Gode Mpoy : «Les montagnes des déchets ont disparu, nous sommes en train de construire ou de refaire des routes pour relier le nord au sud et l’ouest à l’est» (Enquête, volet 4, fin)

Jeudi 18 août 2022 - 10:40
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La personnalité de Gode Mpoy est une somme  des contrastes : des prestations spectaculaires à coup des prêches satiriques assaisonnées des danses que ne renierait pas Zaïko Langa Langa à l’économiste qui déroule les axiomes de la bonne  gouvernance , Gode Mpoy est insaisissable , déroutant, incisif, provocateur mais aussi pédagogue sans renier la trop bonne opinion qu’il a de sa personne.  Dans une interview sans fard, on en sait beaucoup plus sur les missions, les ambitions et les limites de l’assemblée provinciale mais également sur ses  opposants et il répond aussi aux polémiques et railleries sur ses tenues dominicales aux couleurs chatoyantes.  
 
7sur7.cd : En mars 2021, le président Félix Tshisekedi est intervenu dans le dossier de la reconstruction du marché central, ne revenait-il pas à l’assemblée provinciale de Kinshasa de prendre cette initiative ?
 
Godé Mpoyi : La première chose qu'il faut retenir c'est que, bien avant l'intervention du chef de l'Etat, l'assemblée provinciale s'était déjà saisie de ce dossier. L'enjeu politique était tel que, ceux qui cherchaient à nous remplacer, avaient, sur fond des propos mensongers, mobilisé l'opinion nationale et comme vous le savez, Kinshasa c'est le siège des institutions de la République et le grand marché c'est en fait le lieu du grand négoce pour notre ville. Lorsqu'il y a des problèmes de ce côté-là, ça peut toucher à la sécurité. C'était tout à fait normal que le chef de l'Etat intervienne parce qu’il est le garant du bon fonctionnement des institutions. Comme certains membres des institutions autres que celles de la ville étaient impliqués, il était tout à fait normal que le chef de l’Etat intervienne mais auparavant, l'assemblée provinciale de Kinshasa avait déjà institué une commission qui avait travaillé et pratiquement vidé cette question.

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7sur7 : La communication du président avait-elle repris les conclusions de cette commission ?
 
G.M. : Les indications et recommandations du président de la République avaient épousé les contours du rapport de notre commission. La difficulté principale provenait du fait que  l'ancien occupant du grand marché qui n'avait pas respecté les termes du contrat, avait des actes de justice dont certains ont été signés même les dimanches.
 
7sur7 : Quelle réponse feriez-vous à ceux qui affirment que l’assemblée provinciale est à résoudre des querelles politiciennes et à débarquer des ministres ?
 
G.M. : Je constate avec regret que des personnalités sans références notoires sont omniprésents dans nos médias pour insulter, désorienter la population. Toutes les autorités le disent, en matière de stabilité institutionnelle, nous sommes un modèle et nous avons constaté qu'au niveau de la presse, il y a des journalistes que vous êtes mais aussi des agents de propagande, des mercenaires qui sont payés pour ne dire que des mauvaises choses sur le fonctionnement de la ville de Kinshasa. Certains nous demandent de l'argent, lorsqu'on leur dit que l'argent c'est pour réhabiliter la ville de Kinshasa, ils coalisent pour désorienter l'opinion. On ne peut parler des querelles avec les ministres provinciaux, nous les interpellons quand il le faut. Cependant, lorsque certains viennent avec des «interpellations alimentaires» sous couvert des questions orales, il ne faut pas compter sur moi.
 
7sur7 : Qu’est-ce qui caractérise ce que vous appelez  des « motions alimentaires»  ?
 
G.M. : On les repère lorsque les gens déposent leurs motions avec tambours et trompettes et le soir, ils commencent à contacter certains membres du bureau pour voir comment se rapprocher du gouverneur. C’est révoltant ! Je fais la politique pour servir la population et il y a des gens qui demandent qu'on arrête la construction et la réhabilitations des routes pour leur remettre l'argent, jamais je ne ferai cela.
 
7sur7 : On pourrait donc déduire que l’opposition est inexistante au sein de l'APK ?
 
