Voici un an, une offensive conjointe menée par les forces gouvernementales congolaises et la Brigade africaine d’intervention, intégrée au sein de la Monusco, obligeait les rebelles du M23 à franchir les frontières rwandaise et ougandaise.
Cette victoire militaire, la plus importante jamais obtenue par les FARDC, mettait fin au calvaire de 800.000 personnes déplacées au Nord Kivu et permettait à l’autorité de l’Etat de se rétablir progressivement dans la province.
A la suite de leur défaite militaire, 1678 rebelles furent installés dans un camp de cantonnement en Ouganda et 500 autres au Rwanda. Comme ces combattants avaient emporté leurs armes et leur matériel roulant, leur sort fit l’objet de longs pourparlers avec Kinshasa.
Permettre à 330 ex- combattants déjà amnistiés de regagner le Congo
Les autorités congolaises redoutaient une résurgence de la rébellion et de nouvelles attaques au départ des pays voisins, en dépit de l’accord conclu à Addis Abeba qui prévoyait un rapatriement contrôlé et l’octroi de l’amnistie à un certain nombre de combattants.
Une première étape du rapatriement volontaire vient d’avoir été organisée au départ de l’Ouganda, mais elle s’est accompagnée d’un « couac » inquiétant : quelque 120 ex-rebelles ont embarqué à Entebbe en direction de la RDC et d’après François Muamba, qui coordonne le mécanisme de suivi de l’accord d’Addis Abeba, d’autres vagues de rapatriements pourraient suivre, permettant à quelque 330 ex- combattants déjà amnistiés de regagner le Congo.
Semi fiasco
Cependant, le président du M23, Bertrand Bisimwa, a contesté le caractère volontaire de ce retour au pays, assurant que l’armée ougandaise, en accord avec une délégation congolaise, était arrivée avec des camions devant le camp de Bihanga, et que les ex rebelles auraient résisté à ce rapatriement forcé.
L’opération aurait fait des blessés et peut-être des morts et, surtout, elle a permis à un millier d’hommes de prendre la fuite et de se réfugier dans les collines voisines.
Selon certaines sources contactées sur le terrain, le semi fiasco de cette opération de rapatriement est dû au fait que le colonel Makenga, l’un des chefs militaires du M23, aurait joué « en solo », négociant directement avec Kinshasa les conditions de son rapatriement.
Il aurait obtenu l’amnistie et une réintégration dans l’armée avec son grade, laissant de côté ses alliés, le président du mouvement Bertrand Bisimwa et Innocent Kaina, dit India Queen, l’un des plus redoutables chefs militaires du mouvement, qui se sont sentis floués.
Des interrogations
Cet éclatement de ce qui reste du M23 et la fuite d’un millier de ses éléments pourraient avoir des conséquences sur le plan régional. En effet, on s’interroge toujours sur l’identité réelle des rebelles qui sèment la terreur du côté de Beni, dans le « Grand Nord » du Kivu, procédant à des exécutions capitales et des décapitations en public.
Officiellement, ces actes de terreur sont imputés aux rebelles ougandais, les ADF Nalu, de confession musulmane, mais sur place, les observateurs dénoncent des bandes mafieuses qui s’opposent à une grande offensive des forces gouvernementales et de la Monusco.
Sur le terrain, des enquêteurs ont relevé le fait que certains de ces rebelles s’exprimaient en kinyarwanda (ce qui est aussi le cas de nombreux combattants du M23 ayant été formés au Rwanda).
Par ailleurs, le calme règne toujours dans le camp abritant des ex-M23 au Rwanda, mais des sources onusiennes assurent que 300 d’entre eux auraient disparu dans la nature…
Cette mobilisation des rebelles tutsis est à mettre en parallèle avec l’ultimatum qui pèse sur leurs ennemis jurés, les combattants hutus des FDLR (Forces démocratiques pour la libération du Rwanda) qui, d’ici le 1er janvier prochain, doivent accepter le désarmement volontaire et le cantonnement.
Jusqu’à présent, les combattants hutus, refusant de regagner le Rwanda ou d’être transférés à Kisangani, essaient de gagner du temps, demeurant disponibles pour toutes les aventures…