Depuis les évènements du 19 au 21 janvier ayant conduit à l’annulation, dans la loi électorale, de la disposition qui conditionnait l’organisation des élections présidentielle et législatives aux résultats du recensement de la population, aucun écho ne vient de l’Office national d’identification (ONIP). Stratégie ou découragement des animateurs de cet établissement public qui, au lendemain de leur nomination et présentation, envahissaient sans cesse les médias ? Dans la rue, des questions fusent.
« Il était temps que la République Démocratique du Congo dispose des données démographiques fiables, nécessaires à l’orientation de sa politique sociale et économique pouvant permettre la prise de bonnes décisions dans bien des domaines sécurité nationale, santé, emploi migration (...) Il était temps que chacun comprenne que l’identification et l’entretien du fichier général de la population constituent, pour le gouvernement, un devoir et pour chaque citoyen un droit… Il était temps, plus que temps, que les cycles électoraux soient préparés et organisés avec un fichier électoral tiré du recensement administratif et de l’identification de la population ». Ces propos, pleins de détermination prononcés en décembre 2014, sont d’Adolphe Lumanu Mulenda Bwana N’sefu, directeur général de l’Office national d’identification (ONIP). A l’époque, il était dans tous les fronts, devant les micros de chaînes de radio et télévision, dans les colonnes des journaux, pur expliquer le bien-fondé du travail de son institution qui voudrait « répondre aux»besoins réels de la collectivité ». Une institution dont la mission est i’ identification systématique de la population vivant sur le territoire de la RDC et de tous les nationaux vivant à l’étrangers, en vue notamment de la constitution et de l’entretien du fichier général de la population et de la délivrance de la carte d’identité nationale, la carte de résident pour étranger et de tout autre document y relevant ». Mais depuis les malheureux évènements du 19 au 21janvier qui ont conduit à l’annulation d’une disposition contenue dans la nouvelle loi électorale et qui subordonnait l’organisation des élections présidentielle et législatives de 2016 à l’identification et au recensement de la population, un constat est dégagé : L’ONIP ne se fait plus entendre. Ses dirigeants qui, depuis leur nomination et présentation, et avant les évènements de janvier, étaient très médiatiques, sont, depuis, dans un retranchement qui ne dit pas son nom. Comment interpréter ce silence radio ? Est-ce une stratégie de travail des dirigeants de cet établisse- nient public qui voudraient désormais travailler dans la discrétion ? Ou, au contraire, c’est un découragement de voir que le recensement de la population n’est plus la condition sine qua non à l’organisation des présidentielle et législatives de 2016 d’autant plus que le législateur a tranché pour que la Commission électorale nationale indépendante (CENI) se contente des « données démographiques disponibles » au moment d’organiser ces scrutins ? Voilà qui taraude les esprits. Mais l’on ne peut pas ne pas se rappeler qu’à la nomination des animateurs de l’ONIP fin 2014, il y a eu des soupçons, venant essentiellement de l’opposition politique : cet établissement serait venu pour préparer le fameux « glissement » en faveur de Joseph Kabila. En effet, pour ceux qui ne jurent que par l’organisation, dans le délai, de la présidentielle 2016, doter au pays des données démographiques fiables ne serait qu’un prétexte pour l’équipe d’Adolphe Lumanu. Cette dernière ne serait là que pour gagner plus de temps qui profiterait à un Kabila en fin mandat. Dans un pays « sous-continent » aux infrastructures déficitaires, recenser la population reste une laborieuse opération devant aller jusqu’à cinq ans, Financièrement, le pari n’est pas aussi facile à relever d’autant plus qu’il faut mobiliser un demi-milliard de dollars pour ces opérations, selon les estimations de l’ONIP. Avec un processus électoral qui exigent un milliard et demi de dollars, d’aucuns se demandent comment le gouvernement, qui gère un budget national annuel de 9 milliards de dollars, devrait supporter ce coût, même s’il faudrait compter avec l’appui de la «communauté internationale». Le désistement de la RDC à organiser la Coupe d’Afrique des Nations U23 en décembre 2015 est une des preuves que le gouvernement est confronté à des difficultés financières.
A tout prendre, plus le temps passe, plus tout le monde aura le temps de savoir si l’ONIP est animé des motivations légitimes ou d’un agenda caché. S’il organise, avant 2016,-le recensement administratif et l’identification de la population, c’est parfait. Au cas contraire, toutes les raisons seraient données à ceux soupçonnent Lumanu et consort de jouer un mauvais jeu.
Par Socrate Nsimba