Sous réserve d’autres provinces non visitées par les enquêteurs, le Trésor public de la République démocratique du Congo (RDC) perd globalement un montant de CDF 2.588.349.728 suivant la seule rubrique «Rémunérations » dans le secteur de la santé. L’enquête diligentée à cet effet vient de faire des révélations fumantes.
Le Gouvernement se dit « déterminé à réussir le processus de la bancarisation de la paie des agents et fonctionnaires de l’Etat sur l’ensemble du territoire national ». En dépit des difficultés liées à l’absence des banques dans certains coins qui sont servis par l’ASBL Caritas, moyennant une rétribution de 5% sur l’enveloppe globale des rémunérations, le ministère du Budget vient de découvrir le pot-au- roses.
Il ressort d’une enquête diligentée par la vice-ministre du Budget, Me Ernestine Nyoka, faisant l’intérim de son titulaire en date du 10 janvier 2015, qu’une mission de contrôle de la paie des agents de l’Administration du ministère de la Santé publique avait été effectuée dans les provinces du Kongo Central, Kinshasa et Sud Kivu.
Le rapport renseigne que le Trésor public perd globalement une bagatelle somme de 2.588.349.728 de Francs congolais rien que pour des provinces contrôlées.
Discordance des effectifs sur les listings de rémunérations
A titre indicatif, pour la province du Kongo Central (ex-Bas-Congo), il ressort de ce rapport qu’au niveau de l’Administration de la Santé publique, les résultats obtenus sur les listings de base laissent apparaître 101 doublons au 3ème trimestre 2014 représentant un montant mensuel de CDF 6.997.987 ; 97 doublons sur les listings du 4ème trimestre 2014, soit CDF 7.991.515 francs congolais.
A cela, s’ajoutent 2.678 agents déclarés sur les listings « paiement-prime » de la Direction de la paie qui n’ont pas été reconnus par la Division provinciale de la santé au Kongo Central, représentant un montant mensuel de CDF 43.759.486.
Outre les problèmes relatifs aux doublons identifiés sur les listings de la paie, il a été découvert de nombreux cas de détournement de salaires des professionnels de la santé
En définitive, au Kongo-Central, depuis le mois de juillet 2014 jusqu’à ce jour, le Trésor public a perdu au total une enveloppe de près de 646.238.868 francs congolais.
En ce qui concerne la ville-province de Kinshasa, le rapport a révélé l’existence de 785 doublons sur les listings des primes du mois de juillet 2014 émis par la Direction de la paie et 303 doublons sur les listings des rémunérations.
Dans le même ordre d’idées, la discordance des effectifs sur les listings de rémunérations de la Direction de la paie, soit 15.679 agents contre 12 .605 sur les listes du Secrétariat Général de la Santé ; 3.160 noms repris sur le listing de la Direction de la paie non retracés dans la base des données du Secrétariat général à la Santé pour un impact de CDF 328.469.516 (salaires de juillet 2014).
S’agissant du rapport préliminaire sur la province du Sud Kivu, il a été révélé l’existence de 216 doublons sur la liste déclarative de la Division provinciale de la Santé contre 83 sur les listings de la Direction de la paie.
Quant à l’Equateur, la mission diligentée au mois d’avril 2015, plus précisément à Mbandaka et Gemena, révèle un coulage mensuel de CDF 134.470.112, soit un montant annuel de CDF1.613.641.344 francs congolais.
En définitive, sous réserve d’autres provinces non visitées par les enquêteurs, le Trésor public perd globalement un montant de CDF 2.588.349.728 suivant la seule rubrique Rémunérations.
Hormis le secteur de la Santé, sont aussi épinglés ceux du SECOPE, de l’ESUR, de l’EPSP, etc. Les listings tirés à la Direction de la paie, à partir de l’Administration à Kinshasa, posent problème du fait de l’établissement en province des listes déclaratives au moment de l’exécution de la paie. Pour la vice-ministre du Budget, « il y a lieu d’obtenir un fichier unique des listes de la paie des agents et fonctionnaires de l’Etat ».
Une mise en place pour « réformer intégralement le secteur de la paie »
Par ailleurs, le processus de la paie est lui-même entravé du fait que « les listings destinés à l’arrière-pays devraient passer par trois Divisions, à savoir : le Contrôle, la Statistique et la Liquidation. Contre toute attente, le Contrôle et la Statistique sont consultés tandis que la Liquidation est escamotée ».
Au ministère du Budget, on argue que « la récente mise en place des Cadres de l’Administration du Budget intervenue le 28 avril 2015 a été dictée par la nécessité de réformer intégralement le secteur de la paie à l’effet d’en améliorer le fonctionnement et de fiabiliser les opérations de paie dans son ensemble.
Le reste des provinces sera visité incessamment à l’effet d’y imprimer la nouvelle vision d’orthodoxie devant sous-tendre les opérations de la paie ».
Pour démanteler le réseau maffieux et mettre à profit l’instruction du Premier ministre lors de son passage à la Direction de la paie, la réforme sur la bancarisation doit être finalisée dans l’optique de la consécration d’un fichier unique pour tous les agents et fonctionnaires de l’Etat, estime-t-on.