G.M. : L'opposition existe, seulement nous sommes arrivés à l'APK dans le contexte du partenariat FCC-CACH, nous avons donc prôné l’ouverture et c’est ce qui fait que dès le début, il y a eu des représentants de LAMUKA dans notre bureau. Cependant, il nous arrive d’avoir des contradictions internes. Pour que l'opposition soit active, il faudrait que ceux qui ont l'Imperium soient défaillants. Nos réalisations parlent pour nous : les montagnes des déchets le long des routes ont disparu à part quelques monticules. Dans un mois, nous allons professionnaliser l'assainissement. Le recrutement pour les engins que nous venons de commander a commencé, c'est tout cela qui rend l’opposition silencieuse.
 
7sur7 : Néanmoins, sur les 48 élus provinciaux, combien sont censés être de l'opposition ?
 
G.M. : C'est conjoncturel. Le jour où on leur dit qu'il faut tuer Godé, ils sont nombreux. Quand Godé échappe à la mort, ils deviennent moins nombreux.
 
«Si on respetait la constitution qui autorise les villes à retenir 40 % des recettes à la source, on verrait une gouvernance exemplaire»
 
7sur7 : L’aménagement, l’eau, l’énergie électrique, l’enseignement font partie des domaines d’intervention de l’APK, comment vous répartissez concrètement les rôles avec le gouvernement provincial ?
 
G.M. : En ce qui concerne le management public infranational, l'assemblée provinciale légifère c'est-à-dire dresse le cadre. A part le fait de dresser le cadre, nous effectuons deux types de contrôle : il y a des cas pour lesquels le contrôle est a priori, notamment le cas de l'endettement et il y a également le cas où le contrôle est a posteriori. C'est nous qui votons le budget, c'est nous qui avons élu les gouverneurs, c'est nous qui avons adoubé le programme. Et en management public, celui qui adoube le programme, il s'en approprie. C'est pourquoi  j'entends les gens qui n'ont aucune connaissance sur le fonctionnement de l'Etat dire  ‘’le président de l'APK prend  la place de l'exécutif’’, non l'assemblée provinciale de Kinshasa est le premier organe de cette ville. Donc au-dessus de l'APK il n'y a que le chef de l'Etat, il n'y a personne qui peut nous donner des instructions sur cette ville.
 
C'est pour cela que non seulement nous avons approuvé le programme du gouvernement provincial pendant 5 ans, mais chaque année nous renouvelons notre confiance au gouvernement en votant l'édit budgétaire, et c'est dans l'édit budgétaire qu'on décline toute l'action publique de la province. c'est pour vous dire que tout ce qui se fait de bon sur cette ville s'il y a des gens qui peuvent s'en vanter c'est d'abord l'assemblée provinciale de Kinshasa c'est comme ça que fonctionne le management public.
 
«Gombe a toujours été bien servie, il fallait penser aux banlieues. Ceux qui vivent sont aussi des Kinois à part entière»
 
7sur7 : Pouvez-vous citer quelques réalisations notoires ?
 
G.M. : Aujourd'hui, si vous allez à Bumbu, Selembao, Ngiri-ngiri, Makala Terre jaune, Kinsuka, vous allez constater qu'il y a des routes qui ont été refaites et d’autres construites. C'est ça l'esprit de l'opération Kinshasa zéro trou et il ne faut pas oublier qu'au niveau de la ville de Kinshasa, il y a des routes qui sont prises en charge par la province et celles qui sont sous la responsabilité du gouvernement central. Nous nous sommes dits qu'il faudrait corriger certaines injustices. Gombe a toujours été bien servie, il fallait penser aux banlieues. Ceux qui vivent là-bas sont aussi des Kinois à part entière.

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Lorsque nous avions commencé avec Elengesa, l'objectif était de relier le nord (Gombe) au sud (Mont-Ngafula). Avec Elengesa, on pourra quitter Mont-Ngafula, traverser Makala, puis se retrouver à Mariano et par Victoire, pour atteindre le centre-ville. Il faudrait faire la même chose en reliant l'ouest à l'est. Nous nous sommes dits que le Boulevard Lumumba est dans un état impeccable, je n'ai pas honte de le reconnaître. Les anciens dirigeants n'ont pas fait que de mauvaises choses sur le plan national. Ils ont fait aussi de bonnes choses.
 
