Poursuivi pour viol, le comédien congolais Saï-Saï Fiston Mafinga a été acquitté vendredi 20 mars 2015 de l’infraction de viol sur mineure et renvoyé de fin des poursuites. Le verdict a été accueilli par des dizaines de ses fanatiques agglutinés à l’intérieur et devant le Palais de justice de Kinshasa, dans la commune de la Gombe où l’un de ses avocats a été porté en triomphe.
A partir de 16h30 (15h30 TU), le tribunal de Grande instance de Kinshasa/Gombe, statuant au pénal dans l’affaire qui opposait le Ministère public et la partie civile Ketia Etiti Moto au prévenu Fiston Mafinga alias Saï-Saï pour le viol de Mlle Feza Etiti Moto, venait dans le prononcé de jugement de dire non fondée l’infraction de viol. Par conséquent, il en a acquitté Saï-Saï et l’a renvoyé des fins de toutes poursuites.
Concernant l’action de la partie civile qui réclamait 100 000 dollars américains de dommages et intérêts, le tribunal a relevé qu’elle est subordonnée à l’existence du délit. Par conséquent, il l’a déclarée non fondée.
C’est à 19h00 juste que cette idole des filles et des garçons, amoureux du rire, a quitté l’enceinte de la Prison centrale de Makala à bord du véhicule du directeur de cette maison carcérale.
Absence de preuves
En motivant le jugement, le tribunal a dit que « la preuve doit être recherchée », c’est-à-dire que le Ministère public se doit de la rechercher. Or, ni le Ministère public ni la partie civile n’ont déféré les autres quatre auteurs présumés de ce viol devant le tribunal.
En plus, à la date présentée comme celle du viol, la ville de Kinshasa était en effervescence. Bien plus, les serveurs de la terrasse mentionnée par la victime n’y ont pas vu Saï-Saï cette nuit-là.
Par ailleurs, la victime a soutenu que le violeur l’a appelé entre 22h00 et 01h00 : ce qui ne figure pas dans les relevés téléphoniques de la société Vodacom.
Le tribunal s’est aussi basé sur la contre-expertise du médecin légiste Tshomba qui a affirmé qu’anatomiquement et physiologiquement, la fille ne pouvait pas subir l’assaut de cinq hommes de 22h00 à 01h00 avec la position debout comme elle l’a allégué.
Ainsi, le tribunal a conclu qu’« il n’y a pas eu de rapport entre cette fille et Saï-Saï à cette date-là », après avoir fait remarquer que « même l’officier de police judiciaire Kambaji, qui a fait la reconstitution des faits sur ce tunnel de la commune de Bandalungwa, a démontré qu’un viol énorme ne pouvait pas s’y commettre à cette date-là ».
C’est aussi l’avis des habitants du quartier qui logent le long du tunnel présenté par la fille comme lieu où ce viol massif aurait été commis. En effet, les femmes et les filles de ces environs sont restées catégoriques en déclarant qu’« il y avait une circulation intense qui ne pouvait pas permettre un tel viol ». Ce qui contredit la fille qui affirme avoir été « violée dans ce tunnel ».
Les faits
Les plaidoiries dans cette affaire ont eu lieu le jeudi 5 mars 2015. C’est la partie civile qui a donné le ton en s’adressant ainsi aux juges : « Malgré les interférences politiques, le Ministère public n’a pas cédé, et nous espérons qu’il en sera de même pour vous ». L’un de ses conseils a narré les faits en ces termes :
Dans la nuit du lundi 26 au mardi 27 janvier 2015, Mlle Feza a été interceptée par un certain Kilit qui lui a dit en ces termes : « Je suis avec le président Saï-Saï dans la terrasse en face. Il vous appelle pour le tournage d’une séquence de publicité ».
Cette dernière est venue informer sa mère qui s’y est opposée. Mais comme toutes les filles de son âge, elle est quand même partie. Mais, quand ils sont arrivés à la terrasse, Saï-Saï était à bord de sa voiture en compagnie de ses amis. Ils ont démarré, et la fille a été obligée de les suivre à pied.
