Vingt-cinq ans après, l’adoption de la charte africaine des droits et du bien-être de l’enfant : Accélérons nos efforts pour éliminer les mariages des enfants en Afrique", c’est le thème de la journée de l’enfant africain célébrée hier mardi 16 juin. A Kinshasa, les autorités congolaises ont placé la journée sous le thème : " Tous ensemble pour la déclaration des enfants à l’Etat civil. Tous contre le mariage précoce ".
Le Réseau des éducateurs des enfants et jeunes de la rue (REEJER), en collaboration avec l’ambassade de France en RDC, l’UNICEF et l’Unité de gestion du projet enfants dits de la rue (UGP/EDR) ont organisé une conférence de presse en la salle de réunion de la paroisse Christ-Roi, à Kasa-Vubu. Une occasion pour le ministre provincial de la population et sécurité de lancer la campagne de sensibilisation pour l’enregistrement des enfants à l’Etat civil.
Le ministre provincial de la population et sécurité, Emmanuel Akweti, a lancé hier la campagne de sensibilisation pour l’enregistrement des enfants à l’Etat civil. Il a invité tous les parents à se présenter au bureau de l’Etat civil de leur milieu de résidence pour l’enregistrement de leurs enfants dans les 90 jours après leurs naissances.
Pour le Président du Conseil d’Administration du REEJER, la question de la déclaration des enfants à l’Etat civil devra effectivement être une préoccupation de tous. " Chacun de nous a, d’une façon ou d’une autre, une part de responsabilité dans les violations comme dans la protection ou promotion des droits des enfants. C’est dans ce cadre que le REEJER et ses partenaires ont réalisé un projet de déclaration à l’Etat civil des enfants réunifiés avec leurs familles », a-t-il indiqué.
Ainsi, a fait savoir le PCA du REEJER, les normes nationales et internationales disposent que chaque enfant a le droit d’être déclaré dès la naissance. A ce jour, de nombreux enfants des familles pauvres sont victimes de discrimination parce qu’ils ne sont pas reconnus par l’Etat congolais qui leur doit protection devant une multitude de faits, simplement parce qu’ils ne sont pas enregistrés à l’Etat civil.
Il est impossible de prouver leur âge, ni leur identité. Ils ne bénéficient d’aucune protection, si élémentaire soit elle, contre les abus et exploitations, a-t-il déploré. " La protection minimale conférée par l’acte de naissance contre notamment le mariage précoce constitue un défi à relever ", a martelé le PCA de ce réseau d’éducateurs.
Aux dires de Roger Mafolo, la RDC fait partie des dix pays au taux d’enregistrement des naissances le plus bas avec seulement 28% (MICS 2010). D’après l’intervenant, ce faible taux d’enregistrement est la conséquence de nombreux facteurs. Le pays dispose de seulement 1200 principaux bureaux d’état civil pour 2.345.410 Km² soit en moyenne un bureau pour 1.952 Km², l’accessibilité de certaines zones demeure difficile, les capacités des fonctionnaires de l’état civil sont limitées et la population ne témoigne pas suffisamment d’intérêt à l’enregistrement des naissances, souligne-t-il. A cela s’ajoute l’ignorance des lois, notamment la loi portant protection de l’enfant et autres textes légaux importants qui protègent l’enfant.
CONSEQUENCES DU NON ENREGISTREMENT DES ENFANTS
Le président du tribunal pour enfant, Serge Kashama Ngoy, a mis l’accent sur les conséquences que les parents courent quand ils ne respectent pas le délai de 90 jours accordés par le gouvernement. Au-delà de 90 jours, les parents seront obligés de se présenter au tribunal pour se justifier sur le retard qu’ils ont connu pour enregistrer leurs enfants à l’état civil.
" Ne pas déclarer la naissance de son enfant dans le délai est une infraction, a précisé ce juriste. Il y a des amendes à payer et sept jours de prison ». Selon ses dires, ouvrir un dossier judiciaire implique le paiement des frais. Serge Kashama invite alors les parents à capitaliser cette offre du gouvernement pour enregistrer les enfants gratuitement à l’état civil afin d’éviter les procédures d’obtention de jugement supplétif.
OFFRIR 5000 ACTES DE NAISSANCES
Le projet d’appui à la réinsertion socio-économique des enfants dits de la rue grâce à la réhabilitation de leur sécurité juridique est financé par l’ambassade de la République française en RDC, appuyées par la Banque mondiale et les autres partenaires.
Pour le coordonateur du REEJER, Denis Mabwa , ce projet a pour objectifs de mobiliser la communauté locale autour de la problématique de la promotion, de la protection et du respect des droits des enfants. Il permettra, par ailleurs, d’ offrir 5.000 actes de naissances aux enfants et jeunes réunifiés par les structures du REEJER, de sensibiliser plus de 10. 000 familles de la ville de Kinshasa sur l’importance de la déclaration de naissance à l’état civil.
Plusieurs activités seront réalisées durant ce projet. Denis Mabwa note, dans un premier temps, l’identification des enfants bénéficiaires par les travailleurs sociaux et volontaires communautaires, la formation des sensibilisateurs sur les démarches à réaliser pour enregistrer son enfant, la sensibilisation des populations à l’importance de l’enregistrement des naissances, les procédures administratives et judiciaire afin d’obtenir les actes de naissance.
La protection de l’enfant est l’affaire de tous. Pour ce faire, le coordonateur de ce projet invite tout le monde à lutter contre l’ignorance de textes de lois, la méfiance envers les services de l’état et l’impunité dans la communauté. " Luttons tous pour que l’article 48 de la loi portant protection de l’enfant devienne une réalité à Kinshasa comme dans toute la RDC ", a conclu Denis Mabwa. Mathy MUSAU