Le Boulevard Lumumba se trouve dans un parfait état. Nous trouvons la bretelle à partir de la FIKIN, c'est là que nous avons commencé à faire la route Kikwit qui part jusqu'au niveau de Selembao et descend vers l'UPN. Du coup, nous avons relié l'ouest à l'est.
 
7sur7 : A l’instar justement d’Elengesa, les chantiers ouverts suscitent beaucoup d'espoir, mais tirent en longueur...
 
G.M. : La réponse est simple : si on respectait les finances publiques des entités infranationales, nous respecterions les délais. D'après la constitution, il est dit clairement que les provinces doivent opérer à la source une retenue de 40% de toutes les recettes réalisées. Le gouvernement central ne nous a pas autorisé à le faire. L’État encaisse d’abord ensuite pour récupérer notre quote-part, il faut prier… Si nous ne respectons pas les délais c’est parce que le mécanisme de rétrocession aux provinces viole la constitution.
 
Je profite de cette occasion pour dénoncer la rétention méchante de la rémunération de l'APK. Ceux qui gèrent cette enveloppe se comportent comme si c’était leur propriété privée et nous versent cette somme en fonction de leurs humeurs.
 
Si on nous permettait d’opérer la retenue à la source, vous auriez vu une gouvernance exemplaire. N'oubliez pas que l'APK a mené une lutte farouche contre la fraude et le détournement des deniers publics. Mes proches, mes collaborateurs sont en prison jusqu'à ce jour et d’autres ont purgé leurs peines.
 
7sur7 : Certains considèrent cependant que votre traque des détourneurs s’est arrêtée à mi-chemin...
 
G.M. : J'entends les gens dire que les auditeurs font leur travail et la justice serait laxiste, mais lorsque vous présentez des dossiers mal ficelés, vous voulez que la justice fasse quoi ? Moi j’étais personnellement au four et au moulin, je faisais des études sur les dossiers. C'est vrai que nous nous plaignons du fonctionnement de notre justice, mais quand vous entendez des gens dire que le dépassement budgétaire est une faute de gestion, les bras m’en tombent !
 
7sur7 : Quelle lecture faites-vous de la gouvernance politique et économique de Gentiny Ngobila ?
 
G.M. : Pour toutes les questions liées au gouverneur, je vous demande de le voir personnellement. L'année passée, j'ai signé 52 ordres de mission. Tous les rapports ont été déposés. On m'a dit que les choses fonctionnent comme je le voulais. Je m'en tiens à cela. Le jour où il y aura un seul dossier, je vais remonter sur mes grands chevaux. Quand j'ai reçu tous ces rapports, j'ai invité l'IGF. Jusque-là, les rapports que je reçois ne contredisent pas le travail effectué par l'APK.
 
 
7sur7 : Votre statut de professeur d'économie peut être considéré comme un atout pour l’APK, à quelle hauteur budgétaire auriez-vous estimé détenir les moyens de votre politique ?
 
G.M. : Le budget a été revu à la baisse. L'année passée, nous avions un budget de 800 millions de dollars. Cette année, nous avons 750 millions. L'apport de l'État, c'est autour de 70% mais, nous sommes privés de ces moyens et c'est une situation qui date de 2006. Le budget idéal pour Kinshasa serait de 3 milliards de dollars.
 
Autre manque à gagner, lorsque vous êtes dans les pays comme l'Irlande, la Norvège et consorts, les provinces collectent des impôts sur les revenus. Malheureusement cela n’est pas possible en droit congolais. A Kinshasa par exemple, nous avons un problème sérieux avec des sociétés immobilières. Elles sont exonérées de l'impôt sur les revenus locatifs. Toute personne qui a deux ou trois maisons dans deux localités de premier rang, se convertit en société immobilière.

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Ça serait bien qu’on respecte la constitution qui mentionne le droit pour les provinces d’opérer la retenue à la source.
 
7sur7 : La loi autorise l’APK à recourir à l’endettement intérieur, à quelle hauteur y avez-vous recouru et à quelles fins ?
 
