Tribune: enjeux de la restructuration du cabinet du président de la République (Iras think tank)

Mardi 21 avril 2020 - 17:09
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INSTITUT DE RÉFLEXION ET D’ANALYSE STRATÉGIQUES IRAS THINK TANK

Enjeu: Restructuration du Cabinet du Président de la République Démocratique du Congo

Contexte

De l’analyse du commun des Congolais, la gestion des affaires de l’État par le cabinet du Chef de l’État constitue le maillon faible des quinze premiers mois de l’administration de Félix AntoineTshisekedi Tshilombo. Plusieurs qualificatifs ont été attribués à ce cabinet allant de l’amateurisme à l’incompétence.

Les attentes des Congolais vis-à-vis de leur nouveau Président sont énormes et élevées, et les erreurs d’apprentissage sont rarement pardonnées. Ces exigences sont dues au fait que le peuple, qui ne  s’explique pas plus de six décennies de mal gouvernance dans laquelle le pays fut plongé, veut voir les choses aller vite, voire très vite. Le Président Félix Tshisekedi est aujourd’hui le dépositaire de l’espoir de ce peuple meurtri, par conséquent il n’aurait pas droit à l’erreur.

La bonne nouvelle est que la quasi-totalité des compétences congolaises locales ou de la diaspora sont prêtes et disposées à mettre l’épaule à la roue pour accompagner leur Président à réussir à son quinquennat et à sortir le pays du gouffre dans lequel il est longtemps plongé.

Hélas ! Petit à petit, après un an et trois mois, les Congolais voient le doute s’installer dans leurs esprits.  Oui, doute parce que les résultats tardent à venir.  Doute parce que des rumeurs de mauvaise gestion au niveau du bureau de la présidence du pays s’installent et le ras-le-bol est visible. On parle de l’enrichissement illicite et ostentatoire de certains membres du cabinet du Chef ou de la vie de pacha de ceux-ci au vu et au su du pauvre Congolais.  Ces rumeurs épargnent le Chef de l’État, fils d’Étienne Tshisekedi, chantre du célèbre « Le peuple d’abord ».  Le travail n’est visiblement pas bien fait par ceux qui ont le devoir d’épauler le Président dans sa lourde mission de redresser le pays.  Félix Tshisekedi est presque un homme seul, dit-on.

Des conseillers qui monnayeraient les audiences auprès du Président, les rumeurs de détournement d’argent par certains cadres de la Présidence de la République, jusque-là simples bruits de couloir, deviennent persistantes avec la non réalisation à échéance des travaux des sauts-de-mouton.  Les enquêtes judiciaires sur la gestion des opérations de 100 jours révèlent qu’il y aurait des cas de malversation financière hors du commun.

Eléments pertinents 

Le contexte général de la gestion sous Félix Tshisekedi met en exergue plusieurs données pertinentes d’une gouvernance relativement faible du cabinet du Président.  Il y a lieu ici de relever à titre illustratif quelques faits : l’inauguration manquée du saut-de-mouton de Pompage dont l’annonce fut faite à grande pompe alors que les travaux étaient encore en cours; le retard de plusieurs mois dans l’achèvement des  travaux de 100 jours en général notamment les sauts-de-mouton, les maisons préfabriquées à Kinshasa et à l’intérieur du pays du pays, la surestimation des coûts de réhabilitation d’une école à Kinshasa ; les messages sur les réalisations du Président de la République sont faiblement relayés par les services de communication de la présidence et par la RTNC ; la mise en accusation du Directeur de Cabinet  du Président pour détournement des fonds ; le conflit de leadership au sein du parti présidentiel, l’Udps, etc.

Analyse de la situation

Eu égard aux faiblesses constatées dans la gestion du cabinet du Président de la République, serait-il vrai de dire que le Congo de Félix Tshisekedi est mal parti ?  Tout observateur averti qui ferait une analyse objective ne se privera pas de dire que les soubresauts rencontrés par le  Président Félix Tshisekedi sont bien inhérents à toutes les organisations et répondent à la courbe normale d’apprentissage du Chef qui a toutes les manettes entre ses mains pour redresser la barque.

Des éléments pertinents ci-dessus, il se dégage que la bonne foi du Président Félix Tshisekedi est aujourd’hui trahie.  Le Chef de l’État est trahi à trois niveaux par :

  1. son allié le plus proche Vital Kamerhe, aujourd’hui en détention préventive à la prison centrale de Makala ;
  2. son entourage immédiat, constitué de quelques-uns de ses amis les plus proches et certains partisans de son allié Vital Kamerhe à qui il a fait confiance pour l’aider dans sa lourde mission ;
  3. son parti politique, l’UDPS, en proie à  des conflits de gestion des ambitions et de positionnement.

Premièrement, la gestion des travaux de 100 jours chapeautés par le directeur de cabinet du chef de l’État est entourée des allégations sérieuses de détournement alors que le peuple congolais attendait du CACH, Cap pour le Changement, un modèle de gestion différent de celui de la précédente administration.

Deuxièmement, la gestion du cabinet de la présidence qui regorge un effectif important des proches du Chef de l’État et du directeur de cabinet, ne donne pas le résultat tant attendu.  Ce qui pousse l’opinion à se poser des questions sur le choix de certains collaborateurs du Président. En effet, il s’est réalisé des actions de haute facture susceptibles de propulser tant soit peu la cote de popularité du Président, mais hélas, le mutisme de la cellule de communication du bureau du Chef à ces sujets appelle au questionnement.  Ils ont failli dans leur mission de vulgarisation des messages du Président. Hormis quelques échos faits dans les médias sociaux qui ont relayé avec pompe les évènements comme la gratuité de l’enseignement de base ou encore les différentes interviews du Chef sur sa vision du pays.

