RDC : le gouvernement appelé à faire de la gestion des déchets une véritable source de revenus

Samedi 11 janvier 2025 - 11:51
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Kinshasa, la capitale de la République Démocratique du Congo, est confrontée à une crise aiguë de gestion des déchets. La ville est submergée par des immondices, avec des bouteilles plastiques et autres déchets qui jonchent les rues et les espaces publics. Même à proximité des ministères et d'autres édifices gouvernementaux, les déchets s'accumulent, illustrant une situation préoccupante qui nécessite une attention urgente.

Cependant, les déchets présentent également des opportunités économiques. En effet, une grande partie des déchets produits à Kinshasa est recyclable. En transformant ces déchets en ressources, il est possible de générer des revenus significatifs. De plus, un traitement adéquat des déchets permettrait de réduire les émissions de méthane, offrant ainsi la possibilité de gagner des crédits carbone sur le marché international.

Interrogé par 7SUR7.CD au début de ce mois de janvier à l’issue d’un atelier à Kinshasa sur la structuration du marché congolais du crédit carbone, Floribert Nyamoga, expert en ingénierie environnementale, a déclaré que les déchets constituent un danger lorsqu’ils ne sont pas traités, mais deviennent une mine d’or lorsque leur gestion est systématisée.

« Dans le cadre de l’économie circulaire, on peut aussi générer des crédits carbone en faisant subir aux déchets un certain nombre de traitements de sorte qu’ils réduisent leur niveau d’émission de méthane. On peut faire créditer ça et avoir des revenus supplémentaires », a-t-il affirmé.

Pour capitaliser sur ces opportunités, il est donc crucial de structurer la gestion des déchets. Actuellement, les interventions à Kinshasa se limitent à des actions ponctuelles, sans véritable approche systémique. Cette absence de coordination et de planification empêche l'émergence d'un système efficace capable de transformer les déchets en ressources économiques.

« Pour mieux capturer toutes les potentialités économiques qu’il y a dans la gestion des déchets, il faut premièrement commencer par structurer le secteur. Depuis des années, nous n’accumulons que des interventions conjoncturelles. On récupère donc les déchets au point A pour les jeter au point B. Ensuite, on attend le prochain tour. Tant que la gestion des déchets n’est pas dans une approche systémique, tout ce qui est fait sera multiplié par zéro peu de temps après », souligne Floribert Nyamoga.

En plus de la structuration, l’expert encourage également l'éducation et la sensibilisation des citoyens. Il est impératif d'informer chaque habitant de Kinshasa sur l'importance d'une gestion durable de ses déchets. Un changement de comportement au niveau individuel peut avoir un impact significatif sur la propreté de la ville.

« Le début de la solution est d’abord de faire comprendre à chaque citoyen ce qu’il doit faire de ses déchets. Cette étape, nous pouvons l’appeler orientation stratégique », a-t-il expliqué, ajoutant que « la revalorisation des déchets doit devenir une priorité pour réduire le volume destiné à la décharge finale. Il est nécessaire d'adopter de nouvelles pratiques favorisant le recyclage et la valorisation, ce qui permettrait non seulement de diminuer l'impact environnemental, mais aussi de créer des emplois dans le secteur du recyclage ».

Pour lui, le projet d'appui à la réhabilitation et à l'assainissement urbain de la ville de Kinshasa (PARAU), financé par l’Union européenne de 2007 à 2015, n’était pas aussi efficace comme on peut le penser. Il reproche à ce projet, qui permettait de traiter 11 000 mètres cubes de déchets urbains chaque semaine, de n’avoir pas pris en compte le volet recyclage.

« À l’époque où l’Union européenne appuyait la gestion du système à Kinshasa, on avait des stations de transfert où transitaient les déchets avant qu’ils n’arrivent au centre d’enfouissement de Mpasa. Le système était donc basé sur un seul itinéraire technique, du centre de transfert au centre d’enfouissement. Mais si on décidait de les valoriser, on peut par exemple mettre en place des centres de tri. Ceci peut permettre à plusieurs déchets d’être revalorisés », a conclu Floribert Nyamoga.

En 2010, Kinshasa produisait 10.000 tonnes de déchets par jour. Ce chiffre aurait triplé à ce jour, d’après une commission parlementaire qui a été récemment mise en place par l’Assemblée nationale pour analyser les causes de l’insalubrité, des embouteillages et des constructions anarchiques dans la capitale congolaise.

Bienfait Luganywa