Au moment où les Congolais étaient encore en train de se demander si le ciel ne leur était pas tombé sur la tête avec les assassinats coup sur coup et en l’espace de trois mois des généraux Mamadou NDALA et Jean-Lucien BAHUMA, voilà que des villageois habitant dans la périphérie de Beni ont été égorgés comme des moutons par des hommes supposés appartenir aux rebelles ougandais de l’ADF-Nalu. En une semaine, le bilan a été des plus dramatiques : 80 personnes, tous sexes et âges confondus, ont été exécutés à l’arme blanche pendant la nuit. Elles n’ont bénéficié ni de la moindre protection, ni d’un quelconque secours.
A Beni et dans tout le Nord-Kivu, c’est le choc. La population réalise brutalement que la paix reste un horizon lointain pour cette partie du pays. Quand des individus surgissent sur vos terres et ôtent la vie aux habitants sans rencontrer la moindre résistance, le message est clair : la République n’est pas encore maîtresse de son destin. Comment peut-on en effet interpréter autrement les choses quand la zone dans laquelle les massacres se multiplient est précisément celle où opèrent de nombreuses forces ?
Si la persistance de l’insécurité dans ce territoire de Beni inquiète, c’est parce qu’à la faveur de l’Accord-Cadre d’AddisAbeba et la Résolution 2098 du Conseil de Sécurité de l’ONU, la Communauté Internationale avait lancé un message fort doublé d’un avertissement sévère à tous ceux qui s’aventureraient encore à effectuer des randonnées guerrières sur l’espace terrestre congolais. Ce message s’adressait tant aux forces régulières provenant des Etats voisins que des milices rebelles étrangères et locales. La mise sur pied d’une Brigade spéciale d’intervention, une force dissuasive sur laquelle les Congolais avaient placé maints espoirs était intervenue dans une perspective d’imposer la paix à tous les seigneurs de guerre.
Mais les événements qui se déroulent aujourd’hui dans le grand Nord nous indiquent que le Kivu n’a pas encore pris le chemin de la paix. Il est difficile dans cette région de faire des projections sur l’avenir, tant celui-ci continue de ressembler désespérément à un fantôme aux mains vides, qui promet tout mais qui n’a toujours rien.
Dans le grand Nord, les gens meurent comme des mouches. Quelles que soient les raisons que les uns et les autres pourront avancer pour justifier l’absence d’assistance à une population en perpétuel danger, il y a lieu de souligner aujourd’hui que ce qui se joue sur le terrain, c’est désormais la crédibilité des troupes engagées sur différents fronts. Qu’elles soient onusiennes ou congolaises, il faudrait qu’on nous explique leur raison d’être et l’utilité des actions qu’elles mènent. Personne ne veut des forces qui ne protègent ni le pays ni son peuple. Il est temps qu’on s’en rende compte et qu’on réagisse avec vigueur.
F.M.