
La table ronde sur l'appropriation du génocide congolais s'est ouverte ce lundi 31 mars 2025 à Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo. Le coup d'envoi de ces assises, organisées par la Commission interministérielle d'aide aux victimes et d'appui aux réformes (CIA-VAR) en collaboration avec le Fonds national de réparation des victimes de violences sexuelles liées aux conflits et crimes contre la paix et la sécurité de l'humanité (FONAREV), a été donné par le président Félix Tshisekedi.
Dans son allocution, le chef de l'État s'est réjoui du fait que la vérité sur les crimes « atroces » commis en RD Congo et longtemps ignorés par la communauté internationale commence à émerger, tout en saluant la tenue de cette table ronde.
Pour le président de la République, l’organisation de ces travaux doit permettre la construction d'une stratégie nationale visant à obtenir la reconnaissance internationale du génocide congolais.
« Cette table ronde doit nous permettre non seulement de témoigner, mais surtout de construire ensemble une stratégie nationale efficace pour obtenir la reconnaissance internationale du génocide commis sur notre sol et pour consolider durablement la paix dans notre pays. La République démocratique du Congo, fidèle aux engagements internationaux pris, notamment à travers la convention sur le génocide et le statut de Rome, ne ménagera aucun effort pour que justice soit faite, pour que la dignité de nos victimes soit restaurée et pour que l'histoire vraie de notre pays soit enfin écrite par les Congolais eux-mêmes », a-t-il déclaré.
Pour y parvenir, Félix Tshisekedi a annoncé la mise en place d'un groupe d'experts chargés d'évaluer les préjudices et les pertes humaines perpétrés au Congo-Kinshasa.
« À cet effet, j'annonce la mise en place imminente d'un groupe interdisciplinaire d'experts chargés d'évaluer de manière rigoureuse et systématique les préjudices et les pertes humaines liées aux crimes de masse, notamment ceux relevant du génocide perpétré sur le territoire de la République démocratique du Congo », a précisé le chef de l'État.
Bien avant le mot du président Tshisekedi, plusieurs discours ont marqué la cérémonie d'ouverture de cette table ronde. D'abord, celui de Patrick Fata Makunga, directeur général du FONAREV, qui a insisté sur l'importance de la reconnaissance nationale et internationale du génocide congolais.
« Oui, chaque Congolais, chaque Congolaise doit pouvoir ressentir les douleurs de ces victimes comme une part de sa propre histoire. Nous sommes venus ici pour dire ensemble que ce génocide ne peut plus être tu. Nous sommes ici pour poser les premiers jalons d'une reconnaissance nationale et internationale, mais aussi pour défendre une culture de paix fondée sur la justice et la vérité », a-t-il indiqué.
De son côté, François Kakese, coordonnateur exécutif de la CIA-VAR, a laissé entendre que la table ronde s'attend à briser le silence sur les drames « effroyables » commis en RDC. Selon lui, il est temps que le sort des victimes de ces drames passe de l'omerta à la lumière.
« La table ronde qui s'ouvre ce 31 mars répond à cet impératif de commémoration du GENOCOST, mais elle doit surtout être l'occasion de briser le silence face à des drames parmi les plus effroyables que l'humanité ait connus depuis la deuxième guerre mondiale avec des dizaines de millions de vies réduites au silence. Il était donc temps que la mémoire de ces victimes, dont le sort a été volontairement contraint à la méconnaissance et à l'oubli, passe de la loi de l'omerta à la lumière et que leur histoire, celle des massacres de ces âmes innocentes, soit rétablie. Il s'agit donc du droit à la vérité pour elles et du devoir de vérité pour la nation toute entière », a-t-il souligné.
La ministre des Droits humains, présente à cet événement, a dénoncé les massacres perpétrés dans l'Est du pays depuis 30 ans, tout en appelant à la justice pour le Congo. Elle a affirmé haut et fort qu'un génocide est en cours dans l'Est et a appelé à sa fin.
« Aujourd'hui, cette tragédie a un nom, cette tragédie s'appelle génocide. Je prends la parole devant vous non pas pour me plaindre, mais pour témoigner. Je parle ici au nom de tout un peuple, un peuple qui endure, un peuple que l'on voudrait réduire au silence, un peuple que l'on massacre à huis clos pendant que les projecteurs du monde sont ailleurs. À l'Est de la République démocratique du Congo, un génocide est en cours. Oui, j'emploie ce mot en pleine conscience de sa gravité. Oui, le génocide est en cours. Ce génocide est mené par le Rwanda et par ses supplétifs du M23 et de l'AFC », a déclaré Chantal Chambu.
La table ronde sur l'appropriation du GENOCOST va s'étendre sur quatre jours, soit du 31 mars au 3 avril prochain. Les participants, fils et filles congolais de toutes tendances confondues, vont travailler sur sept axes : l'éducation par l'enseignement de base, l'éducation par l'enseignement supérieur, le tourisme et la politique mémorielle, le culturel et l'artistique, la communication et les médias, le narratif (argumentaire international), et la construction de la promotion d'une culture de la paix.
L'objectif est de rassemble les Congolais afin d'œuvrer pour la reconnaissance du génocide congolais.
Prince Mayiro