Mamadi Indoka regrette : « Par manque de producteurs, le cinéma congolais a du mal à exister »

Mercredi 4 mars 2015 - 11:39

Mamadi Indoka, réalisateur congolais qui fait partie de ces jeunes passionnés du cinéma, a créé sa propre société de production qui s’intitule Congo Film Productions. Il a investi dans le matériel professionnel (caméras, lumières, ordinateurs, appareils photos, machinerie), et a autofinancé sept courts métrage et un long métrage. Actif dans son secteur, il partage son temps entre Kinshasa, New York aux Etats-Unis et Luanda en Angola. A travers cet entretien réalisé par Rdc-Society, il nous donne son opinion sur le cinéma congolais.

Comment est née votre passion du cinéma ?
MamadiIndoka : En 2002, j’ai participé au tournage d’un court-métrage à Madrid. J’ai eu le coup de foudre pour cet univers ! J’ai décidé d’en faire mon métier.
Dites-nous, que pensez-vous du cinéma africain et congolais ?
L’imaginaire africain est riche. Sur notre continent, nous savons raconter des histoires. Nous avons des artistes. Nous avons des techniciens, des comédiens. Mais le cinéma africain, surtout congolais, a du mal à exister parce que nous manquons de producteurs. En RDC, il est pratiquement impossible de convaincre quelqu’un d’investir dans un film. Par contre, pour la musique, beaucoup de gens financent. Le gouvernement ne mesure pas combien le cinéma pourrait améliorer l’image de notre pays et donc contribuer à la santé de notre économie. Il n’y en a que pour la musique. Lors du Sommet de la Francophonie, on a organisé « La nuit de la Francophonie », c’est très bien mais il n’y avait que de la musique !
Que pensez-vous du niveau des techniciens et des comédiens en RDC ?
Au Congo, nous avons de bons techniciens et de bons comédiens. Ce qui manque ce sont des productions, qui nous permettraient de découvrir les talents cachés. Prenons le film « Rebelle », la jeune Rachel Mwanza est un pur talent de cinéma, mais si elle n’avait pas participé à ce film, comment aurions-nous pu la connaître ?
Quelle différence voyez-vous entre le jeu des comédiens du Nigéria dont le cinéma est si actif et celui des acteurs congolais ?
Les Nigérians sont tout le temps en train de tourner ! Ils sont expérimentés. Nous, nous avons des acteurs qui ne tournent que tous les cinq ans ! Ils ont le temps d’oublier les normes de leur métier, comment se placer devant la caméra,... Le problème, c’est le nombre de productions trop faible.
Et plus généralement, que pensez-vous du niveau actuel des arts et de la culture en RDC ?
Le niveau est en hausse. Aujourd’hui, malgré tous les problèmes, les jeunes s’intéressent aux arts. Ce qui me dérange, c’est que beaucoup de Congolais pensent que la culture, c’est uniquement la musique... et quelle musique... le Ndombolo !
Que souhaiteriez-vous apporter au cinéma à travers votre œuvre ?
Je veux tout d’abord apporter ma pierre au cinéma congolais, lui permettre de se faire connaître et reconnaître comme un cinéma africain de valeur. Je voudrais aider notre industrie à exister, à se développer, à se professionnaliser. Vous savez, les Nigérians ont commencé à faire des films après nous. On leur reprochait leur mise en scène trop théâtrale, de ne pas respecter les normes cinématographiques, le fait de faire des sketches et non des films... Aujourd’hui, les Nigérians sont les troisièmes producteurs de cinéma du monde, derrière les Américains et les Indiens. L’important, c’est de se lancer, d’y aller et de se donner les moyens, même s’ils sont modestes au début. Il est important pour nous d’avoir notre cinéma, d’exprimer notre imaginaire et de montrer de nous une image dont nous puissions être fiers.
Quels sont vos projets ?
Ils sont nombreux ! Je suis actuellement à la recherche de financiers et de producteurs. Ils sont les bienvenus !

(Onassis Mutombo)