Le ministre des Médias et porte-parole du gouvernement, Lambert Mende, a affirmé que les enquêtes sont en cours pour élucider l’affaire de la fosse commune découverte à Maluku, dans la périphérie Est de la ville de Kinshasa. Il s’est exprimé jeudi 9 avril, lors d’un point de presse à Kinshasa. D’après lui, 421 corps ont été enterrés le 19 mars denier au cimetière de Fula-Fula dans la commune de Maluku et non 425 comme annoncé avant.
«L’enquête est en train de se dérouler. Une enquête ne peut pas être limitée, surtout par un ministre. Ce n’est pas un ministre qui mène des enquêtes, c’est une enquête judiciaire. C’est le Procureur général de la République qui a commis des magistrats au nom de l’unité de l’action judiciaire (…)», a déclaré Lambert Mende.
Le vice-Premier ministre et ministre belge des Affaires étrangères, Didier Reynders avait exigé la veille une enquête indépendante, soulignant que cette découverte « pose de très nombreuses questions auxquelles la population congolaise et la Communauté internationale sont en droit d’attendre des réponses ». Il avait aussi préconisé la protection du site.
Lambert Mende a indiqué que le site de la fosse commune est sécurisé depuis le début de l’enquête judiciaire initié par le procureur général de la République.
S’agissant de l’exhumation ou pas des corps, le porte-parole du gouvernement congolais a souligné que seuls les enquêteurs peuvent décider sur cette question « si cela peut conduire à la vérité ».
«L’exhumation est un devoir si le magistrat estime qu’on peut exhumer. Personne ne donnera des ordres aux enquêteurs parce que nous ne laisserons personne dicter sa loi à notre justice qui est indépendante», a-t-il estimé.
Il a relevé également que la réglementation des services en charge des funérailles et sépultures de la RDC entend par «personnes indigentes», les dépouilles trouvées par les services sociaux et la police, mais dont ni l’identité, ni les liens de parenté ne sont établis.
«C’est le cas des 57 corps de personnes non identifiées inhumées sur le site de Maluku. Une liste disponible est à l’hôtel de ville. Elle reprend, le numéro de réception, le sexe, l’âge, la provenance et la date d’admission à la morgue centrale de Kinshasa», a détaillé M. Mende qui a lui aussi refuté les allégations selon lesquelles les corps inhumés seraient ceux des victimes des émeutes de janvier à Kinshasa contre la loi électorale:
«Le bilan de ces événements est connu : 27 morts. Même les sources les plus mal intentionnées n’ont pas dénombré 421 morts en janvier dernier. Ceux qui s’adonnent à cet amalgame tentent simplement d’alimenter inutilement l’affabulation», a-t-il rappelé.
Il a en enfin dénoncé une “surenchère médiatique” autour de cette affaire pour, d’après lui, «jeter l’anathème sur les dirigeants actuels de la RDC».
« Une enquête indépendante »
L’opposition politique pour sa part exige du gouvernement une enquête crédible et indépendante pour éclairer l’opinion sur ce dossier.
« Nous exigeons au gouvernement de rendre public les identités des personnes enterrées en vrac. Nous voudrions qu’il y ait une enquête internationale indépendante pour identifier les disparus », a affirmé jeudi José Makila, président du parti d’opposition Alliance des travaillistes démocrates (ATD). Il pense que ces personnes « sont des disparus dans les événements de janvier dernier ».
« Nous pensons que ce sont nos compatriotes qui ont eu des balles qui ont été enterrés de cette manière là. Et il n’y a aucune loi qui autorise le gouvernement d’enterrer les gens en vrac », a ajouté José Makila.
Les enquêtes faites dans les normes
Le procureur près le Tribunal de paix de Kinkole, Ghislain Mwehu Kahozi a indiqué jeudi que le Procureur général de la République a déjà diligenté une enquête judiciaire qui se déroule « dans les normes ».
«Les enquêtes sont faites dans les normes et le respect strict de la loi comme le veut la procédure pénale», a-t-il dit à l’issue d’une réunion entre le Procureur général de la République et tous les services de sécurité et du parquet notamment l’auditeur général des FARDC, le commissaire général de la police, l’administrateur général de l’Agence nationale de renseignements (ANR), le commissaire général adjoint en charge de la police judiciaire ainsi que la police scientifique.
«A notre niveau, nous avons ouvert un dossier et nous avons procédé aux auditions éventuelles. Nous avons effectué plus d’une descente avec ceux des Nations unies et d’autres organismes qui sont venus pour enquêter sur les faits», affirme Ghislain Mwahu.
Il a demandé au Bureau conjoint des Nations unies pour les droits de l’homme (BCNUDH) « qui a eu à porter à la connaissance de l’autorité qu’il existerait des victimes de venir et que nous prenions leurs déclarations ».
«Les victimes qui sont à la recherche de l’un des leurs, prière les informer qu’il existe un dossier judiciaire. Elles peuvent venir et en ce moment là nous prendrons leurs déclarations. Toute personne qui est intervenue sera appelée à être entendue», a ajouté Ghislain Mwehu.