Qui veut aller loin ménage sa monture. Cette maxime populaire s’applique aussi en politique. La présidentielle
de novembre 2016 n’est pas un sprint politique mais un marathon, faut pas s’y lancer trop tôt ou de manière désinvolte au risque de s’essouffler. Chaque mot, chaque geste, chaque rencontre, chaque position compte.
Il faut compter avec les qualités d’endurance et de tactique pour l’emporter sur ses adversaires, connus ou
inconnus, actuels ou futurs. Et ça le gouverneur du Katanga, Moïse Katumbi Chapwe, en bon stratège, l’a déjà
bien assimilé. Il cultive sa particularité politique qui est originale, faite tantôt des coups de gueule quand il le faut mais aussi des coups de cœur quand cela est nécessaire. Katumbi est en mesure à la fois de reconnaitre les mérites du régime Kabila mais aussi d’en dénoncer les travers. Cela sans nourrir aucune animosité vis-à-vis de Kabila. C’est dans ce cadre qu’il fautinterpréter sa dernière sortie médiatique dans la presse internationale (RFI et France 24), hâtivement interpréter comme pro-Kabila, dont le but n’était que de
faire redescendre la tension politique en RD-Congo. Le président du Tout-Puissant est très attaché à la paix civile. Mais ses détracteurs en ont profité pour insinuer un renoncement de ses positions ultérieures fortes sur notamment le respect de la constitution. La manœuvre de ses adversaires visait à refroidir les espoirs des millions des rd-congolais ont placé en lui pour requalifier la gouvernance. Une partie d’entre eux pensent qu’il ferait un bon président de la République. Pour atteindre la présidence, faut-il marcher sur les cadavres des rdcongolais ? La confrontation politique avec Kabila, qui pouvait dégénérer, ne doit pas avoir lieu hic et nunc, ni plus tard car Katumbi est une personnalité éprise de paix. Ne dit-on pas que quand deux éléphants se
battent se sont les herbes tout autour qui en pâtissent ? Katumbi et les siens étaient dans l’œil du cyclone
de la Kabilie, vengeresse, qui ne faisait que resserrer l’étau autour du gouverneur du Katanga et ses proches.
Cette vendetta était mue par la célèbre métaphore de « faux penalties », dans laquelle Katumbi s’est ouvertement prononcé contre un éventuel 3ème mandat de Kabila, et qui reste gravée comme un acte politique majeur, à la fois historique, plein de finesse et surtout courageux, que peu d’hommes politiques peuvent se targuer d’avoir accompli en RD-Congo. Ex-cepté notamment : Etienne Tshisekedi et Vital Kamerhe. La bravoure politique de ces deux personnalités politiques fait l’unanimité. En s’exprimant dans la presse internationale sur « la légitimité du mandat présidentiel », Katumbi a lâché du lest. Il a reculé pour mieux sauter comme dit. Cela lui a valu une avalanche des réactions critiques, chacun voulant tirer le drap de son côté en exploitant la partie de l’interview qui cadre avec ses propres intérêts ou aspirations politiques. Face à la furie de la Kabila suscitée par son allégorie de Noël, Katumbi a donc choisi de jouer la carte de l’évitement. Ne dit-on pas qu’une guerre évitée est une guerre gagnée ! Cette stratégie, de communication notamment, adoptée par
Katumbi, face un ennemi beaucoup plus fort, mais qui va en s’affaiblissant, présente l’avantage d’épargner les
ressources en hommes et en logistiques quitte à préparer une défensive-offensive avec la certitude de remporter la victoire. Le populaire Katumbi cherche à se mettre à l’intersection de tous les fronts contre Kabila, y compris le front qui bouillonne au sein de la MP. Il veut se poser déjà en rassembleur pour qu’aucun courant, y
compris de la Majorité présidentielle, ne soit stigmatisé. Moïse Katumbi n’est donc ni de gauche ni de droite
et encore moins du centre. C’est tout simplement un rassembleur. L’exploitation éhontée de son interview
par ses adversaires avait pour but de le confiner à une famille politique, la MP, afin de l’isoler d’avec d’autres forces sociales et politiques de la RD-Congo. La manœuvre a fait flop car il est difficile de situer Katumbi sur l’échiquier politique national. Pour les uns il est de gauche, pour les autres il est de droite et pour d’autres encore il n’est ni de gauche ni de droite, c’est-à-dire il est du centre. Katumbi en faisant cette interview a choisi sa voie celle du consensus, autant que faire se peut, au lieu du chaos. Le gouverneur du Katanga a opté de se hisser au-dessus des considérations bassement partisanes. Que l’on soit de la MP
et ou de l’Opposition, n’est pas le plus important. Ce qui importe c’est ce qu’on fait au sein de ces plateformes politiques. Katumbi lui ne s’embarrasse de ces genres de considérations. Ses ambitions présidentielles peuvent s’accommoder de l’une ou l’autre plateforme politique sans édulcorer sa vision pour la grandeur du Congo et sa sympathie naturelle envers les rd-congolais de tous bords.
MATTHIEU KEPA