Les Sénateurs dénoncent le « poto-poto » dans les mines

Mardi 19 mai 2015 - 11:11

Trois ministres ont été entendus, hier lundi 18 mai au Sénat, à la faveur de la question orale avec débat du sénateur Mutamba Dibwe David relative aux droits, taxes et redevances payés à l’exportation des produits miniers marchands. Il s’agit des ministres des Finances Henri Yav Muland, des Mines Martin Kabwelulu, et du Commerce Mme Ngudianza Bayokisa.

Parti d’un constat selon lequel plusieurs mesures législatives et réglementaires prises dans le cadre de l’amélioration du climat des affaires en RDC n’ont jamais produit d’effets attendus, l’auteur de la question orale voulait obtenir la lumière nécessaire sur les raisons à la base de ce qui paraît comme l’échec des réformes menées dans le secteur.

Par ailleurs, il s’étonne que nombre de services non habilités continuent d’exercer aux frontières, alors qu’aux termes du décret n°036/2002 du 28 mars 2002, seuls quatre sont autorisés, à savoir DGDA, OCC, DGM, et Service d’hygiène.

Se basant sur des renseignements obtenus des opérateurs miniers et des agences en douane, David Mutamba voulaient que les membres du gouvernement éclairent la religion des Congolais par le biais du Sénat sur les questions ci-après :

Pourquoi la liquidation et la perception des paiements sur des exportations des produits miniers pour le compte du Trésor et d’autres services ou organismes publics, ne sont pas assurées par la DGDA, le seul service attitré ? Pourquoi la réglementation sur le nombre de services autorisés à exercer aux frontières n’est-elle pas respectée ? Quelle est la base légale de plusieurs droits, taxes et redevances perçues ?

S’adressant au ministre des Finances, il veut savoir le pourquoi 13 ans après la promulgation du décret déterminant le nombre des services à opérer aux frontières, le désordre ne finit pas ?

Les droits, taxes et redevances prélevés ne sont repris dans le Code minier.De même, il veut obtenir la lumière sur la légalité de la taxe du commerce extérieur sur les exportations, parce que n’étant reprise ni dans le code minier ni dans la nomenclature des droits, taxes et redevances.

Dans leur tentative de réponses à la question principale, les membres du gouvernement ont soutenu la régularité des perceptions sur les produits miniers marchands.

Le ministre des Finances affirme que la DGDA (Direction générale des douanes et accises) reste le seul service habilité à percevoir pour le compte du trésor et d’autres services ou organismes publics concernés. En plus, il rassure que toutes les recettes issues des perceptions sur les exportations des produits miniers, sont bien sécurisées conformément à la réglementation en la matière.

Pour sa part, la ministre du Commerce, parlant des services non habilités à opérer aux frontières, a renseigné que la question est au centre des concertations entre les ministres et responsables des services concernés en vue d’une solution. Avant de soutenir que la mise en place d’un guichet unique intégral sera une solution définitive au problème.

A son tour, le ministre des Mines a vanté les avantages du guichet unique qui permet de canaliser les flux et collecter les frais dus au trésor, juguler la fraude. Il a énuméré, à l’occasion, les recettes générées au Katanga pour les exerces 2013 -2014, tout en reconnaissant l’évasion de plusieurs millions de dollars à cause des services non habilités qui s’étaient immiscés dans la perception. Soit 269.474 millions USD en 2013 et plus de 270 millions en 2014.

A ce sujet, il a renseigné que la question avait suscité un débat au sein du conseil des ministres et se trouve en cours de traitement.

Concernant la base légale des perceptions, le ministre s’est appuyé sur quelques ordonnances pour justifier la régularité de l’opération.

Tous les missiles tournés vers Kabwelulu!

Conformément au règlement intérieur, un débat général a été ouvert à l’issue de l’exposition des deux membres du gouvernement.

L’écrasante majorité des interventions ont eu pour cible le ministre des Mines Martin Kabwelulu.

De manière générale, les sénateurs ayant pris la parole ont fustigé le caractère illégal des perceptions effectuées jusqu’ici sur les produits miniers marchands. Car, cela n’est nulle part prévu dans le code minier en vigueur. D’où, a soutenu Emery Kalamba, toute taxe qui n’a pas de fondement ou qui n’est prévue nulle part dans le code est illégale.

Ainsi, en s’appuyant sur des ordonnances et décrets pour justifier la légalité de ce qui se fait actuellement, le ministre donne l’impression de n’avoir pas assimilé l’esprit du code minier du secteur qu’il chapeaute, a-t-il déclaré en circonstance.

Florentin Mokonda Bonza a tenu à rappeler le manque de respect dont le ministre des Mines avait fait montre à l’égard des sénateurs. Il a lu sa lettre dans laquelle il sollicitait le report de son passage au Sénat au motif qu’il se rendait à une réunion du processus de Kimberley en Israël. Depuis, il n’a jamais songé à honorer la parole donnée. Avant de le qualifier d’outrage au parlement, en dénonçant dans la foulée le manque de considération dont le gouvernement fait souvent preuve à l’endroit du parlement par la non application de la plupart des recommandations lui faites par le Sénat et l’Assemblée nationale.

Qu’est devenue la MIBA ?

Toujours dans le débat, un intervenant a demandé au ministre des Mines d’éclairer l’opinion sur la situation de la MIBA (Minière des Bakwanga). Qu’est devenue la Miba ? Existe-t-elle encore ? Où en est-on avec les recommandations formulées à ce sujet ?

Dénonçant la corruption qui a élu domicile dans le secteur, le sénateur a révélé une situation bizarre que connaît la RDC qui n’exporte que la partie tantale des minerais, celle colombite étant toujours non comptabilisée !

Quelle est la part de l’Etat et sa traçabilité dans toutes les entreprises minières installées au pays ?

Presque tous les intervenants disent ne pas comprendre que, malgré la longévité de Martin Kabwelulu au poste (soit plus de 10 ans), il n’a jamais réussi à mettre de l’ordre dans le secteur.

Plusieurs autres préoccupations ont été également exprimées, comme celles liées à l’octroi désordonné des carrés miniers, le paradoxe selon lequel la RDC réputée scandale minier n’en a jamais fait preuve en ce qui concerne l’amélioration des conditions de vie de sa population comme cela se passe dans les pays pétroliers, etc.

Un délai de trois jours a été accordé aux ministres pour préparer leurs réponses. C’est le jeudi 21 prochain qu’ils reviendront apporter des réponses aux préoccupations.

Dom

 

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