L’heure du bilan va bientôt sonner pour les Exécutifs provinciaux de la RD Congo avec la tenue, dans les prochains mois, des élections à la base et des gouverneurs. Avant ce moment de vérité, l’état actuel de Kinshasa interpelle et met à nu une gouvernance déficiente d’une métropole à plus de 10 millions d’habitants.
L’image de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo (RDC), n’est pas reluisante en 2015. Pour tout observateur rigoureux, averti, critique, sérieux et objectif, l’état actuel de la ville de Kinshasa est le fait de tout sauf d’une bonne gouvernance. C’est le moins qu’on puisse dire quand on sait que ce constat est fait, non pas au début d’une mandature, plutôt à sa fin.
La Commission électorale nationale indépendante (CENI) prépare la tenue des élections locales, municipales, urbaines, provinciale et des gouverneurs pour renouveler les dirigeants des provinces.
Que deviendrait Kinshasa aujourd’hui sans les quelques infrastructures, tout de même de haute facture, que le gouvernement central a pu financer ? Les boulevards du 30 juin, Lumumba, Tshatshi, Trionphal ; les avenues Pierre Mulele (ex-24 novembre) et Poids lourd ; l’hôpital du cinquantenaire ; la nouvelle aérogare modulaire de l’aéroport international de N’djili, le nouvel hôtel du gouvernement ; sont des rares réalisations notables du gouvernement central de ces 8 dernières années au bénéfice de la capitale.
A coté de ces ouvrages, l’ex Léopoldville a bénéficié également des réalisations des opérateurs économiques privés dont la construction des quelques cités modernes disséminées à travers la capitale et des immeubles de bureau notamment à Gombe, le centre ville.
L’image de Kinshasa de mal en pie
A part ces réalisations, que l’Exécutif national souligne, chaque fois, qu’ils ont été financés sur fonds propres de la République et celles des particuliers, rien de consistant n’a été entrepris par la province elle-même.
Certes, comme toutes les provinces de la RDC, Kinshasa ne s’est pas vu rétrocéder du gouvernement central, conformément au principe, consacré dans la constitution, de la retenue à la source des 40% des recettes. Il n’en demeure pas moins que la gouvernance de la plus grande ville de la RDC semble, tout compte fait, déficiente au regard des ressources financières typiquement provinciales qu’elle est censée gérer à 100%.
Les Kinois n’ont jamais demandé aux décideurs de la province de construire des grattes ciels et autres autoroutes mais seulement de gérer leur ville selon les règles modernes de bonne gouvernance, de transparence et de redevabilité. Le développement même d’une ville impose obligatoirement l’ordre et l’organisation.
A scruter de près l’état de la capitale présentement, tout laisse croire que l’Exécutif provincial a jeté l’éponge avant même que les nouveaux candidats aux destinées de cette métropole ne commencent la campagne électorale.
En effet, depuis la tenue du sommet de la francophonie en novembre 2012, les chantiers de construction et de réfections des infrastructures se sont raréfiés. Et certains travaux qui n’ont pas pu être achevés avant cette conférence sont restés en l’état depuis. C’est le cas du tronçon de la route By Pass entre l’Echangeur de Limeté et Mont Ngafula.
Outre cette route essentielle, plusieurs avenues de la ville sont depuis quelques années restées défectueuses, ternissant l’image de Kinshasa. L’avenue du Commerce et toutes les autres rues de ses environs, l’avenue Bokasa, toutes les avenues secondaires du centre ville à Gombe, Flambeau, l’avenue des Universités, avenue Gambela, la route de Kimwenza et bien de rues importantes dans les communes de Kalamu, Lemba, Matete, Selembao, pour ne citer que ces communes là, sont dans un états d’abandon depuis plusieurs mois.
Il n’y a plus des grands chantiers de réfection ou de construction des routes principales ou secondaires à Kinshasa. Si pour ces infrastructures routières l’Exécutif provincial se défendrait par la modicité du montant de rétrocession de ses recettes par le gouvernement central, il y a bien des charges qui lui incombe mais qui ne sont pas pris en compte.
Tout de même, Kinshasa, comme toute province de la RDC, a sa régie chargée de recettes publicitaires ; sa taxe scolaire pour chaque enfant; sa taxe sur chaque table des marchés disséminés dans les communes ; ses espaces funéraires ; sa campagne de vignettes auto, moto, vélo, bateau, pirogue ; sa régie chargée des questions de salubrité ; ect. Toutes ces taxes devraient assurer au retour aux assujettis des services de qualité. Que nenni.
Kinshasa mérite mieux
Le constat est que tous ceux qui paient ces taxes ont en retour un service, si pas inexistant, souvent au rabais. Les automobilistes circulent sur des routes défoncées et généralement détruites par l’eau stagnante des caniveaux bouchés. Les écoliers n’étudient pas toujours dans des bonnes conditions.
Les parkings publics, les marchés ne sont pas toujours propres comme on le voit dans toutes les capitales africaines.
Pire, la « kinoiserie » se développe à sa guise à Kinshasa sans que l’autorité recadre les choses. Chacun organise ses manifestations funéraires comme il l’entend mais toujours avec la bénédiction de l’autorité municipale. Les tapages nocturnes et diurnes sont devenus la règle alors qu’il existe une loi les réglementant.
Même au centre ville, tout le monde se permet de régler à sa guise les décibels de son mégaphone ou de sa sono. Poussé par le délestage, chaque commerçant met son générateur au diesel (groupe électrogène) n’importe où. Des quartiers d’ambiance naissent du jour au lendemain à coté des centres de santé des écoles et université, bien entendu avec la bénédiction des bourgmestres.
Qu’en est-il de la décision de l’Hôtel de ville de Kinshasa de repeindre les taxis et bus de la capitale aux couleurs du drapeau national ? Cette disposition légale est aujourd’hui piétinée par les conducteurs de véhicule de taxi et bus juste par manque de suivi de l’autorité.
Réguler toute cette anarchie ne demande pas des millions de dollars mais simplement une volonté politique des autorités de la ville. Kinshasa, c’est tout de même le miroir de la RDC. Le brouhaha dans lequel des générations entières vivent n’est pas acceptable et est loin de faire de la capitale congolaise un « vivier de la citoyenneté » comme le voudrait le programme de la « Révolution de la modernité » cher au président de la République.
Pour renverser cette descente aux enfers, les nouvelles autorités de la ville devront s’armer d’une bonne dose d’inventivité. Etant la première ville économique de la RDC, Kinshasa a beaucoup d’atouts.
Avec ses 10 à 12 millions d’habitants, sa jeunesse instruite et dynamique, la capitale congolaise devraient rentabiliser ces avantages comparatifs par une simple rationalité managériale des décideurs de la ville.