Les incidents qui se sont produits le lundi 10 juin 2019 au Palais du peuple, et qui se sont prolongés le lendemain à Lubumbashi où le siège du Pprd a été systématiquement pillé par les combattants s'affichant de l'Udps, ne sont pas pour consolider la démocratie. Il est à craindre que ce mercredi ou dans les jours à venir, l'exploit de destruction des bureaux du Fcc soit réédité.
Cest surprenant que des faiseurs d'opinion, parmi lesquels ceux qui sont considérés comme références, s'abstiennent de les condamner avec fermeté. Une façon subtile d'encourager les auteurs de ces incidents entendre la dérive.
Des victimes, la plus touchée dans sa chair et dans sa conscience est sans doute Jeanine Mabunda Lioko. Non pas du fait d'être la première femme congolaise à exercer la présidence de l'Assemblée nationale sur base d'une double élection (d'abord comme députée nationale, ensuite à la tête de la chambre basse), mais du fait davoir été livrée en pâture aux combattants par son adjoint direct, Jean-Marc Kabund.
Dans une interview au site 7sur7.cd publiée sous le titre « Kabund : Quand il y a une motion pareille je devais être mis au courant, ce qui n'a pas été fait. Tout a été boutiqué, j'ai toutes les informations", le président intérimaire de l'Udps (cest-à-dire successeur en titre de Félix Tshisekedi interdit par la Constitution à exercer des fonctions statutaires au sein du parti) étale son manque de connaissance du règlement intérieur de l'Assemblée nationale.
"Je suis membre du bureau, c'est quand-même déplorable ce qui est arrivé ce jour-là parce que moi-même étant membre du bureau, quand il y a une motion pareille, je devais être mis au courant. Ce qui n'a pas été fait. Ce dont je suis personnellement frustré, cette attitude de vouloir bien faire les choses en cachette, boutiquer des choses alors que nous sommes membres d'un bureau et ça devait être discuté ensemble dans la mesure où le chef de l'État n'est pas comptable devant l'Assemblée nationale", va-t-il déclarer.
La main sur le coeur, il affirmera : "Tout ce qui a été fait, c'est clairement établi que ça été boutiqué. J'ai toutes les informations possibles et à la limite je pourrais calmer les combattants".
Et il aura l'audace de renchérir : "Vous savez le chef de l'État est à la tête d'un parti de masse. C'est pas facile de l'attaquer comme ça parce que vous avez une majorité et en fin de compte, on vit des choses comme ça. Moi-même je suis pris à partie par les mêmes jeunes. Ils reconnaissent en moi un homme intègre, quelqu'un qui n'a jamais comploté contre le chef de l'État, je suis un homme de conviction. Je fais ce que mon intime conviction me demande de faire".
Sauf mauvaise foi de sa part, Jean-Marc Kabund sait que c'est le député Mlc Léon Mondole qui est intervenu par motion incidentielle pour demander à la chambre basse «de formuler une recommandation par laquelle on demanderait au président de la République, Félix Tshisekedi, de rapporter ces ordonnances des nominations des animateurs de la Société Nationale des Chemins de Fer et de la Gecamines».
Dans la pratique, cette motion ne se rejette pas sans être soumise au vote. D'abord, elle suspend le cours normal de la plénière jusquà ce qu'elle soit vidée. Mais, auparavant, elle fait objet d'un débat entre les pour et les contre.
On n'a donc pas besoin de la boutiquer en aparté pour qu'elle soit validée.
Déjà, il y a lieu de douter du fait que le député Mlc Mondole se soit offert à un complot Fcc pour lancer cette motion. Une plainte éventuelle de Mondole à charge de Kabund devant l'organe de loi le mettrait K.O.
La procédure veut qu'une fois la motion mise en branle, les députés s'estimant lésés ont tout le loisir de la bloquer en participant activement au débat.
Qu'ont-ils fait, Jean-Marc Kabund et le groupe parlementaire Udps et Alliés en observant la tournure des événements ? Rien. Rien sans doute parce que se retrouvant tous sur une terra incognita.
Ainsi, les incidents du 10 juin 2019 sont révélateurs du drame qui se vit en interne au sein de l'Udps et qui doit amener le Président Félix Tshisekedi à en tirer toutes les conséquences : dans leur majorité, les députés élus ne se sont pas préparés à exercer des fonctions élevées dans les Institutions du pays. Dans le cas de Jean-Marc Kabund, ce drame se traduit par le fait de son incapacité à contrôler les troupes. Il n'a su comment s'y prendre lors de la fronde suscitée par la débâcle aux sénatoriales. Il n'a pas su non plus comment s'y prendre le 7 juin pendant la plénière consacrée incidentiellement aux ordonnances querellées. Il ne sait même pas s'y prendre dans la crise de succession à la tête de l'Udps.
Par contre, il a réussi à retourner les combattants contre Jeanine Mabunda pour seul et unique tort pour elle d'avoir fait respecter la procédure relative à la motion incidentielle.
CP