Renouvellement du mandat de la Monusco : le Conseil de sécurité va voter la Résolution le 26 mars 2015

Mardi 24 mars 2015 - 08:33

Le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (Monusco) arrivant à terme le 31mars 2015 conformément à la Résolution 2147 du 28 mars 2014, le Conseil de sécurité va voter une nouvelle Résolution le 26 mars courant à New York (Etats-Unis) où sont en cours des discussions depuis jeudi 19 mars.

Pour le gouvernement congolais, « le moment est venu pour la RDC d’assumer pleinement ses responsabilités quant à sa sécurité et à celle de ses populations ». A contrario, la Monusco soutient qu’ « il est impératif que la situation, notamment sécuritaire, s'améliore sur le terrain, en particulier à l'Est du pays », avant le retrait complet des 20.000 Casques bleus.

Justifiant l’exigence de Kinshasa, le ministre congolais des Affaires étrangères et de la Coopération internationale a énuméré jeudi les acquis de la coopération RDC- Monusco :

- un Etat qui fonctionne et dont l'autorité s'exerce effectivement sur la quasi-totalité du territoire national;

- des institutions légitimes et efficaces, comme en témoignent nos performances économiques: une croissance du PIB de 9,5% en 2014 et qui, de l'avis des institutions crédibles comme le FMI, pourrait atteindre 10,5% en 2015;

-un taux d'inflation proche de zéro; un taux de change de la monnaie nationale stable; des réserves internationales et des investissements directs étrangers en constante augmentation;

-la mise en œuvre de plusieurs réformes importantes, au point d'être classe l'un des dix pays les plus réformateurs au monde par la Banque mondiale;

- la réhabilitation ou la construction, en moins de cinq ans, de plus d'écoles, d'hôpitaux et de kilomètres de routes qu'au cours des cinquante précédentes années;

- une armée en pleine reconstruction, et dont la montée continue en puissance est incontestable, la défaite du M23, la neutralisation quasi-achevée des ADF/NALU et les opérations militaires en cours contre les FDLR en étant une des preuves irréfutables;

- l'instauration de la démocratie, avec l'organisation des premières élections réellement libres et démocratiques de notre histoire en 2006, l'organisation des élections législatives et présidentielles à terme échu en 2011, la mise en œuvre effective de la décentralisation et l'organisation programmée des élections locales, municipales, urbaines, provinciales, sénatoriales, législatives et présidentielle en 2015 et 2016.
« Au vu de cette énumération non exhaustive, tout observateur objectif se doit de reconnaitre qu'un travail énorme a été réalisé. La RDC estime cependant que le moment est venu pour elle d'assumer pleinement ses responsabilités quant à sa sécurité et à celle de ses populations. Elle plaide donc pour que le Conseil fasse droit à cette aspiration légitime qui est consubstantielle de la notion-même de souveraineté nationale », a argumenté Raymond Tshibanda.

« Ce n'est pas assez », réplique Martin Kobler

Tout en reconnaissant que « la Monusco ne va pas rester éternellement en République démocratique du Congo », le Représentant spécial du Secrétaire général de l’Onu en RDC, Martin Kobler, a proposé une réduction d'effectifs pour 2015 avec le retrait de 2 000 hommes, soit environ 10% des troupes.

A son avis, « il est impératif que la situation, notamment sécuritaire, s'améliore sur le terrain, en particulier à l'Est du pays ». Et il en détermine les critères : « Ce sont les déplacés internes. C’est la restitution de l’autorité de l’Etat. C’est la performance de l’armée congolaise, la performance de la politique nationale congolaise ».

« Est-ce qu’ils sont dans une position de garantir la sécurité du peuple à l’Est du pays ? Jusqu’à maintenant, ce n’est pas le cas dans tout le territoire et c’est ce qu’on doit discuter parce que c’est important de ne pas laisser un pays fragile derrière nous », soutient Martin Kobler.

Selon une source citée par RFI, « l'ONU et le gouvernement de la République démocratique du Congo annoncent qu'ils vont mener à parti de lundi des discussions à Kinshasa pour aplanir leurs différends ».

Résolution 2147 du Conseil de sécurité

Le Conseil de sécurité a décidé, ce matin (28 mars 2014), de proroger jusqu’au 31 mars 2015 le mandat de la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (MONUSCO) et, à titre exceptionnel et sans créer de précédent ni sans préjudice des principes convenus du maintien de la paix, de sa Brigade d’intervention, dans les limites de l’effectif maximum autorisé de 19 815 militaires, 760 observateurs militaires et officiers d’état-major, 391 policiers et 1 050 membres d’unités de police constituées.

Par la résolution 2147 (2014), le Conseil décide également que les reconfigurations futures de la MONUSCO et de son mandat seront fonction de l’évolution de la situation sur le terrain. Il demande ainsi à la MONUSCO de continuer à travailler avec l’équipe de pays des Nations Unies et les autorités de la République démocratique du Congo (RDC) en vue de l’adoption et de la mise en œuvre du programme de consolidation de la paix dans les provinces non touchées par le conflit.

Le Conseil de sécurité exhorte également les États signataires de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération pour assurer la stabilité à long terme de l’est de la République démocratique du Congo et de la région, à continuer à s’acquitter de bonne foi, intégralement et rapidement de leurs engagements.