Arrivés à Bandal-Moulaert, Saï-Saï a dit à la fille : « Je voudrais que tes pertes blanches soient mélangées à mes spermatozoïdes ». La fille a dit non. Il lui a alors proposé de faire cela avec son copain, mais elle a encore opposé son refus.
C’est ainsi qu’il a appelé un certain numéro, et son correspondant lui a dit : « Amenez-là à l’endroit indiqué ». Chemin faisant, on s’est mis à donner des coups à la fille jusqu’au lieu du drame qui est un tunnel.
Le premier à entrer en action a été Saï-Saï qui était muni d’un préservatif. Le deuxième a aussi utilisé un préservatif. Mais, les trois derniers violeurs étaient sans protection.
Leur forfait accompli, l’un des violeurs, le nommé Kilit, l’a raccompagnée jusqu’à l’endroit baptisé « Bloc ». Là, elle s’est retrouvée avec des « shégués » qui l’ont ramenée à la maison vers 01h30. Elle a raconté à sa grande sœur tout ce qui lui était arrivé. Le dossier est arrivé à la police qui a dressé un mandat d’amener.
Quand son ami, qui travaille dans une boîte de nuit sur le boulevard du 30 Juin, a eu vent de l’affaire, il a appelé Saï-Saï. Là, le comédien a tenu à voir l’agent de police en question ainsi que la victime. Mais, comme ce policier n’avait pas de mandat, il a appelé la famille de la fille.
Les voyant, Saï-Saï a ainsi réagi : « Il y va de mon intérêt et du vôtre que nous négocions ce dossier à l’amiable ». C’est dans ces circonstances qu’ils se sont transportés à la police.
Quand le dossier est arrivé au Parquet, l’officier du Ministère public a établi une réquisition à médecin le 31 février 2015. Et c’est l’avocat du prévenu qui est venu chercher la victime pour l’amener à l’hôpital de Kintambo. Ici, le conseil de la partie civile souligne : « Le médecin prélève le sang, prend les urines et va faire le rapport médical. Peut-on faire un examen gynécologique à travers les urines et le sang ? ».
Après avoir fait remarquer que la victime ne peut plus rester à Bandalungwa, parce que le prévenu est un acteur de Bandalungwa, l’avocat a déclaré que « le préjudice est énorme pour la sécurité de la fille et de sa famille ». C’est la raison pour laquelle il a demandé au tribunal de condamner Saï-Saï au paiement des dommages et intérêts en francs congolais d’une valeur de 100 000 dollars américains, et de prendre une décision qui va servir de leçon.
Son tour venu, le Ministère public a fait siennes les plaidoiries de la partie civile. Et dans ses réquisitions, il a demandé au tribunal de condamner le prévenu à 20 ans de servitude pénale principale, au paiement de 1 million de francs congolais d’amende et aux frais d’instance.
Saï-Saï plaide non coupable
Saï-Saï, à travers ses conseils, a plaidé non coupable. Selon eux, « tout cela n’est qu’un tissu de mensonges ».
D’abord, Saï-Saï n’a jamais été cette nuit-là dans la prétendue terrasse. Ensuite, dès que la fille a commencé à être violée à 22h00 tel qu’elle le prétend, Saï-Saï était en train d’organiser la fête d’anniversaire de sa fille, entouré de sa famille et de ses amis. Il n’est sorti qu’à 23h00 pour aller au dancing « Galaxy » de la commune de la Gombe sur l’avenue du 24 Novembre.
Ils ont aussi relevé que cette fille a présenté trois âges différents dans son certificat de naissance, chez Vodacom et à l’Institut de Gombele où elle s’était faite inscrire, école où elle n’a jamais étudié après avoir pris l’inscription.
Autre élément brandi par la défense : aucune maternité ne mentionne le nom du nouveau-né sur le certificat de naissance, mais plutôt celui de la mère, la date, le poids et le sexe de l’enfant. Ces avocats ont présenté les photos de cette fille en train de danser dans une boîte de nuit.
Bref, ont-ils soutenu, « c’est une majeure de 21 ans qui sait monter des coups avec ses complices comme celui dirigé contre Saï-Saï : il n’y a jamais eu viol ».