Enfin, le parti présidentiel l’Udps dont le succès aux dernières élections est resté étriqué pour ne pas dire décevant est en train de trahir le Président Félix Tshisekedi avec ses luttes intestines d’influence et de positionnement. Le parti qui devrait concentrer ses objectifs stratégiques sur son implantation dans les coins du pays où il manque de députés étale honteusement sur la place publique tous ses problèmes internes. Aucun programme d’investissement palpable, comme la création d’une radio du parti, le soutien à ses vaillants combattants et aux familles des disparus, par exemple n’est mis en place.

Aujourd’hui, le fils du sphinx de Limete, le Chef de l’État Félix Tshisekedi est seul au front. La restructuration du cabinet présidentiel devient plus qu’impérative.

C’est à ce titre que notre groupe de réflexion a pris l’initiative d’adresser la présente note à l’attention du Chef de l’État, et de lui suggérer en conséquence, une voie de sortie de nature à renforcer l’efficacité des services du cabinet présidentiel.

 

Options possibles

De manière à bien poursuivre notre analyse, voyons les options possibles qui s’offrent au Président de la République pour l’accomplissement de son mandat.

  1. Le Statu quo

Le statu quo signifie que le Chef de l’État continue avec son équipe de gestion dans sa configuration actuelle sans ou avec seul remplacement M. Kamerhe qui a maille à partir avec la justice par un des adjoints actuels. Il n’y a aucun avantage possible à cette option.  En outre, les multiples inconvénients comme l’amateurisme décrié de quelques-uns de ses collaborateurs immédiats et les brouilles au sein de son parti le conduiront vers un échec réel qui hypothéquera le succès de son mandat actuel et partant sa réélection en 2023.

 

  1.  Le changement partiel ou total de la direction du cabinet

Cette option se réalisera en changeant partiellement ou totalement les membres de la direction du cabinet, à savoir le directeur de cabinet et/ou ses adjoints, sans toucher au reste de l’équipe.  La faiblesse d’une telle option serait que les lacunes relevées dans le chef des cadres dues parfois à l’incompétence ou au manque d’expérience pertinente de ces derniers continueront à être un grand obstacle à l’accomplissement du travail attendu d’eux.

 

  1. La restructuration intégrale du cabinet

L’avantage d’une telle option sera d’incorporer des personnes plus qualifiées aussi bien au niveau de la direction du cabinet qu’au sein de l’équipe des conseillers dont le travail n’a pas été à la hauteur des attentes du peuple d’une part, et de dégager des économies par la fusion de certains postes redondants d’autre part.

 

Recommandation

La restructuration intégrale du cabinet du Président de la République se présente comme la meilleure option et la mieux adaptée compte tenu des résultats actuels du cabinet et des responsabilités individuelles de chacun des membres du cabinet.

Tout compte fait, afin d’éviter la répétition des erreurs qui ont prévalu lors de la constitution de l’équipe actuelle du cabinet, nous formulons la recommandation que les nouveaux directeurs et conseillers répondent aux critères de sélection minimum de formation, d’expérience et d’intégrité. 

Critères obligatoires de sélection

La définition des critères de sélection pour tout poste déterminé repose sur l’analyse du poste et des attributions y rattachées.  Ne pouvant analyser tous les postes de travail de la présidence, nous nous contentons de donner ici les critères généraux pour exercer un travail de cadre au niveau de la présidence d’un pays comme la République Démocratique du Congo.

Le choix des cadres de la présidence devra se faire et répondre à deux critères de mérite essentiels suivant : la formation de niveau universitaire ou supérieur dans le domaine d’expertise du travail et l’expérience professionnelle suffisante et solide.  En plus, ils devront suivre un séminaire d’orientation relatif à leurs rôles et responsabilités et d’éthique avant leur entrée en fonction.

Nous recommandons que le directeur de cabinet ait des compétences pertinentes en droit avec diplôme universitaire et qu’il dispose de plusieurs années expérience politique et en management des organisations. L’expérience de travail dans le contexte congolais serait un atout.

Les adjoints au directeur de cabinet devraient posséder chacun un diplôme universitaire dans le champ de compétence relatif à son travail par exemple économie et finance ou technique et administration, questions juridiques, politiques, diplomatie, mines, hydrocarbures et énergie auxquels s’ajouteraient plusieurs années d’expérience en management des organisations.

Tous les conseillers à la présidence de la Républiques devraient être de formation supérieure et posséder plusieurs années d’expérience pertinente dans leur domaine.

Le dernier critère obligatoire pour chaque poste au sein de la présidence devra être l’INTÉGRITÉ. Les cadres de la présidence devraient être en mesure de répondre aux exigences sur l’intégrité des postes à combler.

Il va de soi que chaque critère devra être validé par des enquêtes sérieuses de sécurité notamment en vérifiant les informations contenues dans les dossiers individuels des candidats. Le profil des individus devra être clairement détaillé dans le curriculum vitae des candidats. Au besoin, il serait possible d’envisager des entrevues informelles avec les candidats avant leurs nominations.

 

Fait le 20 avril 2020

Préparé par les membres de l’IRAS - Think Tank suivants :

 

  1. Augustin Citoko Kabasele, B.A., B.Éd.
  2. Désiré Ndomba, Ingénieur
  3. Jacques Kabeya Tenda, DESS, MGP, MBA, Doctorant en Business Administration
  4. Jean-Claude Mukanya Cibumba, DEA, MBA, Adm.A
  5. Jean-François Kabanda, Doctorant en Communication, spécialité politique et médias                                                  

 

 

[1] IRAS THINK TANK est un groupe d’experts, un brain-trust de réflexion et d’analyse sur la République       Démocratique du Congo dans tous les domaines et met ses résultats au service des décideurs congolais.

 

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