G.M. : Jusqu'à ce jour, l'assemblée provinciale de Kinshasa n'a autorisé que deux emprunts. Le premier était d’un peu moins d’un million de dollars parce qu'il fallait continuer les travaux de construction des routes notamment Elengesa. C’est du concret : aujourd'hui, vous pouvez partir du palais du peuple sans affronter les embouteillages de l'avenue du 24 Novembre autrement dit Libération, vous faites Kasa-vubu, Ngiri-ngiri, Bumbu, Selembao, et vous sortez directement sur N’landu, vous montez directement à l'Upn.
 
Ensuite, à un certain moment, il y avait des difficultés liées à l'article 40 de la loi de 2008 portant principe de libre administration des provinces, nous avons autorisé un emprunt de 1.200.000 dollars. Mais avec tout ce qu'il y avait comme tintamarre autour du marché central, la banque qui avait déjà accepté de financer les travaux et qui s'était même portée garante auprès du chef de l'Etat, a dû reculer parce qu’elle ne comprenait pas que des officiels combattent une action développementaliste de la ville.
 
La banque avait cherché des garanties supplémentaires au niveau de l'assemblée c'est-à-dire du bureau, nous l’avons autorisé. Etant donné que la procédure n'a pas encore abouti, je ne peux pas avancer des montants, de peur que les banques qui ont accepté de nous accompagner reculent. Nous étions obligés de le faire, sinon les travaux du grand marché n'allaient pas commencer et je constate avec bonheur que ces travaux ont commencé.
 
«L'accoutrement obéit à des conditionnalités scientifiques, raciales et culturelles (...) Macron par exemple, il n'y a pas seulement de la symphonie, il y a aussi de la syntonie entre sa peau et son accoutrement.»
 
7sur7 : Dans un resgistre plus léger hors champ politique, par la force des choses, les internautes attendent tous les dimanches vos photos pendant le culte, pour faire des commentaires sur vos tenues et on a l’impression que vous jouez volontairement le jeu...

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G.M. : Non, Je m'habille normalement. Voilà comment cette affaire a commencé : quand je traquais les prédateurs de la ville de Kinshasa, ils avaient recruté quelques journalistes avec pour mission de me créer des problèmes avec le nouveau chef de l'État en disant dans leurs commentaires que je voulais, par mon habillement, attirer l'attention sur moi dans des manifestations.
 
Malheureusement pour eux, les choses ont pris une autre tournure et partout où je passe, les gens cherchent à me prendre en photo. Ceux qui pensaient me nuire ont fait gratuitement ma propagande. C'est ce qui fait qu'un jour, j'étais aux USA dans un supermarché, pour moi, c'était un endroit caché, je vois un groupe de noirs venir me saluer avec enthousiasme car ils m'ont reconnu. Je ne participe pas à un challenge, je mène ma vie normalement. Vous pouvez regarder mes photos depuis le berceau et quand j'étais élève à l'Athénée royal de Kalina, j'avais déjà des chemises Yves Saint Laurent et c'était avant que la Chine ne devienne un Etat. Quand j'étais en secondaire, j'avais déjà des tricots Paul and Shark...
 
L'accoutrement obéit à des conditionnalités scientifiques, raciales et culturelles. Les gens imitent Macron qui met du noir mais c’est parce qu'il est blond. Il n'y a pas seulement de la symphonie, il y a aussi de la syntonie entre sa peau et son accoutrement. Mais certains font du mimétisme tragique. Sur le plan scientifique, dans des pays où il fait très chaud comme en Afrique, il est déconseillé de s'habiller en noir. Le noir capte la chaleur.
 
7sur7 : N'envisagez-vous pas de déposer à la SOCODA la danse ‘’Yesu tinda mupepe’’ ?
 
G.M. : (Rires…) Presque toutes mes danses ont été prises. Quand nous avons commencé ndenge na ndenge, un jour j'étais au Grand Hôtel, un orchestre était en train de jouer et quand les musiciens m'ont vu, ils ont commencé à chanter : ‘’Tinda mupepe’’... Je vais recourir aux grandes qualités de juriste du directeur général de 7sur7.cd pour protéger mes droits concernant cette danse...

 

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