Il exige, en outre, que les FDLR, les ADF, la LRA, les Bakata-Katanga et les divers groupes Maï-Maï mettent immédiatement fin à toutes les formes de violence et d’activités déstabilisatrices et que leurs membres soient démobilisés immédiatement et de façon permanente, déposent les armes et démobilisent les enfants qui se trouvent dans leurs rangs.

Le Gouvernement de la RDC devra mettre en place et appliquer d’urgence des plans complets de désarmement, démobilisation et réintégration, et de désarmement, démobilisation, réintégration et réinsertion ou rapatriement, afin de pouvoir traiter efficacement le cas des ex-combattants.

Enfin, toujours en vertu de la résolution, le Conseil de sécurité demande à tous les acteurs de redoubler d’efforts pour lutter contre l’impunité qui entoure les violences sexuelles liées au conflit, de fournir tous les services nécessaires aux rescapés et de faire en sorte que les femmes participent pleinement et sur un pied d’égalité à l’application de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération et à tous les stades du règlement des conflits, de la reconstruction et de la promotion de la paix.

Réactions

Après l’adoption de la résolution 2147 (2014), le représentant du Rwanda, M. Eugène Richard Gasana, a souhaité que le renouvellement de mandat de la MONUSCO et de la Brigade d’intervention puisse leur permettre de neutraliser les forces rebelles qui écument l’est de la RDC, en particulier les Forces démocratiques de libération du Rwanda (FDLR) qui continuent de causer des souffrances aux populations de la RDC et du Rwanda.

Il a rappelé que ces FDLR comprenaient des éléments qui avaient participé au génocide rwandais de 1994, et que ces rebelles continuaient d’utiliser des enfants soldats. Ils sont également responsables d’attentats dans des lieux publics au Rwanda, a-t-il ajouté.

L’Ambassadeur itinérant du Président de la RDC, M. Séraphin Ngwej, a tempéré ces inquiétudes en assurant que son gouvernement poursuivait sa lutte contre « les forces négatives ».

Il a expliqué qu’après avoir défait le M23, le Gouvernement congolais ciblait désormais les autres groupes rebelles tels que les FDLR, les Forces démocratiques alliées-Armée nationale de libération de l’Ouganda (ADF-NALU) ou encore l’Armée de résistance du Seigneur (LRA).

Se félicitant de l’adoption de la résolution 2147 (2014), qui renouvelle le mandat de la MONUSCO et de la Brigade d’intervention, M. Ngwej a souligné que la Brigade d’intervention était une unité qui « joue un rôle efficace et louable aux côtés des Forces armées de la République démocratique du Congo (FARDC) pour l’affirmation de la souveraineté et de l’intégrité territoriale du pays ».

Il a en outre souligné que le Gouvernement de la RDC se préparait à remplacer la Brigade d’intervention à l’expiration de son mandat par la force de réaction rapide dont la formation est déjà engagée.

Il a rappelé qu’un mini sommet de la Conférence internationale sur la région des Grands Lacs (CIGLR) avait eu lieu à Luanda, en Angola, le 25 mars dernier, au cours duquel les participants avaient lancé un appel pressant aux groupes rebelles pour qu’ils profitent de l’ouverture politique pour engager un dialogue et participer au processus de paix plus large.

Il s’est ainsi félicité de la promulgation, le 11 février 2014, par le Président de la RDC, M. Joseph Kabila, d’une loi qui amnistie « les faits d’insurrection, les faits de guerre et les délits politiques commis sur le territoire de la RDC entre le 18 février 2006 et le 20 décembre 2013 ».

Il a par ailleurs annoncé qu’un programme de désarmement, démobilisation et réintégration intitulé « DDR III » avait été élaboré et qu’il était déjà opérationnel dans la province du Nord-Kivu.

Concernant la question des violences sexuelles liées notamment au conflit, le représentant a rappelé que la RDC appliquait une politique de tolérance zéro, comme l’illustrent le « procès de Minova » et la mise en accusation de plusieurs chefs rebelles accusés de viol. Il a par ailleurs assuré que la réforme du secteur de la sécurité était en cours, afin de rendre la défense du territoire national plus efficace et mieux assurer l’autorité de l’État.

M. Ngwej a ensuite invité les signataires de l’Accord-cadre d’Addis-Abeba à respecter leurs engagements. Il a alerté contre le manque de ressources qui sont pourtant essentielles au fonctionnement du Mécanisme conjoint de vérification élargi prescrit par l’Accord-cadre.

Dénonçant l’exploitation illégale des ressources naturelles de la RDC, il a exhorté les pays de la région à mettre en œuvre les principes de la certification des origines des produits exportés. Certains pays de la région, a-t-il accusé, exportent des produits « dont la quantité est sans commune mesure avec les ressources naturelles dont ils disposent ».

Il a enfin plaidé pour que la reconfiguration du mandat de la MONUSCO se fasse de manière prudente afin d’assurer un retrait progressif et ordonné de la Mission.

Pour l’examen de cette question, le Conseil de sécurité était saisi des rapports du Secrétaire général sur la mise en œuvre de l’Accord-cadre pour la paix, la sécurité et la coopération en République démocratique du Congo et dans la région (S/2014/153) et sur la Mission de l’Organisation des Nations Unies pour la stabilisation en République démocratique du Congo (S/2014/157).