Comme on le sait, la motion de défiance contre le Vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur Evariste Boshab vendredi dernier a été contrée par une motion incidentielle du PPRD Ramazani Shadari. L’Opposition dans toutes ses composantes a crié à la violation flagrante de l’article 146 de la Constitution et a, pour la énième fois au cours de cette législature, claqué la porte de l’hémicycle comme mesures de représailles contre la MP.
Elle n’a pas dit jusqu’à quand elle maintiendra ce boycott. Mais elle va cependant dans l’entretemps saisir la Cour constitutionnelle en interprétation de l’article 146 de la Constitution, celle qui se rapporte justement à la motion de censure contre le gouvernement et à la motion de défiance contre un membre du gouvernement.
Le danger d’une telle sortie de l’Opposition qui est minoritaire et ne dispose pas d’un quorum de blocage pour le siège et le vote des lois n’est pas dans le nombre. Mais plutôt au niveau des idées contradictoires qui doivent s’entrechoquer au prétoire. C’est l’Opposition qui apporte cette contradiction sur les matières débattues.
C’est cela qui forge la démocratie. Or en dehors de cette contradiction, le risque est de se retrouver avec une Chambre monolithique, qui n’émet que la seule opinion, celle de la majorité au pouvoir, comme dans l’ancien Conseil législatif de la République du Zaïre. C’est une telle Chambre monocolore qu’il faut à tout prix bannir au risque de se voir faire un rétro-plongeon dans les années 80, donc 35 ans en arrière.
MEME LE PARLEMENT DE LA CNS AVAIT LA CONTRADICTION
Les dernières élections législatives de l’ancien Zaïre ont eu lieu en 1987. Même au HCR, le Parlement de la CNS qui a vu le jour fin 92, il y avait la contradiction.
Le camp du pouvoir de Mobutu Sese Seko vomi à l’époque par le peuple y était représenté. Il est même devenu majoritaire avec la création du HCR-PT, une fusion du HCR de la CNS avec les 250 députés de la dernière législature du Conseil législatif monocaméral élus en 1987.
En dépit de ce mélimélo, il y avait toujours la contradiction. C’est là où le Président de l’Assemblée nationale, Aubin Minaku est interpellé. Il doit mettre tout en œuvre pour cette tradition de la contradiction dans l’hémicycle. C’est par un trésor de diplomatie et de tact à déployer qu’il est appelé a passer pour convaincre ses pairs de l’Opposition à mettre un terme au boycott.
Car le souverain primaire a besoin de la contradiction. C’est l’une des missions principales du speaker qui est un arbitre, un rassembleur. Les Congolais attendent voir le président de l’Assemblée nationale ramener toutes ses ouailles au bercail. Les convaincre à revenir. Dans ce rôle, le speaker est comme un pasteur qui veille au grain sur son troupeau.
Ces Congolais-là qui sont le souverain primaire de ceux qui siègent à la Chambre refusent d’être ramenés au Conseil législatif de triste mémoire.
L’ASSEMBLE NATIONALE UN TEMPLE DE DEMOCRATIE
Il ne faut pas ramener les Congolais à des régimes de pensée unique. Il ne faut pas travestir le rôle de la Chambre qui est un temple de démocratie. Démocratie veut dire débat contradictoire. Qu’est-ce qui divise la MP et l’Opposition dans l’hémicycle ? C’est l’interprétation de l’article 146 sur les motions contre le gouvernement.
Quelle est l’intelligence de cette disposition ? Est-ce qu’elle stipule qu’une autre motion peut contrer une motion de censure ou de défiance contre un membre du gouvernement lorsqu’elle réunit le nombre des signatures requis pour sa recevabilité qui est d’un dixième des membres qui composent l’Assemblée nationale ?
C’est le cas avec la motion de défiance contre le Vice-Premier ministre, ministre de l’Intérieur rejetée par la motion incidentielle de Ramazani Shadari. Il est bon de constater que les deux parties, les députés de l’Opposition et leur Président de Chambre Aubin Minaku ont décidé de saisir la Cour constitionnelle pour interpréter cette disposition qui les a toujours divisées pour toutes les motions de défiance initiées depuis la première législature contre des membres du gouvernement.
Ce qui veut dire que les requérants vont se plier à la décision de la haute Cour, car au-dessus de cette juridiction, il n’y a plus d’autre instance judiciaire pour statuer en appel. Cet Arrêt de la Cour constitutionnelle qui est très attendu dans l’hémicycle fera office de jurisprudence et mettra fin à cette querelle sur l’article 146. Ce sont ses termes qui vont désormais servir de boussole aux motions de censure ou de défiance contre des membres du gouvernement. KANDOLO M.