Mais que compte larguer le Raïs après des entretiens prévus avec les élus du peuple ?
Le chef de l’Etat congolais, en sa qualité d’Autorité morale de la Majorité présidentielle, ne connaît aucun moment de répit ces derniers temps. Depuis quelques temps, le Raïs semble plus chercher à écouter qu’à parler. Lors de la dernière rencontre de Kingakati, dimanche dernier, Joseph Kabila a plutôt choisi de laisser les deux camps de sa famille politique ( le groupe de sept partis dit G7 et les autres) s’exprimer librement. C’est pour cette raison qu’il s’était juste limité à introduire la réunion, avant de se retirer purement et simplement. C’est qu’il prépare quelque chose et, pour ce faire, il se donne le temps d’écouter avant d’abattre sa carte finalement. Que prépare donc Joseph Kabila ? La question est sur toutes les lèvres à l’approche des enjeux électoraux qui pointent déjà à l’l’horizon.
Il faut certainement être devin pour prétendre connaître la bombe que prépare l’Autorité morale de la Majorité présidentielle. Pour un homme reconnu pour sa discrétion et son refus de se prononcer à longueur de journée comme un tribun plus enclin à discourir qu’à agir, le Raïs garde sans nul doute la meilleure pour la fin car la discrétion est sa seconde nature. On comprend pourquoi il laisse d’abord les gens s’exprimer avant de se prononcer. Mieux vaut, conseille-t-on généralement en politique, d’abord prendre la vraie température de la situation avant d’indiquer le cap. Surtout que ce n’est pas tous les jours que le Raïs convoque les siens. Cette fois-ci, il a profité de la lettre du groupe de sept partis de sa famille politique pour ouvrir un large débat au sein même de la Majorité présidentielle.
LE RAÏS PREPARE-T-IL SON DAUPHIN ?
Cette question, jugée hautement sensible, taraude déjà l’esprit de bon nombre d’observateurs avertis de la scène politique congolaise. Surtout lorsqu’à la lumière de la dernière rencontre de Kingakati, aucun tabou n’est de mise. Toutes les questions, autorise-t-il, peuvent être abordées sans aucune hypocrisie et sans aucune interférence. Pour certaines sources, le Raïs serait prêt à désigner son successeur parce qu’au terme de la Constitution, il est fin mandat en 2016 sans possibilité de renouvellement. Ce sujet serait-il au centre de la grande annonce que préparerait Joseph Kabila ? Difficile de le dire pour l’instant. Mais, toujours est-il l’Autorité morale de la Majorité présidentielle devra bel et bien donner sa position après avoir écouté les différentes sensibilités de sa famille politique sur les questions de l’heure.
Or, la plus grande des questions politiques de l’heure, demeure l’élection présidentielle en décembre 2016. En dehors de Joseph Kabila, qui pourra conduire les troupes de la Majorité au front ? Voilà une préoccupation qui semblait d’ailleurs pousser certains partis politiques à chercher à mettre sur pied une nouvelle plateforme électorale. A travers le langage franc et sincère qui se développe à la ferme présidentielle, cette question ne semble plus du tout être verrouillée. Bien au contraire, les uns et les autres ayant désormais eu la possibilité d’épancher leur cœur, il s’agit de se dire des vérités, alors toutes les vérités. Plus question de passer par des voies détournées pour essayer de faire passer son message. C’est ce qui justifie le débat houleux observé à KIngakati lors de la rencontre de dimanche dernier.
DESORMAIS, KABILA SEUL DEVANT SA CONSCIENCE
« On est seul dans la vie ». Cet adage, souvent combattu, démontre toujours sa raison d’être lorsqu’il s’agit, pour une grande personnalité politique, de prendre rendez-vous avec l’histoire en décidant pour la suite des évènements. Tous ceux qui ont eu, à un moment de leur vie, à prendre souvent de mauvaises décisions l’ont finalement regretté. C’est dire qu’aujourd’hui, le Raïs est seul devant sa conscience parce qu’il doit choisir entre désigner son dauphin de manière çà ce que celui-ci bénéficie du soutien de sa famille politique et agir autrement. Que va donc dire Joseph Kabila à l’issue de toutes les rencontres politiques initiées au sein de la Majorité ? Pas facile d’être à sa place maintenant face aux différents discours généralement préparés pour le besoin de la cause et parfois sans la moindre sincérité.
Avant la dernière rencontre de Kingakati, le Raïs avait initié une série d’audiences avec au moins treize personnalités politiques de la Majorité présidentielle, surtout des chefs de partis politiques. Ce qui l’avait poussé à laisser libre cours à toutes sortes de réunions toujours au sein de sa famille politique. Mais, comme à l’accoutumée, après que tous se soient finalement exprimés, il devra bien se prononcer. Députés et sénateurs de la Majorité présidentielle devront, eux aussi à leur tour alors, s’exprimer sur des questions sensibles de l’heure. C’est dire que les choses ne font que commencer en prévision du scénario de 2016 et, pourquoi pas, des élections locales, municipales et urbaines prévues cette année dans le calendrier global de la Commission électorale nationale indépendante.
QUELLES CONTREPROPOSITIONS AUX PROPOSITIONS DE L’OPPOSITION ? Ce sujet ne doit pas manquer aux rencontres de la Majorité présidentielle. Car, l’Opposition propose de renvoyer à plus tard, c’est-à-dire après 2016, toutes les élections locales, municipales et urbaines prévues en 2015 afin d’accorder la priorité aux élections législatives tant provinciales que nationales et présidentielle fixées en 2016. Les opposants craignent, comme lors de la tentative de révision constitutionnelle, un glissement par rapport au calendrier publié par la Ceni. Mais, que dit alors la Majorité présidentielle face à la proposition de l’Opposition ? Car, les deux camps de la Majorité ne semblaient pas du tout parler le même langage tant au sujet de la révision constitutionnelle que de la révision de la loi électorale. Il s’agit maintenant de consolider l’unité en s’accordant sur l’essentiel.
C’est dire que l’opinion attend d’en savoir plus sur de grandes questions politiques de l’heure au terme de toutes les réunions initiées par l’Autorité morale de la Majorité présidentielle. Aujourd’hui que l’heure des vérités semble avoir finalement sonné et que les uns comme les autres peuvent vraiment dire tout ce qu’ils pensent, il faudrait s’attendre à ce que l’annonce du Raïs contribue surtout à fixer les esprits une bonne fois pour toutes. Car, la langue de bois n’est plus autorisée à l’approche de grands enjeux électoraux, c’est plutôt le moment bien choisi pour cracher le morceau comme on dit généralement. La Majorité présidentielle pourrait amorcer de grandes manœuvres politiques à partir des consultations qui s’ouvrent actuellement. Mais, il ne faut pas être plus kabiliste que Kabila. M. M.