L’opinion ne cessait de s’interroger au sujet de la morosité qui marque la session extraordinaire du Parlement, où la loi sur la répartition des sièges pour les élections locales, municipales et urbaines, qui devait tenir la vedette, n’est toujours pas discutée. Selon des brides d’information en circulation sous les manteaux, le texte recalé par l’Assemblée nationale lors de sa session ordinaire (mars-juin 2015) et dont la copie devait être revue et corrigée au niveau du gouvernement, n’est pas encore actualisé. Bref, à quelques jours de l’expiration du délai d’un mois imparti aux députés et sénateurs pour réexaminer et adopter la mouture gouvernementale supposée remaniée, le travail de toilettage n’a pas été fait.
Le projet de loi sur la répartition des sièges n’étant pas prêt jusqu’à ce jour, on laisse entendre que le ministre de l’Intérieur a enjoint la CENI (Commission Electorale Nationale Indépendante) de contourner la difficulté en apprêtant carrément, à son niveau, une nouvelle cartographie des sièges, à présenter au Parlement comme « Annexe » à la Loi Electorale déjà votée et promulguée par le Chef de l’Etat. Il se fait que cette institution d’appui à la démocratie est confrontée à l’obstacle juridique constitué par les 13 décrets pris en son temps par le Premier ministre et portant création de nouvelles villes et cités à travers la République. Face à cette difficulté de taille, le ministre de l’Intérieur, toujours lui, a demandé à ce que soient mis en veilleuse les décrets susmentionnés. Incapable de réaliser pareille prouesse, la CENI a renvoyé la balle au gouvernement, lui conseillant d’abroger lui-même, à l’initiative du Premier ministre, les décrets susvisés.
Manifestement, l’exécutif national ne veut pas prendre le risque de remettre en cause les statuts reconnus à de nouvelles entités érigées aujourd’hui en villes et cités, à la grande joie des populations du Congo profond. Et, du côté de la Ceni, on a bien compris le piège et on se garde de se hasarder sur un terrain fort glissant.
L’autre difficulté à laquelle est confrontée la CENI se trouve être la collecte des données de terrain devant lui permettre de procéder à la répartition des sièges pour les élections locales, municipales et urbaines. Compte tenu du découpage territorial, avec sa mosaïque de nouvelles provinces, villes et cités, pareil travail devrait consommer trois mois ou plus. Par conséquent, même si la volonté de faire quelque chose était là, la fameuse « Annexe » à la Loi électorale ne pourrait être ficelée avant la fin de la session extraordinaire du Parlement.
Elections des gouverneurs de nouvelles provinces : la CENI ignorée
La CENI était surprise, autant que des millions de Congolais, d’entendre le ministre de l’Intérieur annoncer, le 11 juillet 2015, le calendrier des élections des gouverneurs de nouvelles provinces issues du découpage territorial. Selon l’arsenal juridique congolais, les questions électorales relèvent de la compétence exclusive de cette institution d’appui à la démocratie. A la lumière de l’initiative du ministre de l’Intérieur, d’aucuns se demandent si la CENI est toujours indépendante du pouvoir exécutif.
Et même si la prérogative d’organisation les élections de futurs gouverneurs de nouvelles lui était rétrocédée, il lui faudrait remplir plusieurs préalables, notamment l’enregistrement des candidatures, leur examen et endossement, l’élaboration des listes provisoires, la réception et l’examen des recours des candidats invalidés, la publication des listes définitives, la tenue de la campagne électorale, les élections proprement dites, le dépouillement des résultats, la publication des résultats provisoires, l’attente des décisions judiciaires au sujet des recours des candidats malheureux, la proclamation des résultats définitifs, l’investiture des gouverneurs élus, etc. Le processus requiert un délai suffisamment long. En conséquence, il est matériellement impossible à la CENI de le boucler avant le 27 août 2015, comme exigé par le gouvernement.
Implosion du calendrier électoral : à qui la faute ?
Au vu de ce qui précède, il n’est plus un secret pour personne que le calendrier électoral a déjà implosé. Placée devant des contraintes juridiques, techniques, administratives et financières qui ne lui permettent pas de remplir correctement sa mission, la CENI se trouve totalement bloquée dans son travail. Et pourtant, il lui est demandé de faire l’impossible. La tendance tourne même à sa diabolisation par des décideurs politiques qui commencent à lui imputer la mauvaise foi. Voyant être poussée à la faute, elle tente de résister. Pour combien de temps ? L’avenir va nous le dire bientôt.
Kimp