouveau chef de la centrale électorale pense disposer de tout son temps en indiquant qu’il va procéder par une évaluation de ce qui est fait et ce qui reste à faire. En d’autres termes, il se comporte comme un nouveau venu à la Céni et qui a besoin de s’acclimater avant de s’imprégner de la planification des activités faite par son prédécesseur. Or, il connaît la centrale électorale comme sa poche pour avoir été à la CEI en 2006 avant de revenir plus tard en 2013 à la Céni dans les mallettes de son parrain Apollinaire Malumalu.
Du coup, il est difficile à Corneille Nangaa de croire tourner tout le monde en bourrique en déroulant un parchemin qui montre qu’il a des choses à apprendre et un calendrier d’activités dont les limites ne sont pas connues. Il a conscience du temps qui presse en rapport avec le dépassement du calendrier électoral mais il en fait peu de cas. Reprendre à zéro ne signifie-t-il pas qu’il jouerait le jeu du glissement que tout le monde redoute tant ? Pourquoi ne peut-il pas poursuivre le travail accompli par l’équipe sortante afin de gagner du temps ?
Ce questionnement charge Corneille Nangaa et ne le met pas à l’abri des soupçons et autres suspicions quant à son absence d’indépendance aux termes de la loi portant organisation et fonctionnement de la Céni. Il donne l’impression de faire table rase et de reprendre le film avant qu’il n’arrive à son terme. Son échafaudage laisse à penser qu’il a choisi de minimiser le sens et la charge sémantique du serment qu’il venait de prêter, celui de « respecter la Constitution et les lois de la République démocratique du Congo ».
Alors qu’il devrait donner des signaux évidents d’aller droit à l’essentiel, le nouveau président de la Céni s’est plutôt lancé dans des manœuvres dilatoires. Lesquelles ne peuvent plus duper personne. Au contraire, les parties au processus risquent de ne pas être rassurées sur la suite des événements, notamment le toilettage du fichier électoral tel que l’a recommandé la mission de l’Oif (Organisation internationale de la francophonie) et la publication dans le meilleur délai d’un calendrier électoral réaménagé, surtout réaliste.