ABSENCE DES MAISONS D’ARRETS Des détenus préventifs revendiquent leurs droits

Vendredi 20 mars 2015 - 09:00

Passer leurs séjours de détention préventive à la prison centrale de Makala est un calvaire pour les détenus préventifs. Qui, se plaignent des conditions dans lesquelles ils y vivent. Alors qu’elles seraient assez mieux si jamais ils étaient gardés dans des maisons d’arrêt, comme le veut la loi. Lesquelles ne sont jamais érigées.

Garder les détenus préventifs dans cette prison, viole leurs droits à la fois au meilleur accès des soins médicaux, à une bonne alimentation et un hebergement décent. Mais rend également hyppothetique leur sort, en ce sens que d’une part, les magistrats qui traitent leurs dossier arrivent à les oublier, d’autre part, ils sont abandonnés par leurs familles, qui ne savent leur rendre visite du fait notamment, des tracasseries des agents pénitentaires.
« En tant que détenu préventif, je n’ai pas ici les mêmes droits que les condamnés qui, nous arrivent à nous priver souvent la nourriture, parce que disent-ils, étant en détention préventive, nous sommes appelés probablement à être libérés incessamment. Mais pour eux, les dés sont déjà jetés, ils y doivent passer beaucoup des temps ou peut être le reste de leur vie. Et pour ce faire, ils sont sensés avoir plus des avantages que nous », confie un détenu préventif à la prison centrale de Makala. « Moi par exemple, j’ai quatre mois ici, je passe nuit à même le sol, le peu des mousses qui sont dans notre pavillon, les condamnés s’en sont appropriés au détriment des détenus préventifs», ajoute-t-il.

Oubliés par les magistrats
En fait, la loi sur la procédure pénale veut qu’à l’expiration de cinq jours de mandat d’arrêt provisoire émis par le magistrat que ce dernier, présente l’inculpé devant le juge de la chambre du conseil (le juge qui ordonne ou prolonge la détention préventive). C’est ainsi qu’à l’expiration de ce délai, à défaut des maisons d’arrêts où doivent en principe être gardés les détenus préventifs, les usages et pratiques judiciaires en R-dCongo veulent que les magistrats transfèrent les détenus en question à la prison centrale de Makala où ils doivent être présentés au juge qui va statuer sur la régularité de leur détention.
Mais une fois transférés dans cette prison, la situation de détenu préventif devient très compliquée, surtout lorsqu’il n’a pas un avocat qui puisse l’assister ou suivre son dossier. «Certains magistrats dès lors qu’ils transfèrent les détenus préventifs dans cette prison, arrivent soit par mauvaise foi, soit par le débordement des dossiers, à oublier même de poursuivre avec les restes de la procédure. C’est-à-dire, de présenter soit, pour la toute première fois (pour qu’il soit ordonnée sa détention préventive ou sa liberté), soit après chaque mois (pour qu’il soit ordonné le prolongement de sa détention ou sa liberté) le détenu devant le juge de la chambre du conseil », fait savoir Me David Kalala.
Pourtant, poursuit cet avocat, si jamais, ils étaient gardés dans une maison d’arrêt, ils seraient facilement en contact avec leurs membres des familles qui, évitent ce milieu (la prison) d’autant plus que, disent-ils, les dispositifs sécuritaires prévus dans cette prison les font craindre, jusqu’à penser qu’en y entrant, ils risquent de plus sortir.
« Tel que je suis, ma famille ne vient presque plus me rendre visite ici à la prison Makala, parce que l’endroit où je me trouve ne les aspire pas confiance, tellement qu’il y a trop des tracasseries de la part des gardes pénitentiaire, beaucoup d’hommes en uniforme qui gardent cette prison. Alors que quand j’étais encore gardé dans la geôle du parquet durant les cinq premiers jours de ma détention, je recevais quant même la visite des mes proches », explique le détenu M.K. Et de poursuivre : « Non seulement que ma famille ne vient plus, mais aussi, le magistrat qui m’a arrêté et envoyé depuis ne m’a jamais présenté devant le juge de la chambre du conseil devant lequel, je pourrais même solliciter ma liberté provisoire. Et il n’y a que lui qui peut envoyer mon dossier devant le juge en question ».

En effet, l’ordonnance 344 du 17 septembre 1965 qui organise les établissements et administration pénitentiaire en R-dCongo, prévoit qu’il doit être établi une prison centrale dans chaque localité où un tribunal de première instance a son siège habituel et une prison de district dans chaque localité où un tribunal de district a son siège habituel, à l’exclusion des localités où est établie une prison centrale (art 5).
Par ailleurs, en son article 6, cette loi prévoit qu’il doit être établi en annexe à chacune des prisons une ou des maisons d’arrêts.

Curieusement, des maisons d’arrêts n’ont jamais été installées jusqu’à ce jour. Ce qui fait que les parquets qui ne savent à leur tour garder des détenus pendant plus de 5 jours et pour des raisons d’exiguïté de ces cellules se trouvent dans l’obligation de les transférer à la prison centrale.

«Lorsque le législateur a séparé les prisons aux maisons d’arrêts, il n’a pas voulu que les prisons soient surpeuplées, ce qui fait que la loi qui organise les fonctionnement des prisons donne même au ministre de la justice le pouvoir de créer en outre des camps de détention dans toutes les localités, soit en vue d’éviter un encombrement des prisons centrales», fait savoir Me Madiata Kula. Qui poursuit que la détermination des personnes à habiter dans les prisons ou maisons d’arrêt fait partie de la volonté du législateur qui à l’article 9 de cette loi stipule que les prisons sont destinées à recevoir les individus condamnés par un jugement définitif (à la peiné de mort, à une peine de servitude pénale principale, à une peine de servitude pénale subsidiaire), les individus mis à la disposition du gouvernement par une décision devenue définitive, les personnes mises à la contrainte par corps.

«Par contre, à l’article 10, le législateur a déterminé les individus que doivent recevoir les maisons d’arrêts à savoir, les individus condamnés d’un jugement non définitif ainsi que les détenus préventifs, les personnes faisant objet d’une garde à vue, en attendant qu’elles puissent être conduites devant l’autorité judiciaire compétente, les personnes faisant l’objet d’un mandat d’amener», poursuit-il.
Ce qui est vrai, l’honneur des détenus préventifs est souvent entamés, dès lors qu’ils sont envoyés à la prison centrale de Makala, en attendant la suite de la procédure. Ils sont aux yeux de la population des considérés comme étant déjà des coupables.
LEON PAMBA