
Notre diplomatie citoyenne et féministe dans le contexte de la crise sécuritaire et humanitaire en République Démocratique du Congo (RDC).
Suite à l'escalade des conflits et la prise des villes de Goma et Bukavu en janvier et février 2025, notre approche diplomatique citoyenne représente un exemple puissant et multidimensionnel de leadership féminin.
De Kinshasa à Washington DC en passant par Pretoria, Nairobi, New York, Oslo, Bruxelles, Paris et Genève…
L’action que nous menons combine plusieurs axes : le plaidoyer pour les droits des femmes et des filles, l'intégration des femmes et jeunes dans les processus de paix, et une réponse humanitaire coordonnée en collaboration avec des organisations de solidarité humanitaire féministe.
Voici ce qu'il est possible de conclure de notre approche globale “la diplomatie citoyenne et féministe” :
1. Une réponse d’urgence féministe face à la crise humanitaire et sécuritaire.
À travers la réponse humanitaire du consortium de solidarité humanitaire féministe CSH-RDC, les femmes apportent une réponse centrée sur le genre et spécifiquement sur les besoins des femmes et des filles.
Cette approche permet d’agir directement sur la protection des populations les plus
vulnérables, notamment les femmes et les enfants, dans un contexte de conflit armé où les violences sexuelles sont courantes et souvent utilisées comme arme de guerre.
En initiant un consortium de solidarité humanitaire féministe, Nous faisons le lien entre l’action humanitaire et les besoins spécifiques des femmes et des filles touchées par le conflit, en intégrant des réponses ciblées, telles que :
- Des services de santé reproductive, y compris des soins pour les victimes de violences sexuelles.
- Des actions de protection pour éviter les mariages précoces et/ou forcés, l'exploitation sexuelle et les violences basées sur le genre.
- L'accès à l'éducation et à l’apprentissage, à la fois pour les filles déplacées et celles
dans les zones de guerre, afin de prévenir l’exploitation et le recrutement forcé par les
groupes armés.
Cette approche souligne la nécessité d’une réponse humanitaire féministe, qui place les femmes et les filles au cœur de l’assistance humanitaire, répondant non seulement à leurs besoins immédiats, mais aussi à leurs droits fondamentaux.
2. Un plaidoyer puissant pour la participation des femmes et des jeunes dans les processus de paix.
Nous plaidons avec force pour que les femmes et les jeunes soient activement impliqués dans tous les processus de paix et de réconciliation en cours.
Ce plaidoyer répond à une double exigence :
- D’une part, celui de réparer les injustices faites aux femmes en situation de guerre, en
veillant à ce qu’elles puissent participer aux négociations de paix et aux décisions
concernant leur avenir.
- D’autre part, celui de l’intégration des jeunes dans les processus de paix, afin de
garantir une réconciliation durable et d'éviter que la jeunesse ne devienne une proie facile pour les groupes armés.
En combinant ces deux aspects (la participation des femmes et des jeunes), nous cherchons à transformer les structures de pouvoir et à garantir que les décisions de paix ne soient pas seulement dictées par les élites politiques ou militaires, mais qu’elles prennent également en compte les besoins et les aspirations des femmes et des jeunes qui sont les plus directement touchés par la guerre.
Nos actions visent à créer un modèle de paix inclusif et durable.
3. L’initiative du consortium de solidarité humanitaire féministe.
En réponse à l'escalade des violences et à la prise des villes de Goma et Bukavu, Nous
avons créé un consortium de solidarité humanitaire féministe CSH-RDC pour coordonner les efforts humanitaires entre organisations féministes et ONG humanitaires.
Ce consortium :
Permet de réunir des acteurs clés de la société civile féministe pour mener une réponse collective et cohérente face à la crise humanitaire.
Met l’accent sur des actions de solidarité concrètes, telles que l'aide aux réfugiés et déplacés internes, la distribution de kits de survie, l'accès à des centres d’accueil pour les victimes de violences sexuelles (communément appelé espace sûr), et la mise en place des programmes d'éducation et d’apprentissage ainsi que de réinsertion pour les jeunes et les femmes vulnérables.
Travaillant également sur des stratégies de plaidoyer communes afin de faire pression sur les gouvernements locaux, les organisations internationales et les bailleurs de fonds pour qu'ils prennent des mesures immédiates et efficaces face à la situation et d’intervenir.
4. Mobilisation internationale et pression pour un engagement politique.
En parallèle de son action humanitaire, Nous engageons également des actions de plaidoyer au niveau international pour mettre en lumière la situation des femmes et des filles en période de guerre, et pour inciter les décideurs politiques à garantir leur inclusion dans les négociations de paix.
Nous exerçons un lobby auprès des organisations internationales telles que les Nations Unies, l'Union africaine, l’Union Européenne et la communauté internationale en général, afin de :
- Faire pression sur les gouvernements pour qu'ils respectent leurs engagements
internationaux relatifs aux droits des femmes et des filles, notamment la résolution 1325 et 2250 de l'ONU sur les femmes et les jeunes, la paix et la sécurité.
- Pousser pour l’inclusion systématique des femmes et des jeunes dans les processus
politiques et de reconstruction post-conflit.
Nous positionnant ainsi comme une intermédiaire stratégique entre les communautés locales, les acteurs humanitaires et les instances internationales, en veillant à ce que les droits des femmes et des jeunes soient pris en compte dans la diplomatie de paix et que des actions concrètes soient mises en place pour leur protection.
5. Renforcer l’autonomisation des femmes et des jeunes dans un contexte de reconstruction
En parallèle de notre plaidoyer pour la participation aux processus de paix, nous œuvrons pour l'autonomisation économique des femmes et des jeunes dans les zones de conflit, afin qu'ils puissent participer activement à la reconstruction post-conflit.
Cela passe par :
- Le soutien à des initiatives économiques locales : comme la création de petites entreprises, de coopératives féminines et de programmes d'insertion pour les jeunes.
- L’accès à des formations professionnelles, notamment dans des secteurs comme
l’agriculture, l’élevage, le commerce, et les technologies, pour renforcer leur autonomie
financière et leur résilience face à la crise.
En renforçant l’autonomisation des femmes et des jeunes, nous ne nous contentons pas de répondre à leurs besoins immédiats.
Nous œuvrons également pour leur réintégration dans la société après le conflit et pour leur empowerment dans la reconstruction de leur communauté.
Ce volet de notre action est essentiel pour garantir une paix durable, car il permet aux
populations affectées de devenir des acteurs et actrices actifs dans leur propre avenir.
Conclusion :
Notre action dans la crise actuelle est un exemple pragmatique et innovant de diplomatie citoyenne et féministe qui lie l'humanitaire à l'activisme pour les droits des femmes et des filles, tout en intégrant une dimension politique forte pour la participation de tous dans les processus de paix.
Notre approche est holistique, abordant simultanément la protection, la réponse humanitaire, la réconciliation, et la reconstruction post-conflit. Elle démontre que les femmes et les jeunes ne sont pas seulement des victimes, mais des actrices et acteurs essentielles dans la construction d'une paix durable et inclusive.
Grâce à notre plaidoyer, notre réseau d'organisations et notre diplomatie citoyenne et féministe, nous ouvrons la voie à un modèle de paix qui soit à la fois inclusive, durable et respectueux des droits humains en général et des femmes et filles en particulier.
Pourvu que notre contribution de la diplomatie citoyenne soit reconnue, soutenue, considérée et valorisée.
Anny T.Modi
Experte en Genre, Environnement et développement.
Directrice Exécutive de Afia Mama ASBL